Assurance chômage : ce que contient l'accord trouvé in extremis entre syndicats et patronat

Par latribune.fr  |   |  1085  mots
Le gouvernement avait étroitement cadré les débats dans un document envoyé début août aux partenaires sociaux.
La CFDT et la CFTC ont annoncé vendredi soir leur intention de signer un projet d'accord définissant les conditions d'indemnisation des chômeurs à compter du 1er janvier 2024, à l'issue d'une laborieuse négociation. Des conditions d'ouverture de droits, à la dégressivité en passant par l'emploi des seniors, les cotisations patronales et les ponctions de l'Unedic... La Tribune revient sur les principaux points de ce texte.

Après de longues heures de négociations, patronat et syndicats sont finalement parvenus à un projet d'accord sur les règles d'indemnisation des chômeurs à partir de 2024. Vendredi soir, la CFDT et la CFTC ont, en effet, indiqué vouloir signer le texte.

Elles n'ont toutefois pas été suivis par la CGT, dont le négociateur a estimé que « l'équilibre n'y est pas », même si « le patronat a retiré la plupart de ses provocations », ni par la CFE-CGC qui a même quitté la table des discussions plus tôt dans la soirée. Son négociateur, Jean-François Foucard, a dénoncé le maintien de la dégressivité des allocations pour les hauts revenus, une ligne rouge pour lui. De son côté, FO a dit attendre la décision de son bureau confédéral lundi, tout en notant que « les lignes rouges sont tombées », selon son négociateur Michel Beaugas.

Reste donc maintenant à l'exécutif à étudier le texte proposé. « On est prêt à le signer, maintenant faut-il encore qu'il soit agréé » par le gouvernement qui avait donné jusqu'au 15 novembre aux partenaires sociaux pour conclure, a, en effet, indiqué Eric Courpotin, négociateur de la CFTC.

D'autant que le gouvernement avait étroitement cadré les débats dans un document envoyé début août aux partenaires sociaux. Autrement dit, il ne s'agissait pas d'acter des retours sur la réforme de 2019, qui a durci les conditions d'accès à l'indemnisation des chômeurs, ni sur celle de 2023, qui module les conditions de l'assurance chômage selon la situation du marché du travail et a réduit la durée d'indemnisation de 25%.

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Les conditions d'ouverture de droits assouplies

Dans le détail, le texte prévoit désormais que, pour s'inscrire pour la première fois à l'assurance chômage, il faudra avoir travaillé au moins cinq mois, et non six mois, au cours des derniers 24 mois. Initialement, les syndicats voulaient revenir à quatre mois.

La durée d'indemnisation minimale sera, elle, fixée à cinq mois contre six actuellement.

Enfin, pour mieux sécuriser la situation des saisonniers sur le marché du travail, ils devront aussi avoir travaillé cinq mois pour être indemnisés et leur durée d'indemnisation minimale sera également de cinq mois.

La dégressivité maintenue

Concernant la dégressivité de l'allocation chômage, qui s'applique à ceux qui perçoivent une indemnité journalière supérieure à 91,02 euros par jour (correspondant à un salaire brut avant perte d'emploi de 4.850 euros), elle ne sera plus appliquée à partir de 55 ans, contre 57 ans jusqu'ici. Un échec pour le syndicat des cadres CFE-CGC, soutenu par d'autres organisations, qui réclamait la suppression de la dégressivité. « On part, on ne sera pas signataires », a ainsi dénoncé, vendredi, Jean-François Foucard, dénonçant un « simulacre de négociation ».

L'emploi des seniors renvoyé à une prochaine négociation

Les dispositions concernant l'indemnisation des seniors, notamment le recul des bornes d'âge pour une durée de droits allongée liées à la réforme des retraites, sont, en revanche, renvoyées à la future négociation dédiée qui doit s'ouvrir prochainement, en dépit de la volonté initiale des organisations patronales de les inclure. Mais le texte précise d'ores et déjà le volume d'économies à réaliser : 440 millions d'euros sur la période 2024-2027. Un point critiqué par plusieurs syndicats, dont la CGT qui y voit « une forme de tartufferie ».

« Les fins de carrière payées par l'assurance chômage, c'est terminé »", s'est réjoui, de son côté, Eric Chevée (CPME), ciblant à la fois les entreprises et les salariés concernés.

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Le projet d'accord prévoit, en outre, une « nouvelle forme de versement des droits » a expliqué Olivier Guivarch de la CFDT. Autrement dit : l'allocation versée sera identique chaque mois, sur la base de 30 jours. Et si, sur une année complète, les chômeurs perdront cinq jours d'indemnisation, et même six les années bissextiles, ces jours économisés viendront rallonger d'autant de jours les droits de ceux qui arrivent à la fin de leur période d'indemnisation.

Un enthousiasme que ne partage pas la CGT qui a jugé cette mesure comme étant une baisse de droits.

Selon les calculs du patronat, la mesure rapporterait 950 millions sur quatre ans à l'Unédic.

Baisse des cotisations patronales

Le patronat peut également se réjouir d'avoir obtenu gain de cause au sujet des baisses de cotisation pour l'assurance chômage. En partie seulement toutefois puisque les organisations patronales, qui réclamaient qu'elles passent de 4,05% à 3,95% de la masse salariale, ont finalement accepté une diminution deux fois moins importante, de 0,05% (soit 4%). Le coût sera de 1,5 milliard sur quatre ans pour le régime d'assurance chômage.

Autre disposition qui concerne le patronat : le système de bonus-malus qui vise à limiter le recours aux contrats courts. Actuellement, la cotisation des employeurs à l'assurance chômage est modulée en fonction de leur utilisation de ces contrats, par rapport à la moyenne de leur branche. Or, le texte entend restreindre le type de fin de contrats soumis au bonus-malus et ne prendre en compte que les fins de contrat d'une durée inférieure à un mois.

En ce qui concerne les intermittents, l'accord prévoit le maintien des règles actuelles d'indemnisation, écartant donc les avancées obtenues par un accord sectoriel négocié le 27 octobre. De son côté, le patronat voulait initialement durcir ces conditions d'indemnisation des techniciens et artistes des professions du spectacle.

Ponctions des excédents de l'Unédic

Enfin, à propos des ponctions supplémentaires sur les recettes de l'assurance chômage prévues par l'exécutif pour financer les mesures d'accompagnement et de formation des chômeurs, le texte estime qu'elles posent « une double difficulté », invoquant « une question de principe » et par rapport aux objectifs de désendettement de l'Unédic.

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En effet, le gouvernement entend prélever sur les excédents de l'Unédic, qui dépendent du taux de chômage, entre 2 et 4 milliards d'euros par an. Or, ce système va obliger l'organisme, qui est déjà lourdement endetté, à emprunter à court terme sur les marchés pour honorer ses échéances de remboursement, ce qui lui coûtera 800 millions sur quatre ans.

(Avec AFP)