Chômage, la malédiction du quinquennat Hollande

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  766  mots
Depuis le début 2016, on compte plus de 100.000 demandeurs d'emploi en moins inscrits en catégorie "A". Mais cette inversion intervient trop tard... On retiendra qu’entre mai 2012 et octobre 2016, ce sont 556.700 demandeurs d'emploi supplémentaires qui sont enregistrés en catégorie "A".
François Hollande avait lié son destin à l'inversion de la courbe du chômage. Or, le chômage baisse depuis le début 2016, après avoir progressé durant quatre ans. Mais cette inversion intervient trop tard et parait donc invisible.

Mais quelle mouche a donc piqué François Hollande, lorsqu'il annonce dès la mi-2012, qu'il ne se représenterait pas pour un second mandat si la courbe du chômage ne s'inversait pas. Et, au nom de la théorie des cycles économiques, il pensait alors que cette fameuse courbe fléchirait dès 2013, grâce au retour de la croissance. Erreur fatal de diagnostic. Du coup, dès 2013, encore plus d'habitude, tous les observateurs scrutent les données mensuelles sur le nombre des demandeurs d'emploi annoncées par Michel Sapin, alors ministre du Travail. Résultat, ce n'est ni le ministre du Travail ni même le Premier ministre qui sont mis en cause à chaque inéluctable hausse mensuelle... mais François Hollande directement. Le président aurait vraiment du s'abstenir.

L'inversion de la courbe du chômage est là....

Le pire c'est que, trois ans plus tard, l'inversion de la courbe du chômage est en train de se réaliser sous nos yeux mais elle est quasi invisible et, surtout, elle arrive bien trop tard. Pour la majorité des Français, le mal est fait, François Hollande n'a pas tenu parole. En fait, comme toujours en la matière, tout dépend de la façon dont on  interprète les statistiques. D'abord, c'est indéniable, entre la fin mai 2012, mois où François Hollande est arrivé à l'Elysée et fin octobre 2016, dernières données connues, il y a eu très exactement, 556.700 demandeurs d'emploi de plus inscrits en catégorie « A » à Pôle emploi, (3.478.800 contre 2.922.100)...Et si l'on intègre les catégories « B et C », alors la progression dépasse le million de demandeurs d'emploi. Elle est où alors l'inversion ?

En fait, on la retrouve sur la tendance observée depuis le début de l'année 2016. Selon les dernières statistiques du ministère du Travail communiquées fin novembre, le nombre de demandeurs d'emploi en catégorie « A » à la fin octobre a diminué de plus 12.000 personnes sur un mois et d'environ 80.000 sur deux mois. Mieux, depuis le 1er janvier 2016, il y a très exactement 106.800 inscrits de moins. Et, à ce stade, sur dix publications mensuelles des statistiques mensuelles sur le chômage depuis le début de l'année, six ont indiqué une décrue. Mais qui le voit, alors que la hausse a été tellement forte sur les quatre premières années du quinquennat ? La baisse est notamment forte chez les jeunes de moins de 25 ans où le nombre d'inscrits en catégorie « A » a diminué de 7.400 en octobre et de plus de 43.000 en un an (-8,2 %), soit la plus forte baisse annuelle observée depuis décembre 2007.

... mais invisible et trop tardive

Le même raisonnement prévaut si l'on se concentre, cette fois, sur l'autre façon de comptabiliser le chômage, celle effectuée par l'Insee selon la définition du Bureau International du travail (BIT), la seule qui permet les comparaisons internationales. Même s'il y a eu un petit soubresaut de 0,1 point au troisième trimestre : sur un an, le taux de chômage est passé de 10,5% à 10% de la population active pour l'ensemble de la France.

Alors, oui, certes tardivement, mais l'inversion de la courbe est là. Sauf que... Comme le souligne l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la définition du chômage au sens du BIT est assez restrictive et ne prend pas en compte de nombreuses personnes : temps partiel subi, chômeurs découragés, etc. Toutes ces personnes forment ce que l'on appelle « le halo du chômage » et le sous-emploi. Or, en tenant compte de toutes ces personnes, le bilan du quinquennat n'est pas très reluisant, constate l'OFCE :

« Au premier trimestre 2016, le halo du chômage, qui concerne les personnes souhaitant travailler mais classées inactives selon l'Insee, comptait 1,45 million de personnes (+14 % par rapport au deuxième trimestre 2012, soit 183 000 personnes supplémentaires) et les situations de « sous-emploi » concernaient 1,67 million de personnes (+3,9 % par rapport au deuxième trimestre 2012, soit +63 000) ».

Aussi, au total, en intégrant le sous-emploi et le halo du chômage, ce sont près de 6 millions de personnes qui se trouvent dans une situation fragile vis-à-vis de l'emploi, soit... 8% de plus que quatre ans auparavant, ce qui correspond à 400.000 personnes supplémentaires...

Le chômage aura été le chemin de croix de François Hollande mais en voulant s'attaquer simultanément au triptyque  « restaurer la compétitivité des entreprises, réduire les déficits, faire baisser le chômage », il était logique que l'un des trois paramètres soit sacrifié...