SNCF : Philippe s'engage sur 35 milliards d'euros, l'Unsa s'interroge

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Sncf: l'etat reprendra 25 milliards d'euros de dette en 2020, 10 milliards d'euros en 2022[reuters.com]
(Crédits : Christian Hartmann)

PARIS (Reuters) - Edouard Philippe a annoncé vendredi une reprise de 35 milliards d'euros de dette de la SNCF et pris d'autres engagements qui laissent entrevoir une fracture du front syndical, avec d'un côté la CGT et Sud déterminés à poursuivre la grève, et de l'autre les syndicats réformistes, plus indécis.

Le Premier ministre a fait ces annonces lors de rencontres avec les principaux syndicats de la compagnie ferroviaire, qui se poursuivaient ce vendredi avec Force ouvrière et la CFDT.

Devant les représentants des cheminots, Edouard Philippe a promis de délester la compagnie en deux temps de 25 milliards d'euros en 2020 puis de 10 milliards d'euros en 2022.

Les syndicats attendaient depuis longtemps ce genre d'assurances, la SNCF post-réforme ne pouvant être viable avec une dette colossale sur les épaules - 47 milliards d'euros fin 2017 pour le seul réseau.

Le chef du gouvernement a également annoncé une hausse des investissements de l'Etat de 200 millions d'euros par an, pour un total de 3,8 milliards d'euros annuels, ont précisé les leaders syndicaux en sortant de Matignon.

"On a un gouvernement qui semble plus ouvert mais qui a du mal à s'engager", a jugé le secrétaire général de la CGT cheminots, Laurent Brun, tout en appelant à la poursuite de la grève entamée le 3 avril.

"Pas question de suspendre le mouvement" pour le moment, a ajouté le numéro de la fédération, qui était accompagné de Philippe Martinez.

La CGT réclame la tenue d'une table ronde tripartite, en présence de responsables patronaux, "pour que le gouvernement fixe ses engagements par écrit vis-à-vis des grévistes", ce à quoi Edouard Philippe "n'a pas dit non", selon Laurent Brun.

"VISION PLUS FAVORABLE QUE JAMAIS"

Sud Rail n'a pas dévié de sa ligne consistant à demander une suspension de la réforme et la démission de Guillaume Pepy, président du directoire de la SNCF.

A l'inverse, "la négociation paie" aux yeux du secrétaire général de l'Unsa ferroviaire, Roger Dillenseger, pour qui le texte aura "largement évolué" lors de son examen au Sénat, à partir du 29 mai en séance publique.

Pour l'instant, la deuxième force syndicale de la SNCF s'inscrit toujours dans la grève mais décidera "très rapidement" d'un éventuel changement de position, après consultation de ses instances, a-t-il déclaré.

Et "le plus tôt serait le mieux".

Aux engagements financiers s'ajoutent des infléchissements au projet de loi, en particulier sur le volet social, introduits dans le texte sous la forme d'amendements, se félicitent les responsables de l'Unsa.

"Notre perception, c'est qu'on sort aujourd'hui de cette réunion avec une vision plus favorable que jamais", toujours selon Roger Dillenseger.

La réforme, adoptée à la mi-avril en première lecture à l'Assemblée nationale, fera l'objet d'un vote solennel au Sénat le 5 juin. Elle prévoit l'arrêt de l'embauche au statut de cheminots à partir de 2020, l'ouverture à la concurrence et la transformation juridique de la SNCF.

Selon le calendrier défini par les organisations représentatives, la grève doit se poursuivre jusqu'au 28 juin, au rythme de deux jours d'arrêt de travail sur cinq.

Six Français sur dix jugent que le mouvement des cheminots n'est "pas justifié", une proportion en hausse de trois points par rapport au mois dernier, selon une enquête Odoxa-Dentsu Consulting pour France Info et le Figaro publiée jeudi.

(Simon Carraud et Jean-Baptiste Vey, édité par Yves Clarisse)