Formation des chômeurs : vers une contribution de 0,3% sur les entreprises

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  1027  mots
Via un document d'orientation qui a été envoyé aux organisations patronales et syndicales pour qu'elles négocient, le gouvernement veut revoir de fond en comble toute le dispositif de formation professionnelle afin de le simplifier. Par ailleurs, une taxe de 0,3% sur les entreprises va être instituée en 2019 pour financer la formation des demandeurs d'emplois.
Le gouvernement a envoyé aux organisations patronales et syndicales le document d'orientation les appelant à négocier un nouveau système de formation professionnelle. Le mot d'ordre est à la simplification et la transparence, ainsi qu'à la facilité d'accès au compte personnel de formation. Par ailleurs, le gouvernement va instituer une contribution sur les entreprises égale à 0,3% de la masse salariale pour la formation des demandeurs d'emploi..

Se livrer à une véritable « révolution copernicienne » en matière de formation professionnelle, telle est la volonté du gouvernement qui vient d'envoyer aux organisations patronales et syndicales un document d'orientation afin de les inciter à négocier sur ce sujet.... opaque. Avec les réformes de l'apprentissage et de l'assurance chômage, celle de la formation professionnelle fait partie, selon le gouvernement, de « l'acte II » des transformations à apporter au marché du travail pour le rendre plus efficient. L'Acte I ayant été les ordonnances réformant le Code du travail.

Sur la formation professionnelle donc, le gouvernement a choisi l'option de laisser les partenaires sociaux tenter de parvenir à un accord professionnel, sur la base du document d'orientation que le ministère du Travail leur a transmis. Formellement, on saura dans quelques jours si les organisations patronales et syndicales acceptent de relever le défi de la négociation. En vérité, on sait déjà qu'elles accepteront de négocier. Elles devront d'ailleurs aller très vite car le ministère du Travail attend leur copie pour la fin janvier 2018.

Cinq thèmes de négociations

Le document d'orientation très encadrant les incite à négocier sur cinq thèmes : une rénovation du compte personnel de formation (CPF), afin de le rendre plus facile d'accès, une mobilisation sans précédent de l'effort de formation à destination des demandeurs d'emploi, une intensification massive des entreprises dans le développement des compétences des salariés via une simplification du plan de formation, une refondation de la formation en alternance à destination des jeunes, un renforcement de la qualité et de la transparence dans l'offre de la formation.

Un programme très lourd donc. Au gouvernement, on assume, estimant que sur ce sujet, il « faut repartir de zéro et oublier tous les tuyaux existants. Ce qui compte c'est que la formation des salariés et des demandeurs d'emploi soit effective avec les financements qui vont avec ».

Pour autant, le document d'orientation reconnait que les acquis instaurés par la loi du 5 mars 2014 - dernière réforme significative de la formation professionnelle -, parmi lesquels figurent la création du CPF et d'une contribution unique pour les entreprises (le fameux « 1% »), sont « significatifs » mais insuffisants.

Une contribution de 0,3% pour la formation des chômeurs

Mais, surtout, hors négociations, ce qui signifie que ce point est d'ores et déjà acquis et que les partenaires sociaux ne pourront pas revenir dessus, le gouvernement a décidé d'instituer à compter de 2019, pour toutes les entreprises, une contribution qui pourra atteindre 0,3% de la masse salariale, soit environ 1,5 milliard d'euros par an, afin d'assurer le financement des demandeurs d'emploi. Étant entendu que cette « contribution a vocation à évoluer en fonction du nombre des demandeurs d'emplois ».

Mais, il ne s'agit pas réellement d'une contribution supplémentaire, elle viendrait se substituer à l'actuelle cotisation de 0,2% attribuée au Fonds pour la sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) qui sert déjà à co-financer la formation des chômeurs et qui « rapporte » environ 800 millions d'euros. Ce 0,2% FPSPP est l'une des composantes du fameux « 1% formation », les autres étant le 0,2% affecté au CPE, un autre 0,2% destiné au financement du congé individuel de formation (CIF). Reste 0,4% affecté au plan de formation et aux contrats de professionnalisation. Rappelons que, globalement, les entreprises consacrent 14,3 milliards d'euros à la formation professionnelle, dont 6,9 milliards sont collectés par les OPCA.

Le CIF fusionné avec un CPF rénové

Pour le gouvernement, l'actuel « 1% » formation, n'a d'ailleurs pas forcément vocation à être maintenu, il reviendra aux partenaires sociaux d'en décider, ce qui signifie que les composantes de cette actuelle masse sont également appelées à évoluer. D'autant plus que le 0,2% consacré au CIF devrait disparaître, le gouvernement souhaitant que le mécanisme du CIF soit fusionné avec le CPF car ils poursuivent tous les deux le même objectif. Concrètement, le CPF est appelé à devenir « l'unique droit personnel à la main des individus ».

Mais ce CPF doit évoluer. Le ministère du Travail souhaite que, à terme, il permette, sans intermédiaire obligatoire, en quelques « clics » à un particulier de comparer, choisir, et enfin s'inscrire à une action de formation. A cet égard, l'unité de mesure, actuellement exprimée en heures dans le CPF, est jugée « pas satisfaisante » car elle ne reflète pas les tarifs des différentes formations et elle prend mal en compte les nouvelles formes d'actions de formation « relativisant les notions de présence sur un lieu en un temps donné ». Aussi, il revient aux partenaires sociaux de déterminer une nouvelle unité de mesure, qui serait exprimée, par exemple, soit en euros, soit en points.

Par ailleurs, s'agissant de la formation des salariés, l'un des défis majeur de la compétitivité selon le gouvernement, les entreprises sont invitées à renforcer l'obligation de veiller à la qualification des personnels et doivent simplifier les actions prévues par le plan de formation en développant, par exemple, les formations à distance.

Il est aussi prévu de sauvegarder le principe de la mutualisation du financement de la formation pour les PME.

En outre, sur la formation en alternance, qu'il s'agisse du contrat d'apprentissage ou du contrat de professionnalisation, les organisations patronales et syndicales sont également appelées à bâtir « un système de financement au contrat » (qui existe déjà pour le contrat de professionnalisation) afin de ne pas financer inutilement des CFA avec des places vides.

Améliorer la qualité de la formation

Dernier point, les partenaires sociaux sont invités à accélérer le système de certification professionnelle. Actuellement, il faut environ cinq ans pour qu'une certification soit enregistrée au répertoire national des certifications professionnelles.

Et, bien entendu, il leur faudra franchir une nouvelle étape « de la démarche qualité de la formation ». L'idée est d'instituer une « transparence », chaque formation proposée devant indiquer le taux d'insertion dans l'emploi qu'elle a permis.

La négociation entre partenaires sociaux doit donc être « finalisée fin janvier 2018 », ce qui laisse peu de temps, pour que le gouvernement présente un projet de loi qui réformera également l'apprentissage et l'assurance chômage en avril et qui serait voté pour l'été 2018.