Macron sous pression après l'acte de violence d'un collaborateur

reuters.com  |   |  938  mots
Un collaborateur de macron suspendu 15 jours pour des violences[reuters.com]
(Crédits : Gonzalo Fuentes)

PARIS (Reuters) - Emmanuel Macron et ses équipes ont subi jeudi un feu roulant de critiques de l'opposition après la révélation d'actes de violence commis par l'un de ses collaborateurs portant des équipements normalement réservés à la police.

Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour violences et usurpation de fonctions, après l'identification par le quotidien Le Monde de l'auteur de ces violences filmées le 1er mai place de la Contrescarpe, à Paris.

Alexandre Benalla, responsable de la sécurité de la campagne d'Emmanuel Macron devenu chargé de mission et adjoint au chef de cabinet du président, apparaît sur ces vidéos frappant un jeune homme, entouré de CRS et portant un casque de police.

Avertie le lendemain des faits, la présidence l'a suspendu 15 jours, sans faire la publicité de cet événement. Il a ensuite été réintégré, en perdant ses attributions en matière d'organisation des déplacements présidentiels.

Le porte-parole de la présidence a critiqué jeudi "un comportement inacceptable" et souligné que cette sanction était "la plus grave jamais prononcée contre un chargé de mission travaillant à l'Elysée".

Bruno Roger-Petit a ajouté qu'Alexandre Benalla avait été autorisé à observer le travail de la police mais qu'"il a largement outrepassé cette autorisation", dans une déclaration d'un genre inédit enregistrée à l'Elysée.

La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a dénoncé des "gestes absolument inadaptés" et des membres de la majorité ont demandé le départ d'Alexandre Benalla de l'Elysée.

"Les faits sont graves et ce chargé de mission ne peut pas rester collaborateur de l'Elysée", a déclaré le député La République en marche Laurent Saint-Martin sur BFMTV.

Le porte-parole de l'Elysée a fait état d'un autre cas, celui d'un gendarme réserviste également mis à pied 15 jours, avec suspension de salaire, pour des faits similaires commis le même jour et dans les mêmes conditions.

MACRON NE RÉPOND PAS DIRECTEMENT

En déplacement à Périgueux (Dordogne), Emmanuel Macron a refusé de répondre directement aux nombreuses questions des journalistes qui le suivaient, sauf lorsqu'on lui a demandé si la République était "entachée" par cette affaire.

"Non, non, la République est inaltérable", a-t-il dit.

Le parquet de Paris a annoncé l'ouverture d'une enquête préliminaire pour "violences par personne chargée d'une mission de service public", "usurpation de fonctions" et "usurpation de signes réservés à l'autorité publique".

Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, a annoncé la saisine de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) afin de "préciser quelles sont les règles pour l'accueil et l'encadrement de ces observateurs et, s'il en existe, de vérifier dans ce cas précis qu'elles ont été mises en oeuvre."

Sur d'autres documents datés du même jour, on peut voir Alexandre Benalla arborer un brassard de police

L'ex-ministre socialiste Arnaud Montebourg, cité par Le Monde, explique avoir congédié en 2012 ce spécialiste de sécurité, un temps membre du service d'ordre de Martine Aubry puis de François Hollande, qui avait "provoqué un accident de voiture en ma présence et voulait prendre la fuite".

L'ensemble de l'opposition, de droite comme de gauche, a exhorté l'Elysée à prendre des sanctions plus dures et à faire preuve de transparence.

A l'Assemblée, les députés de l'opposition ont interrompu l'examen en cours d'un projet de loi sur la réforme de la Constitution pour réclamer des explications sur cette affaire.

A l'issue d'une réunion des présidents de groupe, le président de la chambre basse, François de Rugy, a annoncé que la Commission des lois allait enclencher dans la soirée la procédure visant à être saisie d'une commission d'enquête sur les évènements du 1er-Mai. Des auditions pourraient être conduites dès la semaine prochaine.

En outre, le rapport commandé à l'IGPN, attendu en fin de semaine prochaine, sera transmis "immédiatement" à la présidente de la Commission des lois afin d'en informer les députés.

"DEUX POIDS, DEUX MESURES"

"Il est évident qu'Emmanuel Macron doit s'exprimer et faire la lumière sur ces faits", a déclaré le président des Républicains, Laurent Wauquiez. "Le sentiment qu'on a, c'est qu'à l'Elysée on se croit au-dessus de tout (...), on se croit au-dessus des lois", a-t-il ajouté sur Europe 1.

Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France insoumise, a quant à lui estimé que "c'est l'autorité de l'Etat elle-même qui est engagée (...) c'est la confiance qui est faite aux forces de l'ordre qui est engagée".

"Ce président s'autorise toutes les libertés alors qu'il impose aux Français tous les devoirs", a dénoncé Sébastien Chenu, député du Rassemblement national.

Evoquant un "deux poids, deux mesures", Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, a demandé sur France 2 des sanctions disciplinaires et une réaction de la justice.

Les syndicats de policiers ont fait part de leur consternation, Alliance-Police nationale déplorant dans un communiqué "que l'image de la police soit ternie par le comportement d'un individu extérieur aux forces de sécurité".

Alternative Police-CFDT estime que "si ces faits avaient été perpétrés par un policier (...) il aurait fait immédiatement l'objet d'une procédure judiciaire et placé en garde à vue, d'une procédure administrative avec une suspension ou un changement de service" dans un autre communiqué.

(Jean-Baptiste Vey et Simon Carraud, avec Emmanuel Jarry et Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)