Affaire Le Pen : la presse étrangère a suivi le feuilleton "sale" de l'extrême droite française

Par Nabil Bourassi  |   |  578  mots
Pour Marine Le Pen, la montée de son père sur l'estrade place de l'opéra était une nouvelle provocation.
Jean-Marie Le Pen s'est lancé dans une série de diatribes contre sa fille au lendemain de la suspension de son adhésion par les instances du parti qu'il a lui-même fondé. La presse internationale s'est intéressée de très près à cette affaire.

C'est la guerre, au Front ! Jean-Marie Le Pen tire désormais à boulets rouges contre sa fille Marine dont il souhaite même qu'elle ne porte plus son nom de famille. Le fondateur du Front National s'est dit "trahi" après la décision prise, lundi soir, par le bureau exécutif du parti de le suspendre de son statut d'adhérent pour une durée de trois mois.

Depuis, Jean-Marie Le Pen ne décolère pas contre sa fille qu'il veut "répudier". Sur Europe 1, celui qui était encore, il y a 24 heures, le président d'honneur du parti d'extrême droite français, a qualifié de "scandaleux" l'idée même que sa fille accède à l'Elysée en 2017 : "Si de tels principes moraux devaient présider à l'Etat français, ce serait scandaleux" a-t-il ajouté.

La presse internationale

La presse internationale a suivi le feuilleton de cette affaire politique franco-française. Tout en restant factuels, les grands titres ont néanmoins tenté de replacer cette affaire dans son contexte. Le Wall Street Journal constate ainsi que les soutiens de Marine Le Pen n'ont pas obtenu la sanction ultime qu'ils demandaient, à savoir l'exclusion définitive du patriarche.

De son côté, le Financial Times observe une rupture générationnelle au Front National avec, d'un côté, "la vieille garde" et, de l'autre, "une nouvelle génération autour de Marine Le Pen qui a cherché à atténuer la rhétorique xénophobe afin de capturer un électorat plus large". Le quotidien financier britannique juge que Marine Le Pen peut potentiellement dépasser François Hollande en 2017, mais que "son père est devenu un obstacle à sa stratégie".

Les journaux espagnols s'attardent sur l'aspect filial

En Espagne, le quotidien de centre gauche El Pais évoque la dimension filiale de l'affaire Le Pen : "Jean-Marie Le Pen a été humilié par sa propre fille". El Mundo, classé à droite, fait état de la "véhémence" des échanges entre père et fille, en utilisant la même formule pour parler de Marine comme "sa propre fille".

Le journal allemand Der Spiegel, lui, enterre la carrière du vieux patriarche: "C'est la fin d'une carrière, tout autant que celle d'un psycho-drame familial." Le journal titre d'ailleurs sur le "départ d'un clown". Le quotidien national Die Tageszeitung se place sur la même longueur d'onde en parlant d'une "fin longue et sale".

Le temps s'engage sur une analyse plus poussée

Le Temps, le quotidien suisse, a choisi de titrer plus fortement que ses collègues étrangers: "Marine Le Pen doit assumer son «parricide»". Le journal estime que Le Pen père "n'a pas les moyens de fédérer derrière lui une véritable dissidence". Les bons résultats électoraux de la fille permettent de justifier la stratégie de cette dernière.

Le journal suisse juge que Marine Le Pen court néanmoins le risque de s'aliéner la frange dure du Front National.

"Le vieux dilemme de l'extrême droite française resurgit: ou bien demeurer un parti «putschiste», foncièrement opposé à l'évolution multiculturelle et mondialisée de la société hexagonale, ou bien se rapprocher d'une forme de Tea Party à la française, une droite dure parlementaire", écrit Le Temps.

Enfin, le journal s'interroge sur la déchirure filiale, peu compatible avec "ce parti très crispé sur les valeurs de la famille, de la discipline, et du respect des valeurs traditionnelles".