Tensions au sein du gouvernement italien à un mois des européennes

reuters.com  |   |  680  mots

par Angelo Amante et Crispian Balmer

ROME (Reuters) - A un mois des élections européennes, les relations entre les deux partis de la coalition gouvernementale italienne, la Ligue d'extrême droite et le Mouvement 5 Etoiles (M5S), se sont encore tendues à la suite de l'ouverture d'une enquête pour corruption visant le secrétaire d'Etat aux Transports Armando Siri.

Le M5S, mouvement anti-système, a accusé son partenaire de mettre en danger la survie du gouvernement de coalition investi le 1er juin dernier.

Armando Siri est membre de la Ligue et conseiller économique de Matteo Salvini, chef du parti d'extrême droite, co-vice-président du Conseil et ministre de l'Intérieur. Il est accusé d'avoir touché des pots-de-vin - on parle de 30.000 euros - en échange de faveurs accordées à des entreprises du secteur des énergies renouvelables.

Il clame son innocence mais son ministre de tutelle, Danilo Toninelli, membre du M5S, l'a suspendu jeudi de ses responsabilités, le temps que toute la lumière soit faite.

Cette affaire a entraîné de vifs échanges entre les deux partis de gouvernement.

"Aujourd'hui, la Ligue menace la survie du gouvernement (...) Je suis effaré", a écrit vendredi sur Facebook Luigi Di Maio, chef du M5S et autre co-vice-président du Conseil.

Il a ajouté que le M5S avait dû par le passé s'opposer à des mesures "plutôt controversées" qu'Armando Siri voulait faire adopter par le gouvernement.

"Nous nous en souvenons bien. Lorsque ces mesures nous ont été présentées, elles nous ont semblé étranges et nous les avons repoussées (....) Sans nous, qui sait ce qui se serait passé ?", ajoute Luigi Di Maio sans donner de précisions à ce sujet.

"HYPOCRISIE"

Ces propos ont provoqué l'agacement de Matteo Salvini, qui a répondu dans un bref mais ferme communiqué.

"La Ligue entend bien gouverner, et longtemps, dans l'intérêt des Italiens. Imaginer une crise gouvernementale, ça ne peut se trouver que dans la tête de Di Maio", a-t-il dit.

"L'atmosphère entre nous n'a jamais été aussi mauvaise", a reconnu vendredi un dirigeant de la Ligue.

Les élections locales ces derniers mois en Italie ont été marquées par une nette progression du parti d'extrême droite et par une baisse parfois spectaculaire du M5S.

Le mouvement anti-système, qui a fait de la lutte contre la corruption son principal cheval de bataille, n'a pas lui-même été épargné par les accusations.

Jeudi, Matteo Salvini a taxé le M5S d'"hypocrisie".

"Je rappelle à nos amis de Cinq Etoiles qu'ils ont défendu (la maire M5S de Rome Virginia) Raggi quand elle a été visée par une enquête. S'il vous plaît, ne faites pas deux poids, deux mesures", a-t-il dit.

Virginia Raggi est restée en poste à la mairie de Rome bien qu'inculpée d'abus de pouvoir l'an dernier. Elle a ensuite été lavée de toute soupçon.

Mais alors même que sortait l'affaire Siri, le magazine L'Espresso reparlait de la maire de Rome en publiant ce qu'il présente comme des enregistrements gênants concernant une éventuelle manipulation des comptes de la société chargée de ramasser les ordures dans la capitale.

"Salvini n'est pas le seul à en avoir assez du M5S. Nous en sommes tous là", a confié au quotidien La Repubblica le vice-ministre des Transports Edoardo Rixi, membre de la Ligue.

Dans une projection globale rendue publique jeudi et s'appuyant sur des moyennes des instituts de sondage en vue des européennes, le Parlement européen relève que la Ligue est mesurée à 31,4% des intentions de vote contre 21,5% pour le M5S.

Aux élections législatives de mars 2018, qui ont débouché sur la coalition actuellement au pouvoir, le M5S avait remporté près de 33% des suffrages. La Ligue, qui se présentait en coalition avec plusieurs autres formations de droite, dont Forza Italia, avait réuni sur son seul nom 17% des voix (37% au total pour l'alliance de droite).

(Nicolas Delame et Guy Kerivel pour le service français)