Nucléaire : nouveau coup dur pour EDF au Royaume-Uni, le chantier des EPR d’Hinkley Point dérape encore

L'électricien français annonce que le chantier de construction de deux réacteurs nucléaires de nouvelle génération (EPR) à Hinkley Point, en Angleterre, accuserait un nouveau retard d'au moins deux ans, voire quatre dans le pire scénario, et des coûts supplémentaires d'au moins 5 milliards de livres.
Juliette Raynal
(Crédits : Reuters)

Nouvelle rallonge de calendrier et nouveaux surcoûts en perspective pour le chantier des EPR d'Hinkley Point C au Royaume-Uni. Après l'annonce, en mai dernier, d'un retard supplémentaire d'un an et des coûts additionnels d'au moins 3 milliards de livres, EDF a de nouveau partagé un glissement de calendrier ce mardi.

A force de ne pas tenir les délais, le groupe, entièrement détenu par l'Etat français, change de tactique : l'électricien ne communique plus sur une date ou un coût cible, mais sur des fourchettes. Il a ainsi fait savoir que le chantier devrait être retardé d'au moins deux années supplémentaires, voire quatre, dans un scénario défavorable. Autrement dit, alors que la mise en service de la première unité avait été repoussée en juin 2027, celle-ci interviendra désormais en 2029, au plus tôt, et en 2031 au plus tard.

Au moins 5 milliards de livres supplémentaires

Pour mémoire, le chantier d'Hinkley Point C correspond à la construction de deux réacteurs nucléaires de nouvelle génération (EPR) à Hinkley Point, dans le Somerset, au sud-ouest de l'Angleterre. EDF y exerce la maîtrise d'ouvrage. Initialement, sa mise en service était prévue en 2025 pour un coût total de 18 milliards de livres (soit environ 21 milliards d'euros).

Le coût, largement porté par le groupe français, devrait désormais se chiffrer entre 31 milliards de livres de 2015 (soit environ 36,2 milliards) d'euros et 35 milliards de livres (soit environ 40,9 milliards d'euros). En mai dernier, EDF avait réévalué le coût total « entre 25 et 26 milliards de livres », soit environ 30,3 milliards d'euros.

EDF promet « une estimation fiable »

Selon EDF, ces nouvelles prévisions s'expliquent par la prise en compte complète du design détaillé, qui n'avait pas été arrêté jusqu'alors. « Nous avons désormais suffisamment d'éléments pour faire une estimation fiable et non plus un saut dans le noir », indique le groupe. L'entreprise précise, par ailleurs, que « 70 % des équipements qui seront installés sur l'unité 1 sont livrés », « les générateurs de vapeur sont construits et prêts à être livrés », et que « les essais du système britannique d'instrumentation et de contrôle sont déjà en cours ».

Cette nouvelle estimation prend aussi en compte la mise en place réussie du dôme, intervenue en décembre dernier, soit avec deux années de retard sur le calendrier initial. EDF estime que la crise du Covid a eu un impact de 15 mois sur la durée du chantier. En dehors de cet effet, le projet a pris un mois de retard chaque année de chantier, fait valoir l'électricien. Aucune fourchette n'est communiquée pour la mise en service du réacteur numéro 2, mais celle-ci devrait théoriquement intervenir un an après la mise en service du réacteur numéro 1. « Le projet continue de capitaliser sur la construction des 4 autres EPRs dans le monde », assure l'électricien dans un communiqué, tandis qu'il devrait assurer 7% de la consommation nationale du Royaume-Uni.

Relance du nucléaire en France

Cet énième dérapage interpelle alors que la France s'apprête à lancer un plan de relance du nucléaire considérable avec la construction de six nouveaux EPR2, dont la mise en service ne devrait pas intervenir avant 2035-2037, pour un coût estimé à plus de 50 milliards d'euros. Emmanuel Macron devrait, par ailleurs, acter dès l'été prochain la construction de huit réacteurs supplémentaires.

Si trois EPR (European Pressurized Reactor) sont terminés, en Finlande et en Chine, et que trois autres sont en construction (un en France et deux à Hinkley Point), les retards accumulés jettent le trouble sur la capacité de l'Hexagone à tenir son calendrier. Et pour cause, le réacteur finlandais (Olkiluoto-3) a démarré en mars avec 12 années de retard, et sur les deux EPR chinois mis en service en 2018 et 2019, l'un est à l'arrêt depuis près de six mois en raison de problèmes techniques.

Quant au réacteur français, à Flamanville, il accumule lui aussi 12 années de retard et une envolée des coûts à 12,7 milliards d'euros : contre 3,3 milliards lors de l'annonce de son lancement en 2006. Le chargement du combustible est désormais prévu en mars et son démarrage à la mi-2024.

Juliette Raynal

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Commentaires 24
à écrit le 24/01/2024 à 12:00
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Il se disait dans les années 75 que le nucléaire (civil) nécessitaient des pays riches, industrialisés et en paix... Est-ce toujours exact... En outre j'ai un peu l'impression que cet EPR est un réacteur d'orgueil.. Notons qu'il existait une administ...

à écrit le 24/01/2024 à 10:51
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Ca s'appelle l'excellence à la française, paraît-il ! Il y a encore des français qui y croient les malheureux...

à écrit le 24/01/2024 à 9:53
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Après ça, il y a encore une poignée de tristes gogos et quelques politiciens particulièrement sensibles aux arguments sonnants et trébuchants des industriels du secteur, qui oseront crier au génie nucléaire. Cette forme d'énergie criminogène, inutile...

