Automatisation : l'emploi et les compétences au centre des inquiétudes

Par Grégoire Normand  |   |  717  mots
Les études annoncent une hausse importante des métiers automatisables. (Crédits : GettyImages)
La place des robots sur le marché du travail pourrait transformer profondément les métiers de demain dans l'industrie. Face à cette mutation, la formation aux outils de demain devient un enjeu central pour les opérateurs et les cadres du secteur industriel.

Sur le front de l'emploi, le déploiement de l'industrie du futur suscite régulièrement de vifs débats. Les travaux récents montrent une hausse importante des métiers automatisables dans les prochaines années ou décennies. Le cabinet Roland Berger estimait dans un rapport que 42% des métiers étaient automatisables d'ici à une vingtaine d'années. Selon une autre étude de l'université d'Oxford, « 47 % des emplois aux États-Unis connaissent un risque accru d'automatisation dans les vingt prochaines années ».

Si les chiffres et les méthodes utilisées dans ces rapports sont loin de faire l'unanimité, beaucoup de spécialistes s'accordent à dire que le contenu des emplois et les compétences requises sont amenés à grandement évoluer.

« Ainsi, si l'automatisation peut avoir un effet négatif à court terme sur l'emploi, les gains en termes de productivité, de compétitivité et de qualité peuvent conduire l'industrie qui a modifié ses procédés de production à capter de nouvelles parts de marché et donc à se développer sur le long terme », souligne l'institut Montaigne dans son récent rapport.

Tout l'enjeu des prochaines années va reposer sur la formation, comme le souligne la chercheuse Anaïs Voy-Gillis :

« Il y a des types d'emploi qui vont être détruits mais il y a de nombreux emplois qui sont en train d'être créés [...] Tout l'enjeu est que le système de formation public et celui à l'intérieur des entreprises avec la formation continue soient capables d'accompagner ces ouvriers dans ces montées en compétence et aussi de former aux métiers de demain. »

Lors d'un événement récent organisé dans les locaux de France Stratégie, le président du conseil de surveillance de PSA, Louis Gallois, a rappelé que « les entreprises françaises ont des difficultés à avoir accès à des compétences ». Actuellement, les tensions de recrutement chez les industriels sont déjà très visibles et pourraient s'amplifier si l'offre de formation ne permettait pas de répondre à tous ces besoins.

Pour David Cousquer, « l'industrie du futur est une industrie où les objectifs de production sont plus petits, plus technologiques, où la part du travail et des salaires est encore plus faible que dans les usines traditionnelles. Les employés doivent être plus qualifiés. »

Être formés aux outils de demain

Sur le plan de la formation, les partenaires sociaux ont fait quelques propositions ces derniers mois afin de faire face aux mutations engendrées par les technologies sur l'organisation et les formes de travail. D'ailleurs, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, avait souligné que « le cœur de l'industrie du futur, ça ne doit pas être la technologie mais le travail et les compétences ».

La CFDT métallurgie a d'ailleurs fait quelques propositions dans un récent Livre blanc consacré à l'industrie du futur. Le syndicat préconise entre autres de réaliser plusieurs scénarios de changement du travail, en partenariat avec les salariés. À l'Alliance Industrie du futur, les préconisations pour adapter les compétences des salariés se multiplient également. Pour Bruno Grandjean, président de l'Alliance pour l'industrie du futur « coordonner et développer les formations directement connectées aux besoins des entreprises permettra de faciliter le passage de l'ensemble des industriels français vers l'industrie du futur ».

Les métiers d'encadrement sont également amenés à évoluer. Dans une étude publiée au mois d'octobre, l'Association pour l'emploi des cadres (APEC) notait que les ressources humaines appelaient à une montée en compétences de leurs salariés dans de nouveaux domaines d'expertise (bâtiment intelligent, cybersécurité industrielle, intelligence artificielle, réalité virtuelle-réalité augmentée, simulation numérique). En effet, le nombre d'offres d'emploi en lien avec ces technologies est en hausse.

Pour faire face à ces transformations, les cadres interrogés par l'organisation soulignent la nécessité d'être formés aux outils de demain lorsqu'ils anticipent une reconfiguration de leurs métiers par le numérique.

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Les robots sauveront-ils l'industrie ? Retrouvez les autres articles de notre Dossier spécial dans La Tribune Hebdo n°268 daté du 9 novembre 2018 :