Finances publiques : l'Etat baisse-t-il la garde ?

Par Fabien Piliu  |   |  765  mots
Bercy estime que les dépenses de l'Eta augmenteront de trois milliards d'euros cette année
Les dépenses de l'Etat augmenteront de 3 milliards d'euros cette année. A un an de la prochaine élection présidentielle, l'exécutif entend profiter de la reprise en cours pour gagner des voix tout en respectant ses engagements en matière de redressement des finances publiques vis à vis de Bruxelles.

Hasard ou coïncidence ? Lors de la dernière année réellement « utile » du quinquennat, le gouvernement devrait relâcher les cordons de sa bourse. Selon Christian Eckert, le secrétaire d'Etat au Budget, les dépenses de l'Etat devraient augmenter de 3 milliards d'euros entre 2015 et 2016.

"Après quatre années d'efforts, la remise en ordre de nos comptes publics a considérablement progressé. En 2017, nous serons donc en situation de financer nos priorités, l'éducation, la sécurité et la justice, l'emploi enfin avec la poursuite du plan emploi annoncé en janvier dernier", a expliqué Christian Eckert, le secrétaire d'Etat au Budget à l'occasion du débat sur le projet de règlement budget 2015, projet adopté lundi en première lecture par les députés. Pour mémoire, la loi de règlement arrête le montant définitif des dépenses et des recettes de l'État pour l'année précédente.

Une cote de popularité très faible

Peut-on en déduire que l'époque de la rigueur budgétaire est révolue ? Ce serait exagéré. Simplement, dans la dernière ligne droite avant l'élection présidentielle, l'exécutif essaie de mettre toutes les chances de son côté pour espérer rester aux commandes après 2017. Cette initiative est assez logique. La cote de popularité de François Hollande est actuellement très faible. Selon les résultats du sondage TNS Sofres pour "Le Figaro Magazine" dévoilés fin juin, celle-ci s'élève à 12%.

Pour regagner des points dans les enquêtes d'opinion, l'exécutif entend profiter des ressources supplémentaires, notamment fiscales, que la petite reprise économique en cours lui offre. Selon l'Insee, le PIB devrait progresser cette année de 1,6% après avoir augmenté de 1,2% en 2015. Au cours du seul premier trimestre, l'activité a augmenté de 0,6%, portée par la consommation des ménages et l'investissement des entreprises.

L'exécutif multiplie les largesses

La tactique de l'exécutif est donc la suivante : dépenser à bon escient pour tenter de redresser la popularité du chef de l'Etat, via des coups de pouce aux instituteurs, aux agriculteurs, aux jeunes, un plan pour l'emploi et la formation, tout en donnant des gages à la Commission européenne de son orthodoxie budgétaire.

En effet, le gouvernement entend respecter ses engagements vis-à-vis de Bruxelles en matière de réduction de déficit public qui devrait s'élever à 3,3% à la fin de cette année et devrait repasser sous les 3% du PIB en 2017 pour atteindre 2,7%. Paris n'a plus vraiment choix. La France a en effet demandé trois reports de ses engagements au cours du quinquennat. En 2012, François Hollande, le chef de l'Etat avait annoncé que cet objectif serait atteint en 2013. A cause d'une " erreur " de diagnostic sur la situation réelle de l'économie française après la crise de 2008-2009, erreur avouée par François Hollande le 31 décembre 2012, la cible a été ratée. Totalement.

En attendant, Bruxelles met la pression. " Une chose est très claire: oui la France doit être, la France sera en dessous de 3% en 2017, c'est une obligation, c'est un engagement ", a déclaré ce mardi Pierre Moscovici, le commissaire européen aux Affaires économiques, ancien ministre de l'Economie et des Finances de 2012 à 2014 qui anticipe cette année un déficit de 3,2% légèrement inférieur à celui estimé par Bercy.

Une chose est certaine, la route menant au redressement des comptes publics est longue. Selon le projet de loi de règlement du budget de l'État 2015, le déficit public s'est élevé à 3,6% du PIB en 2015, soit 0,5 point de moins que ce qui était prévu par la loi de finances. Selon le ministère des Finances, le déficit budgétaire s'est réduit de 15 milliards d'euros par rapport à 2014 et de 3,9 milliards d'euros par rapport à ce qui était prévu, pour atteindre 70,5 milliards d'euros. Il s'était élevé à 4,8% du PIB en 2012 avant de passer à 4% en 2013 et 2014.

Une reprise fragile

Le pari de l'Elysée est-il risqué ? Pour l'instant, la plupart des indicateurs macroéconomiques sont dans le vert. Cette tendance se prolongera-t-elle jusqu'en mai 2017, dates de la prochaine élection présidentielle, alors que l'industrie subit actuellement une baisse d'activité? Par ailleurs, même si tel était le cas, ce pari ne serait pas gagné. Tant que le nombre de demandeurs d'emplois ne baissera pas réellement, la cote de popularité du chef de l'Etat ne devrait pas décoller. En dépit des cadeaux de dernière minute. En dépit d'un redressement des finances publiques.