Vivendi fait durer le suspense sur le futur du "joyaux" UMG

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Vivendi fait durer le suspense sur le futur du joyaux umg[reuters.com]
(Crédits : Arnd Wiegmann)

par Gwénaëlle Barzic et Mathieu Rosemain

PARIS (Reuters) - Vivendi fait miroiter aux investisseurs une possible mise en Bourse de son "joyaux" Universal Music Group, surfant sur la renaissance d'un secteur longtemps sinistré pour redorer son cours de Bourse en dépit de revers stratégiques.

Aucune décision concrète n'a été prise à ce jour mais Vincent Bolloré, l'actionnaire de contrôle du groupe de médias, a déjà partiellement remporté son pari.

En laissant planer depuis deux ans l'hypothèse d'une introduction en Bourse de sa filiale UMG, numéro un mondial de la musique enregistrée, Vivendi a déjà vu son cours de Bourse remonter à mesure que les analystes revoyaient à la hausse leurs valorisations de la pépite.

Au cours de cette période, l'action du groupe, qui détient également le groupe de télévision Canal ainsi qu'un portefeuille de participations, a grimpé de près de 38%, portant sa valorisation à 30 milliards d'euros alors que dans le même temps, le secteur des médias n'a gagné que 2%.

Dans un communiqué publié le 1er mai, Vivendi avait annoncé que son conseil de surveillance, réuni ce jeudi pour examiner les comptes du premier trimestre, devait examiner différents "scénarios concernant l'évolution du capital" de la filiale, alimentant l'espoir des marchés.

Le groupe a finalement indiqué que le conseil autorisait le directoire à "étudier et réaliser les opérations juridiques préalables nécessaires à l'évolution possible de la structure actionnariale du capital".

"PAS D'OPTION PRIVILÉGIÉE"

Aucun calendrier n'a été fixé par Vivendi, qui n'a aucune préférence quant à un scénario en particulier, ont précisé ses dirigeants lors d'une conférence analystes.

"Nous allons voir toutes les différentes options. Nous allons avoir un esprit très ouvert et faire un rapport au conseil de surveillance", a souligné le président du directoire Arnaud de Puyfontaine.

Le géant des médias a le choix entre plusieurs options, depuis l'introduction en Bourse d'une participation minoritaire, l'entrée au capital d'un partenaire, une scission complète mais aussi le statu quo.

Vivendi s'est contenté de préciser jeudi que seule une vente pure et simple était exclue.

La musique a le vent en poupe en Bourse, à l'image du géant suédois du streaming Spotify, désormais valorisé à près de 29 milliards de dollars depuis sa cotation.

En fonction de la valorisation qu'il pourrait obtenir pour UMG, le pari n'est toutefois pas sans risque pour le milliardaire breton : certains investisseurs pourraient préférer le label et déserter Vivendi qui pourrait aussi être pénalisé par une décote de conglomérat.

UMG, piloté de façon relativement indépendante depuis les Etats-Unis par Lucian Grainge, a vu ses revenus bondir de 10,0% à changes constants l'an dernier à 5,7 milliards d'euros. La filiale alimente 77% des bénéfices opérationnels de la société.

"Je suis positif sur Vivendi pour une seule raison : le label musical UMG. A mes yeux, il représente les deux-tiers de la valeur de Vivendi", estime un des 30 principaux investisseurs de Vivendi.

En novembre, Arnaud de Puyfontaine avait estimé que la maison de disque pourrait valoir plus de 40 milliards de dollars.

En fonction des scénarios retenus, les estimations des analystes varient de 18 milliards à 30 milliards d'euros, soit l'équivalent de l'actuelle capitalisation totale de Vivendi, un écart qui s'explique par l'absence de sociétés cotées comparables.

RENAISSANCE

Le marché mondial de la musique enregistrée a engrangé en 2017 des revenus en progression de 8,1% à 17,3 milliards de dollars, signant sa troisième année de croissance après 15 années de déclin.

Cette renaissance s'explique pour l'essentiel par le succès du "streaming" qui est devenu la première source de revenus grâce à ses 176 millions d'utilisateurs payant, à la faveur du succès des offres de streaming de Spotify, Deezer et désormais Apple Music et Amazon.

En dépit de cette remontée, les revenus ne représentent aujourd'hui que 68,4% du pic qui avait été atteint en 1999, ce qui laisse encore un large réservoir de croissance, estiment les experts du secteur.

Mais pour les investisseurs qui souhaiteraient parier sur cette renaissance, les cibles sont peu nombreuses, le secteur s'étant fortement consolidé au plus fort de ses difficultés.

"Une IPO potentielle d'UMG pourrait être totalement déconnectée de tout besoin de liquidités, mais plutôt pour tirer partir de l'appétit du marché pour les 'equity-stories' liés à la musique", estiment les analystes de HSBC dans une note.

Ils n'excluent pas non plus que le processus, très suivi par les investisseurs, permette d'éclipser d'autres sujets moins flatteurs comme l'enquête visant Vincent Bolloré sur ses activités en Afrique, ses difficultés en Italie et les négociations en cours sur le renouvellement des droits de la Ligue 1. et

(Avec Simon Jessop à Londres, édité par Jean-Michel Bélot)