Brexit : Theresa May veut garder la main sur le processus

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May aurait promis de demissionner si les brexiters votent son accord[reuters.com]
(Crédits : Henry Nicholls)

par Guy Faulconbridge et Elizabeth Piper

LONDRES (Reuters) - La Première ministre britannique Theresa May tentait lundi de garder le contrôle du processus de sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, face à un Parlement lassé de l'impasse actuelle et désireux de prendre les choses en main.

Les appels se sont multipliés ces derniers jours au sein de son Parti conservateur pour qu'elle annonce une date pour sa démission.

Le texte d'accord de Brexit laborieusement négocié pendant deux ans avec Bruxelles a déjà été massivement rejeté deux fois au Parlement britannique, le 15 janvier et le 12 mars.

La Grande-Bretagne devait quitter l'UE le 29 mars mais les "Vingt-Sept" lui ont accordé un sursis jusqu'au 22 mai, à condition que l'accord soit ratifié aux Communes. Dans le cas contraire, le Brexit aura lieu le 12 avril.

Selon Robert Peston, chef du service politique d'ITV, Theresa May a dit à Boris Johnson, Iain Duncan Smith, Steve Baker, Jacob Rees-Mogg, David Davis et d'autres détracteurs de son plan réunis dimanche à Chequers, résidence de campagne des Premiers ministres britanniques, qu'elle démissionnerait s'ils votent pour son accord, "backstop" compris.

Mais plusieurs ministres ont repoussé lundi de telles spéculations. Ils ont assuré que Theresa May tenait toujours la barre et qu'ils n'avaient pas entendu parler d'une démission.

Reste que les députés de Westminster sont décidés à prendre l'initiative sur le processus de Brexit.

Ils doivent voter dans la soirée, à partir de 22h00 GMT, une série d'amendements en ce sens, amendements qui sont non contraignants mais qui mettraient encore plus la pression sur le gouvernement.

INCERTITUDE SUR UN TROISIÈME VOTE MARDI

Les principaux ministres se sont réunis lundi autour de la Première ministre au 10, Downing Street, pour discuter des prochaines étapes.

"La Première ministre a ouvert la discussion en disant qu'une sortie (de l'UE) sans accord n'était pas une option viable", a déclaré le numéro deux du service politique du Daily Telegraph, Steven Swinford. "D'autres ministres ont estimé qu'un 'no deal' valait mieux qu'un abandon du Brexit", a-t-il ajouté.

Selon d'autres informations, l'hypothèse d'élections législatives anticipées a été évoquée.

Dans ce chaos, on ignore si Theresa May présentera une troisième fois son projet d'accord aux députés.

"Nous ne demanderons un vote que si nous pensons être en position de l'emporter", a souligné le porte-parole de May, interrogé sur un éventuel nouveau scrutin mardi à Westminster.

Le dirigeant de l'opposition travailliste, Jeremy Corbyn, a rencontré Theresa May pendant plus d'une heure lundi à Westminster et lui a dit son opposition à un troisième vote sur le projet d'accord.

Le chef du Labour refuse notamment qu'on sépare l'Accord de retrait et la Déclaration politique sur les futures relations entre Londres et l'UE.

Pour faire adopter son texte, la Première ministre doit rallier les voix d'au moins 75 députés qui ont voté contre le 12 mars - conservateurs, travaillistes et élus nord-irlandais du Parti unioniste démocrate (DUP).

LE DUP REFUSE TOUJOURS L'ACCORD

Après la réunion à Downing Street, Theresa May a téléphoné à la dirigeante du DUP, Arlene Foster. Un porte-parole du parti unioniste a réaffirmé son opposition au texte proposé.

A Bruxelles, on pense un Brexit sans accord de plus en plus probable.

"Nous ne voulons pas d'un 'no deal' mais si cela doit se produire, alors il faut le faire vite", a dit un responsable européen.

Pour le commissaire européen aux Affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, "à l'heure où nous parlons, absolument tout est possible".

Interrogé à propos d'un "no deal", il a toutefois répondu: "Ma conviction, c'est qu'on peut l'éviter et je crois qu'on va l'éviter".

"C'est terminé, Theresa", titre lundi le Sun. La seule façon pour la Première ministre d'obtenir l'adoption du plan de sortie de l'UE, c'est d'annoncer la date de sa démission, écrit l'éditorialiste du tabloïd.

"J'espère que le gouvernement dira à la Première ministre que la partie est finie", a quant à lui déclaré le Brexiter conservateur Andrew Bridgen, selon qui Theresa May n'a ni la confiance du groupe parlementaire, ni celle du gouvernement, ni celle de l'opinion.

Samedi, des centaines de milliers de manifestants ont défilé à Londres pour exiger un nouveau référendum sur le Brexit.

(Avec Kate Holton, William Schomberg, David Milliken et Andrew MacAskill; Jean-Philippe Lefief et Guy Kerivel pour le service français)