Hortefeux multiplie les approximations après la victoire de Macron

Par Grégoire Normand  |   |  650  mots
Brice Hortefeux en 2012 lorsqu'il était ministre de l'Intérieur lors d'une réunion organisée par l'UMP.
L'ancien ministre de l'Intérieur est revenu sur la victoire d'Emmanuel Macron en rappelant qu'il devait "faire preuve d'humilité". Brice Hortefeux a indiqué que le président élu avait fait "le plus mauvais premier tour" en termes de résultats, hormis Chirac, et qu'il n'avait jamais vu de "manifestations sociales" au lendemain du scrutin. Or les données du ministère de l'Intérieur montrent que Brice Hortefeux s'arrange avec la réalité des faits.

La fin de la campagne présidentielle n'a pas mis un terme aux approximations et aux arrangements avec l'histoire électorale. Invité de la matinale de France Inter, ce mardi 9 mai, l'ancien ministre de Nicolas Sarkozy et vice-président du conseil régional d'Auvergne-Rhône-Alpes est revenu sur les résultats du second tour à la présidentielle, en multipliant les imprécisions.

Ce qu'il a dit (à partir de 2'00) :

- Emmanuel Macron a fait le plus mauvais premier tour de tous les candidats à l'élection présidentielle, hormis un seul. C'est Chirac.

Selon les résultats définitifs du ministère de l'Intérieur pour le premier tour de la présidentielle, Emmanuel Macron a remporté 24,01% des suffrages ou 8,656 millions de voix. Mais, contrairement à ce qu'affirme l'ancien ministre de l'Intérieur, il n'y a pas que Jacques Chirac en 2002 (19,88% des suffrages exprimés) qui a fait un résultat moins bon qu'Emmanuel Macron.

En 1995, Lionel Jospin, arrivé en tête du premier tour, avait remporté 23,3% des suffrages et 7 millions de voix, soit plus de 1,5 million de voix de moins que le candidat d'En marche!. L'arrivée de Lionel Jospin, en première position du premier tour du scrutin de 1995, s'est passée dans un contexte marqué par la division de la droite française. En effet, le premier ministre sortant Edouard Balladur, sous un gouvernement de cohabitation, avait décidé de se présenter avec le soutien de l'UDF et plusieurs responsables du RPR. De son côté, Jacques Chirac s'était présenté comme le candidat officiel du parti gaulliste en novembre 1994. D'après les résultats du premier tour de l'élection présidentielle de 1995, Jacques Chirac avait remporté 20,8% des suffrages contre 18,58% pour Balladur. Le premier tour a également été marqué par une forte abstention de 21,6%.

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Des manifestations inédites ?

Dans la suite de l'entretien accordé à la radio de service public, Brice Hortefeux est revenu sur des manifestations qui seraient inédites au lendemain d'une élection présidentielle.

- Ce qui est frappant, c'est que pour la première fois à ma connaissance dans l'histoire de la Vème République, une manifestation sociale est organisée le lendemain même du scrutin. Ce qui ne s'est jamais produit.

Les propos de M.Hortefeux sont imprécis. Le député européen LR fait sûrement référence aux milliers de personnes qui ont manifesté entre la place de la République et la place de la Bastille à l'appel de plusieurs syndicats CGT, Sud et l'Unef, réunis dans le collectif Front social et d'associations.

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Par ailleurs, plusieurs échauffourées ont eu lieu dimanche soir dans le quartier de Ménilmontant après l'annonce des résultats. Des affrontements ont lieu entre des manifestants et les forces de l'ordre. Ces dernières ont répliqué par du gaz lacrymogène et des arrestations. Au total 141 personnes ont été interpellées et 9 d'entre elles ont été placées en garde à vue.

Dans son intervention, l'ancien ministre de l'Immigration parle d'une manifestation sociale mais sa déclaration peut laisser penser qu'il n'y a jamais eu de contestation sociale ou de manifestation au lendemain d'une présidentielle. Or, la presse française a largement couvert et documenté les manifestations contre Nicolas Sarkozy au lendemain de sa victoire à l'élection présidentielle de 2007. Le lundi 7 mai, plusieurs milliers de personnes ont défilé à Paris et en régions. Si beaucoup de jeunes, lycéens, étudiants ou autonomes ont exprimé leur colère sans la présence de syndicats ou d'encadrement, des organisations politiques comme la Ligue communiste révolutionnaire ou l'union syndicale Solidaires avaient appelé à manifester en régions. A Tours notamment, 300 personnes s'étaient mobilisées au lendemain de l'élection de l'ancien maire de Neuilly-sur-Seine.