Bruno Le Maire tire la sonnette d'alarme : « Le plus dur est devant nous » sur le plan économique

Par latribune.fr  |   |  1101  mots
« Nous sommes face à des difficultés économiques considérables. Le plus dur est devant nous », a déclaré Bruno Le Maire ce jeudi 5 mai. (Crédits : SARAH MEYSSONNIER)
Pour le ministre français de l'Économie, la guerre en Ukraine, la flambée des prix des matières premières et l'inflation galopante font que le pays se trouve « face à des difficultés économiques considérables ». Le « plus dur » reste à venir selon lui. Ce qui va dans le sens des prévisions du FMI, qui table sur une croissance du PIB français en 2022 de 2,9%, contre 3,5% estimé en janvier.

Nuages noirs à l'horizon. Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a souligné ce jeudi 5 mai que le pays se trouvait « face à des difficultés économiques considérables », estimant que « le plus dur est devant nous ». Il avance pour cela plusieurs raisons : « Il y a la guerre en Ukraine, la flambée du prix des matières premières, une inflation nouvelle qui est le premier sujet de préoccupation économique », a expliqué le ministre.

La croissance française a stagné au cours du premier trimestre 2022, d'après les chiffres de l'Insee dévoilés la semaine dernière. Le PIB a fait du surplace entre janvier et mars après +0,8% au cours du dernier trimestre 2021 et +3% au troisième trimestre 2021. L'institut de statistiques a révisé fortement ses prévisions trimestrielles par rapport au mois de février (-0,3 point).

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« Le PIB marque le pas au T1 2022 (0,0% en variation trimestrielle). Il porte l'empreinte des 2 chocs exogènes - le Covid avec Omicron en janvier, puis la guerre en Ukraine qui a renforcé l'inflation - qui se sont conjugués pour faire baisser nettement la consommation des ménages », avait réagi le chef du département de la conjoncture à l'Insee Julien Pouget sur Twitter.

L'éclatement de la guerre aux portes de l'Union européenne a considérablement assombri les perspectives économiques. Le Fonds monétaire international (FMI) table désormais sur une croissance du PIB de 2,9% en 2022 contre 3,5% en janvier.

Résultat, la France se trouverait déjà, selon plusieurs économistes, dans un scénario de risque de "stagflation" (forte inflation et croissance atone). À l'inverse, d'autres estiment qu'à ce stade, compte tenu de l'acquis de croissance prévu sur l'année 2022 (2,4% selon l'Insee), cette hypothèse de stagflation n'est pas encore confirmée.

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Une inflation record depuis les années 80

L'indice des prix à la consommation a grimpé de 4,8% en avril, contre 4,5% en mars selon les chiffres toujours provisoires de l'Insee. Et ce, principalement en raison de l'énergie bien que dans une moindre mesure que lors des premiers mois de l'année. « La principale contribution reste de loin celle de l'énergie mais elle diminue un peu. À l'inverse, les contributions de l'alimentation, des produits manufacturés et des services augmentent », complète Julien Pouget.

Alors que l'année 2021 a été marquée principalement par la hausse des prix de l'énergie suite au plongeon spectaculaire de la croissance en 2020, la donne a complètement changé. « Le fait que les taux d'inflation dans les services, dans l'alimentation et dans les produits manufacturés sont tous en hausse, et supérieurs à l'objectif de la BCE, illustre l'élargissement des pressions inflationnistes », explique l'économiste d'ING Charlotte de Montpellier dans une note.

Portée par les frictions entre l'offre et la demande en 2021 dans le contexte de la reprise, l'inflation a continué d'accélérer fortement au cours du premier trimestre dans le contexte de la guerre en Ukraine. L'invasion de la Russie a provoqué un choc très important sur les marchés de l'énergie sur le Vieux continent obligeant les Etats européens à trouver des solutions pour se passer du gaz et du pétrole russe.

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La croissance européenne au ralenti

Ce contexte de croissance molle et de poussée des prix n'est pas propre à la France mais commun à l'ensemble de l'Europe. La forte dépendance de grandes économies à l'énergie russe pèse en effet sur l'activité de tout le continent. Ainsi, comme l'a rappelé Fabio Panetta, membre du directoire de la BCE ce jeudi 5 mai : « La croissance du PIB a ralenti en Espagne (ndlr : au premier trimestre 2022), s'est arrêtée en France et s'est contractée en Italie », tandis qu'en « Allemagne, la dynamique de croissance est basse et s'affaiblit depuis fin février, le moment où tout a basculé ». Les « principales économies souffrent » des répercussions du conflit en Ukraine, résume-t-il.

Et les perspectives d'avenir sont loin d'être réjouissantes. « Le PIB de la zone euro devrait se contracter au deuxième trimestre, car les retombées de la guerre en Ukraine et la flambée des prix de l'énergie pèsent de plus en plus sur les revenus des ménages et la confiance des consommateurs, tout en rendant la vie difficile aux industriels », estimait la semaine dernière Andrew Kenningham, expert de Capital Economics.

Le FMI mise sur une prévision de croissance pour la zone euro à 2,8% en 2022, contre 3,9% attendu jusque-là. La Commission européenne doit annoncer ses propres chiffres le 16 mai.

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ZOOM : BRUNO LE MAIRE NE SE REPRÉSENTERA PAS AUX LÉGISLATIVES

Le ministre de l'Économie a par ailleurs annoncé ce jeudi 5 mai sa décision de ne pas se représenter aux législatives dans la 1re circonscription de l'Eure. « Je ne solliciterai pas de nouveau un mandat de député de l'Eure. J'ai toujours dit que je ne ferais pas plus de trois mandats. Je respecte mes promesses », a déclaré Bruno Le Maire, affirmant néanmoins que « sa vie politique continue ».

« Je reste profondément engagé dans la vie publique et politique française. C'est plus qu'un engagement, c'est ma vocation », a-t-il dit. Il a estimé qu'une circonscription « n'est ni un droit ni une rente: elle impose des devoirs dont celui de laisser sa place à des personnalités nouvelles ou différentes ».

Bruno Le Maire, 53 ans, avait été élu pour la première fois député de la 1ère circonscription de l'Eure en 2007 sous l'étiquette UMP. Réélu en 2012, il avait conservé la circonscription en 2017 sous la bannière LREM.

Quant à son avenir, l'actuel ministre de l'Économie a indiqué qu'il souhaite « être à la place que décidera le président de la République » et « participer au succès de ce quinquennat ». La nomination du nouveau gouvernement n'est pas prévue avant le 13 mai minuit, date de fin du premier quinquennat d'Emmanuel Macron. Le second démarrera le 14 mai. « Le gouvernement Castex ira au bout » de cette date, a confirmé mercredi le porte-parole Gabriel Attal, rapportant les propos du chef de l'État lors du Conseil des ministres.

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(Avec AFP)