Faut-il sortir les actions de l'ISF ?

Par Fabien Piliu  |   |  658  mots
"Il faut que l'épargne des Français aille vers l'investissement, au lieu de se diriger vers le livret A ou les assurances-vie", explique Louis Gallois
C'est la proposition choc de Louis Gallois (l'ancien commissaire général à l'investissement) pour relancer l'investissement des entreprises.

L'investissement des entreprises retrouve quelques couleurs. C'est encourageant pour l'avenir. Cette reprise est-elle le signe que les chefs d'entreprises ont retrouvé une certaine confiance ? Où est-il le résultat de la mesure temporaire de suramortissement qui cessera d'exister le 15 avril prochain ? Personne ne le sait encore.

En panne chronique depuis 2009, la formation brute de capital fixe (FBCF) des entreprises aurait progressé de 2% en 2015 selon les estimations formulées par l'Insee. En 2016, la FBCF continuerait à augmenter à un rythme élevé, de 0,9 % au premier trimestre puis de 0,8 % au second. Fin juin, l'acquis de croissance de la FBCF s'élèverait à +2,6 %.

Pour que la reprise de l'investissement soit une tendance lourde

Pour que le redémarrage de l'investissement soit une tendance lourde et pas un simple effet d'aubaine, Louis Gallois, l'ancien commissaire général à l'investissement aujourd'hui à la tête du conseil de surveillance de PSA, a une solution très simple : sortir les actions de l'Impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

"Il faut encourager la prise de risque pour l'épargne des Français. Je fais une proposition : qu'on sorte les actions de l'ISF. Ce geste permettra aux Français d'investir dans les entreprises pour qu'elles puissent grandir et contribuer à stimuler l'économie française. Il y a une telle urgence à relancer l'investissement qu'il faut oser des choses. Il faut que l'épargne des Français aille vers l'investissement, au lieu de se diriger vers le livret A ou les assurances-vie, a-t-il expliqué jeudi sur le plateau de RMC, soulignant que cet argent serait ainsi "bien placé pour le pays".

Ce n'est pas la première fois que Louis Gallois, qui dirige également le centre de réflexion "La fabrique de l'industrie", plaide en faveur d'une relance de l'investissement productif. Dans son " Pacte pour la compétitivité de l'industrie française", commandé par Jean-Marc Ayrault en novembre 2012, Louis Gallois avait expliqué la stagnation de la productivité globale des facteurs entre 2000 et 2012 par l'insuffisance d'investissements de productivité et d'innovation dans le processus de production, estimant que l'équipement numérique des entreprises et la robotisation étaient clairement en retard.

Cherche robots désespérément

Selon ce rapport, qui servit ensuite à l'élaboration du Pacte de compétitivité, 34.500 robots industriels, avec une moyenne d'âge élevée, étaient alors en service en France, contre 62.000 en Italie et 150.000 en Allemagne.

"Pour les mêmes raisons, les entreprises françaises ont perdu du terrain sur les facteurs 'hors prix' - innovation, qualité, service - par rapport aux meilleures industries européennes. L'industrie française ne parvient pas, sauf exception (luxe, aéronautique, nucléaire, pharmacie, certains produits agroalimentaires,...), à monter en gamme ", précisait le rapport.

Le souhait de Louis Gallois pourrait-il être exaucé ? Ou plutôt, un gouvernement socialiste pourrait-il saisir la balle au bond ? Ce serait étonnant. Toutefois, compte tenu des nombreuses priorités auxquelles doit faire face le gouvernement actuel - relancer l'activité, réduire le chômage, équilibrer le comptes publics -, rien n'est impossible. Le gouvernement n'est-il pas en train de préparer les esprits à une diminution des allocations chômage pour éviter "les effets d'aubaine" qu'elles offrent aux demandeurs d'emplois ?

Vider l'ISF

Si cette proposition devait être retenue, ce ne serait pas la première fois que l'ISF est en partie vidé pour financer l'économie réelle. Lancé en 2007 dans le cadre de la loi Travail emploi et pouvoir d'achat (TEPA)  par Nicolas Sarkozy, qui n'a pas réussi à supprimer l'ISF au grand dam d'une partie de son électorat, l'ISF PME permet déjà de déduire le montant de son ISF à hauteur de 50% de son investissement, jusqu'à 45.000 euros en cas d'investissement direct ou via des sociétés de holdings et jusqu'à 18.000 euros en cas de souscriptions de parts de fond d'investissement. Depuis le 1er janvier, il est recentré sur les seules entreprises jeunes et innovantes dont la première vente commerciale remonte à moins de 7 ans et sur celles qui n'ont exercé sur aucun marché.