à écrit le 24/01/2024 à 9:45
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Heureusement les dirigeants n'ont pas leur "skin in the game". Pour eux c'est face je gagne, pile tu perds. Leurs salaires sont soit disant le prix de la responsabilité mais ils ne payent jamais le prix de leurs erreurs. JAMAIS !!

à écrit le 24/01/2024 à 9:44
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résumons la situation : un bel exemple de "l'excellence à la française". Si, si, il y en a encore qui ose en parler.

à écrit le 24/01/2024 à 9:44
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résumons la situation : un bel exemple de "l'excellence à la française". Si, si, il y en a encore qui ose en parler.

à écrit le 24/01/2024 à 9:44
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résumons la situation : un bel exemple de "l'excellence à la française". Si, si, il y en a encore qui ose en parler.

à écrit le 24/01/2024 à 8:10
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Tiens donc ici même il n n'y a pas si longtemps certains commentaient que sur HPC tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes et que HPC allait être un succès

à écrit le 24/01/2024 à 6:35
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Bonjour, lors de la signature des ces contrats ils a etait dit les difficulté de terminé ces travaux dans les delais... j espere que EDF a pris toute les messure du problème et que s'est travaux des plus importantes ne serons pas encore payée par...

à écrit le 24/01/2024 à 3:37
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le nucléaire civil est basé sur une escroquerie toute simple : l'enrichissement du combustible, le retraitement des déchets et l'enfouissement ne sont pas payés avec la facture électrique des consommateurs mais avec leurs impôts ...

le 24/01/2024 à 10:08
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@DENISE.Et l'éolien, vous ne pensez pas que la filière est rentable sans subvention. Il fallait garder des centrale au gaz au lieu d'accepter le diktat américain pour le gaz russe !!!

le 24/01/2024 à 13:17
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@calamard Est ce qu'il fallait aussi "donner les clefs" de la France à Poutine ? Et quant aux centrales à gaz, j'avais cru compendre que c'était très mauvais "climatiquement"; on m'aurait menti ???

à écrit le 24/01/2024 à 3:36
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Cette filière EPR ne peut fonctionner qu'en Chine où les contrainte de redondance de sécurité sont moindre. Au lieu de persister revenons aux technologies anciennes qui nous offrent des centrales fonctionnant depuis 50 ans sans problèmes majeures.

à écrit le 23/01/2024 à 23:05
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On ne peut croire que cette entreprise ne soit plus que l'ombre d'elle même, c'est si triste pour la France déjà tellement endettée.

à écrit le 23/01/2024 à 23:04
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N'ayant pas été consulté pour les projets hasardeux en Finlande et en UK (non plus que de Flamanville), je propose que les ministres, députés et sénateurs qui ont autorisé leur réalisation mettent la main à la poche en rendant l'équivalant de ce que ...

à écrit le 23/01/2024 à 21:43
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Ces gens-là ne sont pas sérieux. Qui peut les croire encore ?

à écrit le 23/01/2024 à 20:44
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"'Bouveau coup dur pour EDF au Royaume-Uni, le chantier des EPR d’Hinkley Point dérape encore". Donc coup dur pour l'État actionnaire à 100 de EDF (et pour les contribuables par analogie) 👏 Le succès pour détruire la France continue!!!

à écrit le 23/01/2024 à 19:44
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Il est temps que nos députés lancent une commission d'enquête face à ce nouveau désastre pour le contribuable français. Des gens doivent rendre des comptes; l'impunité ça suffit.

le 23/01/2024 à 20:43
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Elle a déjà eu lieu. Le rapport de la commission d'enquête est très bien fait et liste l'ensemble des erreurs à ne pas reproduire. C'est une des raisons pour lesquelles les nouveaux EPR programmés sont des EPR 2 et non des EPR classiques.

le 23/01/2024 à 23:27
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@Jeannot - La commission passe complétement sous silence la responsabilité des dirigeants d'EDF qui ont leur part de responsabilité dans le désastre de l'EPR de Flamanville, ne serait-ce que parce qu'ils ont réagi très tardivement aux dérives du proj...

à écrit le 23/01/2024 à 19:39
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La faute majeure de l'EPR est d'avoir été mal dimensionne. Il est trop puissant. Un réacteur plus petit aurait été plus simple a fabriquer. Les ingénieurs Français ont eu les yeux plus gros que le ventre, et ils refusent d'accepter leur erreur

le 23/01/2024 à 19:57
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Je me souviens d'un documentaire datant déjà de plusieurs années sur EDF. L'EPR était très loin d'être décrit comme la solution privilégiée par les cadres et les ingénieurs, qui considéraient que la technologie n'était pas mature. Au contraire l'ense...

le 23/01/2024 à 23:25
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@incognito - C'était sans doute un reportage sur AREVA, dont la patronne était effectivement Lauvergeon au moment de la signature du contrat finlandais aux clauses léonines, puisqu'AREVA s'engageait à supporter seul tout surcoût par rapport à une est...

le 24/01/2024 à 13:27
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Pas faux. Et très français. Ex SSC Concorde. Le produit fini a existé, sur des bases d'adaptation de composants datés, et d'iinovations intéressantes. Mais le concept lui même était vicié. L'avion pouvait correspondre à un "emploi dérivé" (bombardier...

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