Bercy muscle sa lutte contre la fraude fiscale

Par AFP et Reuters  |   |  480  mots
La fraude fiscale, difficile à évaluer, prive l'Etat de plusieurs dizaines de milliards de recettes par an. La Cour des comptes a été chargée par Matignon de fournir une estimation de son ampleur d'ici novembre.
Le ministre de l'Action et des comptes publics Gérald Darmanin a lancé officiellement mercredi le service d'enquêtes judiciaires des finances (SEJF), la nouvelle unité de police fiscale de Bercy destinée à renforcer l'efficacité de la lutte contre la fraude fiscale.

Six mois après l'adoption de la loi contre la fraude, Bercy a mis en place officiellement mercredi son Service d'enquêtes judiciaires des finances (SEJF), nouveau corps de contrôleurs chargé de lutter plus efficacement contre la délinquance fiscale. "Le service d'enquêtes judiciaires des finances est composé de 266 enquêteurs habilités, dont 241 officiers de douane judiciaire, et 25 officiers fiscaux judiciaires. Ces agents sont spécialement habilités à exercer des missions de police judiciaire et disposent de toutes les prérogatives mises à leur disposition par le code de procédure pénale" a précisé le ministère dans un communiqué.

Le "bras armé" de Bercy

Créé au sein du ministère de l'Action et des Comptes publics, ce service dit de "police fiscale" pourra être saisi dans le cadre de dossiers nécessitant une expertise fiscale ou financière de pointe, et aux enjeux financiers considérables, selon Bercy. Quelque 25 agents, formés pendant six mois à l'école des douanes de Tourcoing (Nord), ont pour l'instant pris leurs fonctions dans les locaux du SEFJ, à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). Quinze autres les rejoindront dans les prochains mois.

Au total, "ce sont 40 officiers fiscaux judiciaires qui seront cette année à l'oeuvre", a souligné lors d'une conférence de presse Gérald Darmanin, ministre des Comptes publics, disant vouloir faire de ce service le "bras armé" de Bercy dans la lutte contre la fraude. "Il s'agit d'agents des impôts qui, sous l'autorité d'un magistrat, vont pouvoir perquisitionner, géolocaliser, mettre en garde à vue, faire des auditions, mettre sous écoute, saisir les avoirs ou les biens qu'ils vont découvrir", a-t-il insisté.

La fraude de moins en moins acceptée

Le SEFJ pourra être saisi notamment par le Parquet national financier (PNF). Il interviendra en complément du Service national de douane judiciaire (SNDJ) ou de la nouvelle sous-direction de la police judiciaire en charge de l'investigation financière, mise en place lundi. Ces outils "manquaient", car "les montages des fraudeurs fiscaux sont de plus en plus complexes", a assuré Gérald Darmanin, en soulignant que "la voiture du fisc ou la voiture des gendarmes" ne va parfois pas "aussi vite que la voiture des voleurs".

"Les officiers fiscaux vont avoir un rôle comptable, évidemment: récupérer l'argent qui manque dans le budget de l'État". Mais au-delà, "ils vont avoir un rôle social", car "la fraude fiscale est quelque chose qui est de moins en moins bien acceptée par nos concitoyens", a ajouté le ministre.

Selon le syndicat Solidaires finances publiques, 80 à 100 milliards d'euros d'impôts échappent chaque année à l'État à cause de ces pratiques frauduleuses. Aucune estimation officielle n'existe cependant pour corroborer cette fourchette, jugée surévaluée par Bercy. La Cour des comptes, missionnée par Matignon pour établir un chiffrage qui fasse consensus, remettra un rapport sur le sujet début novembre.