Déficit public : la France a raté le coche

Par Fabien Piliu  |   |  538  mots
"En l'état, rien ne permet d'anticiper la reconduction d'éléments aussi favorables en 2017 ", prévient la Cour des comptes pour qui " les incertitudes sur la trajectoire budgétaire à court et moyen terme se trouvent "renforcées".
Selon un rapport de la Cour des comptes dévoilé ce mercredi 31 mai, l'Etat n'a pas suffisamment profité d'une série de facteurs exceptionnels pour réduire son déficit public en 2016.

Lors de la campagne, la Cour des comptes ne s'est pas privée de faire la leçon aux présidentiables, remettant en cause leurs propositions en matière de réduction du déficit public. En attendant de commenter l'action du nouveau gouvernement, la Cour a lancé une ultime pique à l'adresse du précédent.

Dans un rapport dévoilé mercredi, la Cour estime que l'Etat n'a pas suffisamment "mis à profit " une série de facteurs exceptionnels, comme la faible charge de la dette, pour réduire son déficit, regrettant une "occasion manquée" en 2016 pour les finances publiques.

"L'exécution du budget 2016 s'est caractérisée par une réduction du déficit faible et peu significative", indique son rapport. "Le contexte propice de la baisse de la charge de la dette et de la forte réduction des prélèvements sur recettes a été insuffisamment mis à profit pour progresser dans le rétablissement des finances de l'Etat ", poursuivent les magistrats financiers, par ailleurs inquiets pour 2017.

En 2016, le déficit de l'Etat s'est élevé à officiellement 69,1 milliards d'euros, soit 3,3 milliards de mieux qu'initialement prévu, et 1,5 milliard d'euros de mieux qu'en 2015.

La prise en compte des retraitements

Mais - il y a souvent un "mais" avec la Cour des comptes - "après retraitement ", c'est-à-dire corrigé des éléments exceptionnels survenus l'an dernier et les années précédentes, ce déficit s'est établi à un niveau supérieur à celui de 2013. Dans ce contexte, la Cour des comptes dénonce des effets d'aubaine et des "accommodements " comptables de la part du gouvernement sortant. Considérée comme une grande victoire par l'ancien gouvernement, la réduction du déficit public doit donc être relativisée.

Dans le détail, les dépenses nettes de l'Etat, inférieures de 1,4 milliard d'euros aux objectifs de la loi de finances initiale, ont ainsi été réduites "à la faveur d'économies de constatation sur la charge de la dette, liées aux faibles taux d'intérêts ", observent les magistrats financiers. Les efforts de l'Etat sont donc peu visibles.

Ces différents facteurs écartés, la progression de la dépense a été "près de deux fois plus rapide que celle affichée" entre 2015 et 2016, indique la Cour qui reproche au gouvernement sortant son manque de résultats en termes d'économies. Ainsi, la dépense a augmenté de 1,8% en 2016 et non pas de 1%, comme annoncé.

Des recettes exceptionnelles en 2016, des incertitudes en 2017

Côté recettes, l'Etat a également bénéficié de facteurs exceptionnels en 2016. La Cour cite notamment la redevance d'usage de 1,3 milliard d'euros pour la bande de fréquences des 700 MHz aux opérateurs de télécommunication, où la baisse imprévue des prélèvements sur recette au profit de l'Union européenne.

Alors que le redressement des finances publiques est l'une des priorités majeures de l'exécutif, la Cour des comptes et s'inquiète de la capacité de la France à tenir cet objectif.

"En l'état, rien ne permet d'anticiper la reconduction d'éléments aussi favorables en 2017", met en garde la Cour, pour qui "les incertitudes sur la trajectoire budgétaire à court et moyen terme se trouvent 'renforcées'".