"Gilets jaunes" : le gouvernement n'acceptera aucun "blocage" le 17 novembre

Par latribune.fr  |   |  833  mots
(Crédits : BENOIT TESSIER)
A quelques jours de la mobilisation des "gilets jaunes" du 17 novembre, un mouvement spontané qui "tétanise" l'exécutif, la presse estime mardi que "face à cette émotion, la raison est impuissante", compliquant la possibilité de désamorcer la grogne.

Pour Libération le mouvement des "gilets jaunes" est "un mouvement aux coutures opaques" et Laurent Joffrin trouve que "le gouvernement est face à ce mouvement comme une poule qui a trouvé un gilet" et regrette qu'il tienne "un discours rationnel pour répondre à une plainte émotionnelle".

"C'est le plus souvent la garantie du malentendu", prévient-il.

De son côté, Le Figaro voit "l'exécutif 'tétanisé' par la grogne des gilets jaunes" et Vincent Trémolet de Villers estime lui aussi que "face à cette émotion la raison est impuissante."

Toujours dans Le Figaro, Guillaume Tabard insiste sur le fait qu'"aucune argumentation rationnelle ne fait le poids face à une réaction émotionnelle. Quand un responsable politique est rejeté, c'est l'ensemble de ce qui est dit qui est rejeté."

"Un an et demi après la 'disruption' politique Macron, la rue connaît son moment d'ubérisation, ou de macronisation", analyse Cécile Cornudet dans Les Echos. "Le président, qui rêvait d'un monde sans corps intermédiaires, produit malgré lui un mouvement qui lui ressemble", s'amuse-t-elle.

"Le pouvoir n'a ni les capteurs ni les pare-feu habituels. Il sent le danger et navigue dans le noir", ajoute-elle.

Ce qui fait dire au patron de L'Opinion, Nicolas Beytout, que "comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, les gilets jaunes tiennent peut-être en main le quinquennat sans le savoir."

"Le gouvernement récolte ce qu'il a semé"

Pour Daniel Muraz du Courrier picard, "le gouvernement recueille là ce qu'il a semé en méprisant ouvertement les corps intermédiaires", et de souligner que "si une négociation est toujours possible avec des représentants syndicaux, elle est moins gérable face à une masse de gens en colère".

Philippe Reinhard dans L'Eclair des Pyrénées juge que "le gouvernement et le chef de l'Etat ont tout à redouter d'un mouvement qui affecte non seulement les automobilistes, mais aussi les laissés-pour-compte du pouvoir d'achat."

Parmi ceux, nombreux, qui évoquent une éventuelle récupération des partis politiques, Jean-Michel Helvig de La République des Pyrénées affirme que "tous ceux qui voudront d'une manière ou d'une autre exprimer leur ras'l bol fiscal ne sont pas d'extrême droite. Loin de là". Mais il souligne en revanche que "toute l'extrême droite y sera, c'est sûr".

"Le gouvernement agite le bâton du désordre et la carotte des aides fiscales mais le mouvement s'est déjà affranchi des premières revendications sur le carburant ou le pouvoir d'achat", note enfin Maurice Bontinck dans La Charente libre.

Le gouvernement près à en découdre

Les forces de l'ordre interviendront pour lever tout "blocage total" lors la journée de mobilisation des "gilets jaunes" le 17 novembre contre la hausse du prix du carburant, a déclaré mardi le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.

"Je demande qu'il n'y ait aucun blocage total. (...) Partout où il y aura un blocage, et donc un risque pour les interventions de sécurité et aussi la libre-circulation, nous interviendrons", a-t-il affirmé sur BFMTV, jugeant cette mobilisation "irrationnelle" mais "réelle".

"Nous interviendrons d'abord par la discussion et ensuite nous rendrons la libre-circulation", a-t-il détaillé, demandant également aux organisateurs de déclarer leurs manifestations en préfecture.

De nombreux collectifs de citoyens, baptisés "gilets jaunes", ont appelé à une journée de blocage des routes samedi pour protester notamment contre la hausse du prix des carburants, dont l'ampleur reste difficile à mesurer.

"Ce qui est difficile, c'est qu'on n'a pas une organisation syndicale qui a l'habitude de faire une manifestation qui l'organise. Par exemple, une manifestation ça se déclare en préfecture. Là, très peu l'ont déclarée. J'appelle ceux qui nous écoutent à déclarer le lieu de la manifestation", a souligné le ministre.

Aucune manifestation ne sera interdite "si elle ne menace pas l'ordre public et si elle n'entrave pas la libre circulation", a-t-il toutefois assuré. "Il faut trouver ce point d'équilibre", a-t-il ajouté.

"S'ils ne déclarent pas la manifestation, s'ils bloquent un rond-point et qu'il y a un énervement une personne qui s'emballe et qu'il y a un mort, qu'est-ce qui se passe ? On va rejeter la faute sur l'État et ce ne sera pas l'État qui sera en responsabilité. Ce sera la personne qui aura causé l'accident, qui n'aura pas d'assurance parce que l'assurance ne couvrira pas le fait d'avoir bloqué l'entrée d'autoroute ou le périphérique, et on sera dans des situations inextricables", a prévenu Christophe Castaner.

"Je respecte le droit de manifester, j'invite à la déclaration et à une bonne organisation de la manifestation", a-t-il insisté.

Cette mobilisation, qui se veut apolitique, a reçu le soutien de plusieurs partis d'opposition, du Rassemblement national de Marine Le Pen à la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon en passant par Les Républicains de Laurent Wauquiez qui participera lui-même à une manifestation samedi dans son département de Haute-Loire.

(avec l'AFP)-