L'Etat doit-il se résoudre à céder ses bijoux de famille ?

Par Fabien Piliu  |   |  577  mots
L'Etat doit mobiliser environ 3 milliards d'euros pour financer la recapitalisation d'EDF.
Pour assurer l'avenir d'EDF et d'Areva, l'exécutif devrait être obligé de céder certaines participations dans ses entreprises cotées.

A l'os. A force de multiplier les annonces, l'Etat a vu ses marges de manœuvre budgétaires se réduire.

Les plus marquantes ? Citons le plan de soutien aux agriculteurs dont le coût s'élève à 825 millions d'euros, une hausse du point d'indice des fonctionnaires en 2016 (2,4 milliards d'euros en année pleine), le prolongement d'un an du dispositif de suramortissement des investissements en entreprises (400 millions  d'euros par an), diverses mesures pour les jeunes (400 à 500 millions d'euros en année pleine), hausse de la prime des instituteurs (265 millions d'euros en année pleine)...

L'exécutif ne compte pas en rester là. François Hollande a également promis une nouvelle baisse d'impôt pour les ménages les plus modestes si la situation budgétaire le permet. Bercy s'y oppose mais que peut le ministère des Finances face à la volonté élyséenne. Une décision sera prise cet été.

Vendre les bijoux de famille

L'Etat ne pouvant puiser dans aucune cagnotte sous la main, il doit donc se résoudre à piocher dans son portefeuille d'actions pour financer les projets d'investissement de ses entreprises du secteur de l'énergie : EDF et Areva.

Précisément, d'ici 2017, l'Agence des participations de l'Etat (APE) doit mobiliser environ 7 milliards d'euros, soit près de 4 milliards d'euros pour financer la recapitalisation d'Areva - un montant qui pourrait varier si un partenaire étranger entre au capital - et 3 milliards d'euros pour l'augmentation de capital d'EDF. Une augmentation de capital nécessaire pour assurer la consolidation des comptes du groupe que la construction de deux réacteurs nucléaires EPR à Hinkley Point en Angleterre - dont le coût s'élève 23,2 milliards d'euros - et les frais de maintenance et de modernisation du parc de centrales nucléaires dans l'Hexagone ont rendu indispensable.

Outre cette facture dans le domaine de l'énergie, le gouvernement doit également trouver une solution pour assurer le financement d'un transfert de la participation de Bpifrance dans Orange, dont la banque publique doit se séparer en raison des contraintes réglementaires. Bpifrance possède 9,6 % d'Orange, actuellement valorisé 3,8 milliards d'euros.

Plusieurs options pour l'Agence des participations de l'Etat

" La situation actuelle est singulière mais pas inédite, et nous sommes là pour y faire face ", a déclaré Martin Vial, le commissaire aux participations de l'Etat. Concrètement, que peut faire l'APE ? Elle peut puiser dans la réserve constituée au fil des années de 2,4 milliards d'euros. C'est la solution la plus simple, mais au regard de son montant élevé, une alternative doit être trouvée. L'APE doit donc se résoudre à céder des actifs. Ce n'est pas si facile. En effet, à cause des fluctuations baissières des marchés, le portefeuille coté de l'Etat a vu sa valorisation chuter de 25 % en un an, passant de 80 à 60 milliards d'euros. Certes, la privatisation des aéroports de Nice et de Lyon a permis à l'APE d'engranger entre 2,5 et 3 milliards d'euros mais le produit de ces cessions n'est pas assez élevé pour permettre de régler les prochaines factures.

Par ailleurs, l'Etat ne peut pas faire ce qu'il veut. En effet, la loi l'empêche de descendre en dessous d'un certain seuil de participation dans le capital des entreprises dont il est actionnaire. Ce seuil s'élève à 70 % chez EDF, à 50 % chez ADP et 33 % chez Engie, par exemple. « A ma connaissance, le gouvernement n'envisage pas de faire évoluer ces seuils législatifs », indique Martin Vial. Ce pourrait être une option.