Donald Trump menace le Venezuela d'une "option militaire"

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Donald trump menace le venezuela d'une option militaire[reuters.com]
(Crédits : Jonathan Ernst)

par James Oliphant

BEDMINSTER, New Jersey (Reuters) - Le président américain Donald Trump a menacé vendredi le Venezuela d'une intervention militaire, une surenchère inattendue dans la réponse de Washington à la crise politique vénézuélienne, qualifiée d'"acte de folie" par Caracas.

La vague de contestation politique au Venezuela est entrée dans une nouvelle phase il y a une semaine, avec l'entrée en fonction d'une Assemblée constituante aux pouvoirs illimités composée d'alliés du gouvernement socialiste.

"Le peuple souffre et des gens meurent. Nous avons de nombreuses options pour le Venezuela, notamment une possible option militaire si nécessaire", a déclaré le président américain à des journalistes.

Plus de 120 personnes ont été tuées au Venezuela dans des heurts entre forces de l'ordre et manifestants depuis le début du mouvement de contestation du gouvernement, en avril.

Les commentaires ont déclenché la stupeur à Caracas, où le ministère de la Défense Vladimir Padrino a dénoncé l'"acte de folie" d'une "élite extrémiste".

La Maison blanche a annoncé en outre que le président vénézuélien Nicolas Maduro avait sollicité un entretien téléphonique avec Donald Trump vendredi.

La requête a été manifestement refusée: le Bureau ovale déclare que Donald Trump s'entretiendra avec plaisir avec le dirigeant vénézuélien dès que la démocratie aura été restaurée dans le pays.

Interrogé sur les propos de Donald Trump, le Pentagone s'est dit prêt à soutenir les efforts de protection des citoyens américains et les intérêts des Etats-Unis, mais a ajouté que les insinuations de Caracas quant à un projet d'invasion du Venezuela étaient "sans fondement".

"MADURO DOIT ÊTRE RAVI"

Interrogé sur l'implication de l'armée américaine lors d'une éventuelle opération, Donald Trump s'est refusé à toute précision: "Nous n'en parlons pas, mais une opération militaire - une option militaire - est certainement quelque chose que nous pourrions poursuivre", a-t-il déclaré.

Le président américain a multiplié les menaces cette semaine sur fond d'escalade verbale avec la Corée du Nord, évoquant des représailles sans précédent en cas d'attaque du régime nord-coréen sur les Etats-Unis ou leurs alliés.

Les autorités vénézuéliennes font état depuis longtemps d'un projet d'invasion américaine. Un ancien général vénézuélien confiait cette année à Reuters que des missiles antiaériens ont été placés le long des côtes du pays pour parer à une telle éventualité.

Le Venezuela détient un stock de près de 5.000 missiles antiaériens de facture russe, selon des rapports militaires obtenus par Reuters, soit la plus grande quantité de missiles de ce type en Amérique latine.

Les commentaires de Trump ont fait resurgir la diplomatie américaine du siècle dernier quand le principe du "pré carré" prévalait dans la stratégie des Etats-Unis en Amérique centrale, où Washington n'hésitait pas à intimider militairement les pays de la région.

La dernière intervention américaine dans la région remonte à 1994-1995, date des opérations contre le régime militaire installé en Haïti en 1991.

Côté américain, le propos du président ont déclenché des critiques, notamment du sénateur républicain du Nebraska, Ben Sasse, membre de la commission des Services armés du Sénat.

"Le Congrès ne va évidemment pas autoriser une guerre au Venezuela", a-t-il déclaré dans un communiqué. "Nicolas Maduro est un être humain horrible, mais le Congrès ne vote pas pour verser le sang des Nébraskains sur la foi des invectives du jour de l'exécutif."

Les commentaires de Trump sont susceptibles de renforcer la crédibilité de Nicolas Maduro, qui se présente en défenseur de la souveraineté vénézuélienne face à Washington.

"Maduro doit être ravi", estimait Mark Feierstein, ex-conseiller de Barack Obama sur le Venezuela. ""Il est difficile d'imaginer des propos plus préjudiciables pour Trump."

Les Etats-Unis ont adopté des sanctions contre le président vénézuélien le mois dernier, au lendemain de l'élection d'une Assemblée constituante rejetée par l'opposition.

(James Oliphant avec Hugh Bronstein et Girish Gupta à Caracas, Julie Carriat pour le service français)