François Hollande et l'encadrement des loyers : une promesse tenue ?

Par Mathias Thépot  |   |  690  mots
L'encadrement des loyers peut potentiellement avoir des effets très favorables sur l'économie française, si l'on part du principe qu'il réduira le coût pour se loger de certains ménages locataires.
[ SÉRIE : Horizon 2017 pour Hollande 6/9 ] Entré en vigueur à Paris le premier août, l'encadrement des loyers pourrait permettre de redonner du pouvoir d'achat à certaines catégories de ménages.

C'était dans l'engagement numéro 22 de François Hollande durant sa campagne : « Dans les zones où les prix sont excessifs, je proposerai d'encadrer par la loi les montants des loyers lors de la première location ou à la relocation. » Plus de trois ans après l'élection du candidat socialiste à la fonction suprême, l'encadrement des loyers est enfin entré en application le 1er août 2015, mais à Paris seulement. Concrètement, la loi Alur promulguée le 24 mars 2014 prévoit qu'à la signature d'un nouveau bail ou lors d'un renouvellement, le loyer d'un logement ne puisse dépasser de 20 % un loyer de référence fixé par arrêté préfectoral, ni lui être inférieur de 30 %.

Pour déterminer le niveau des loyers de référence dans la capitale, les pouvoirs publics se sont appuyés sur les données représentatives produites par l'Observatoire des loyers de l'agglomération parisienne (Olap). Ces loyers de référence correspondent en fait à des loyers médians qui prennent en compte quatre éléments : le type de location (nue ou meublée), le nombre de pièces, l'époque de construction et le secteur géographique. Concernant Paris, l'Olap a divisé la capitale en 80 quartiers et 14 secteurs aux niveaux de loyers homogènes.

S'il est encore trop tôt pour analyser les effets d'une telle mesure, il y a cependant fort à parier - au regard du niveau des différents plafonds disponibles sur le site de la préfecture d'Ile-de-France - qu'elle aura un effet significatif sur les locations de petites surfaces. Ce qui correspondrait du reste à l'objectif du gouvernement de redonner du pouvoir d'achat aux étudiants et aux jeunes actifs fraîchement diplômés.

Champ d'application limité par des incertitudes

Mais pour en être certain, il faudra juger à la lumière des faits, car certaines ambiguïtés introduites dans le dispositif pourraient faire changer la donne. Notamment la possibilité donnée aux propriétaires bailleurs d'appliquer un complément de loyer pour dépasser les plafonds. Celle-ci est très mal définie. La loi prévoit concrètement d'appliquer un complément de loyer aux logements présentant des qualités particulières (de localisation ou de confort) par rapport aux logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique. Mais sans plus de précisions. Ce qui pourrait ouvrir la porte à quelques abus.

Du reste, chaque incertitude donnera des arguments supplémentaires aux professionnels de l'immobilier pour faire limiter le champ d'application de la réforme. Eux qui ont déjà obtenu de restreindre le périmètre de la loi à Paris intramuros dans un premier temps.

Les professionnels du secteur voient dans cette loi une remise en cause des libertés des propriétaires bailleurs. Pour convaincre les dirigeants politiques, ils avancent le risque de réduction de l'offre de location de la part de propriétaires mécontents qui retireraient leurs biens du marché, et ne les entretiendraient plus. Ils définissent ainsi la loi sur l'encadrement des loyers comme un nonsens économique, révélatrice d'une absence de pragmatisme, et anéantissant la confiance sur un marché en crise. Dont acte.

Pourtant, l'encadrement des loyers peut potentiellement avoir des effets très favorables sur l'économie française, si l'on part du principe qu'il réduira le coût pour se loger de certains ménages locataires. Car la forte croissance des prix de l'immobilier a souvent été désignée comme l'une des causes des maux de l'économie française, voire de sa perte de compétitivité. Que ce soit à cause de la pression sur les salaires nominaux qui en découle, de l'éloignement des salariés de leur lieu de travail, ou même de l'impossibilité pour les ménages de dégager des marges de manoeuvre financières pour consommer ou épargner autre chose que de l'immobilier. Autant de leviers qui ne sont pas à négliger en période de crise.

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