EPR : Bruno Le Maire met la pression sur EDF afin qu'il tienne « ses coûts » et « son calendrier »

Par latribune.fr  |   |  655  mots
Attendu cette année avec 12 ans de retard, l'EPR de Flamanville se chiffre désormais à 13,2 milliards d'euros, selon EDF. Soit quatre fois le budget initial de 3,3 milliards d'euros. (Crédits : SARAH MEYSSONNIER)
Le ministre de l'Economie, qui a prévu d'assister au prochain comité exécutif d'EDF fin mars, exhorte EDF à notamment faire « des économies d'échelle » sur la construction des six futurs réacteurs nucléaires EPR.

Bruno Le Maire met la pression sur EDF. Dans un entretien au Monde publié ce mercredi, le ministre de l'Economie exhorte l'énergéticien de « tenir ses coûts et son calendrier » concernant les six futurs réacteurs nucléaires de type EPR commandés par l'Etat à EDF.

« Il s'agit de construire une série de réacteurs dont le premier exemplaire sera l'EPR de Penly [Seine-Maritime]. Cela veut dire des économies d'échelle. Je participerai au prochain comité exécutif d'EDF, fin mars, avec un message simple : EDF doit tenir ses délais et ses coûts », déclare à ce sujet le ministre.

La facture des EPR gonfle

Sans le dire, Bruno Le Maire réagit en filigrane à cette information révélée par le journal Les Echos lundi. Selon le quotidien économique, le coût prévisionnel du programme de construction des six premiers réacteurs prévus à Penly, Gravelines et au Bugey est désormais évalué à 67,4 milliards, au lieu des 51,7 milliards initialement annoncés en février 2022.

Les Echos révèle « qu'EDF avance deux raisons principales à cette révision de son budget ». D'abord, « la progression des coûts d'ingénierie, l'énergéticien ayant décidé de prendre neuf mois de plus que prévu pour finaliser les plans génériques de son réacteur EPR remodelé ».

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L'autre raison est liée à « la hausse des coûts de construction, qui résulte des premiers appels d'offres lancés par EDF pour anticiper la fabrication de certaines pièces critiques ou sécuriser des contrats clés ». Une première estimation annoncée en février 2022 dans un rapport gouvernemental, fondé sur deux audits externes, chiffrait le coût de ce programme à 51,7 milliards d'euros hors coûts( de financement) auxquels s'ajoutaient 4,6 milliards en cas de difficulté de mise en œuvre.

Colère des associations environnementales

L'information de l'augmentation des coûts a fait bondir des associations environnementales qui dénoncent le choix coûteux de l'Etat de recourir à un programme ambitieux de nouveaux réacteurs, dont le premier à Penly n'est pas attendu avant 2035-2037, au détriment, selon elles, des énergies renouvelables, déployables plus rapidement.

« En s'obstinant à relancer une industrie trop chère et trop lente face à l'urgence climatique, le gouvernement français sabote délibérément la transition énergétique », a notamment dénoncé Pauline Boyer, chargée de campagne Transition énergétique pour l'ONG Greenpeace France, citée dans un communiqué.

« Le gouvernement s'obstine à relancer cette industrie, au détriment des énergies renouvelables et d'une réelle politique de sobriété énergétique », a renchéri le Réseau sortir du nucléaire. « Les coûts du nucléaire s'envolent, et cela depuis longtemps » a aussi commenté l'association en rappelant les précédents déboires des EPR d'EDF en France et à l'étranger, ses dérapages de coûts et de calendrier.

12 ans de retard pour l'EPR de Flamanville

Les coûts de construction de réacteurs sont en effet souvent plus importants que prévu. Attendu cette année avec 12 ans de retard, l'EPR de Flamanville se chiffre désormais à 13,2 milliards d'euros, selon EDF, quatre fois le budget initial de 3,3 milliards d'euros.

En Angleterre, la facture du projet d'EPR de la centrale d'Hinkley Point a plus que doublé en janvier dernier, atteignant désormais entre 41,6 et 46,5 milliards en livres courantes dans un scénario de base, au lieu des 18 milliards estimés au lancement du projet en 2016.

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Devant une commission sénatoriale, Xavier Ursat, directeur exécutif d'EDF, avait admis le 8 février que le coût des EPR allait augmenter, sans toutefois en révéler le montant exact, au grand dam des parlementaires qui l'auditionnaient.

(Avec AFP)