Birmanie : La vie suspendue dans l'Etat Rakhine, dit la Croix-Rouge

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Birmanie: la vie suspendue dans l'etat rakhine, dit la croix-rouge[reuters.com]
(Crédits : Susana Vera)

GENEVE (Reuters) - La vie s'est figée dans le nord de l'Etat Rakhine, région de l'ouest de la Birmanie où ne vivent plus que 180.000 Rohingyas après la fuite de 650.000 membres de cette minorité musulmane au Bangladesh pour échapper aux exactions de l'armée birmane, a déclaré mercredi la Croix-Rouge.

De retour d'une mission de trois jours dans cette région à l'accès très limité, Dominik Stillhart, directeur des opérations du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), souligne que la persistance des tensions religieuses dissuade les commerçants musulmans de rouvrir leurs magasins et étals sur les marchés de cette région majoritairement bouddhiste.

Le CICR est l'une des rares organisations humanitaires à avoir été autorisée à livrer de l'aide dans l'Etat Rakhine depuis que l'armée birmane a répondu à une attaque d'insurgés rohingyas le 25 août par une vaste campagne de répression qualifiée de "nettoyage ethnique" par l'Onu.

"La situation dans le nord de l'Etat Rakhine s'est stabilisée, il n'y a que des incidents très sporadiques, mais les tensions entre communautés sont énormes", a raconté Dominik Stillhart devant la presse.

"On ressent à quel point les deux principales communautés ont peur l'une de l'autre. Ce qui m'a surpris, c'est que ce ne sont pas seulement les musulmans qui ont peur, c'est le cas aussi des autres communautés."

DESTRUCTIONS MASSIVES

Le responsable du CICR a pu se rendre dans les trois villes du nord de l'Etat Rakhine dans lesquelles l'agence distribue de la nourriture, de l'eau et d'autres produits de première nécessité à environ 150.000 personnes.

La Croix-Rouge espère pouvoir aider d'ici la fin de l'année les 180.000 Rohingyas qui vivraient encore dans cette région "sensible", sur un total d'environ 300.000 dans l'ensemble de l'Etat, précise Dominik Stillhart.

"Quand on se déplace dans la campagne, on voit que des deux côtés de la route, les villages ont été totalement rasés", témoigne-t-il.

"Cela donne une idée de l'ampleur des destructions. Il y a aussi une impression prégnante d'absence. C'est comme si la vie s'était figée, les gens ne se déplacent pas, les magasins sont fermés (...)"

La principale difficulté à laquelle sont confrontés les Rohingyas aujourd'hui n'est plus tant la violence que "leur capacité très limitée à accéder à leurs moyens de subsistance, comme les champs et les étals sur les marchés", souligne le responsable du CICR.

Malgré la signature le mois dernier d'un accord de rapatriement entre le Bangladesh et la Birmanie, il dit ne pas s'attendre à ce que les réfugiés rentrent de sitôt dans l'Etat Rakhine, que les musulmans continuent à fuir au rythme d'environ 300 par jour, selon les chiffres de l'Onu.

(Tangi Salaün pour le service français)