Les départements minés par le RSA

Par Mathias Thépot  |   |  636  mots
Le département du Nord éprouve notamment de grandes difficultés à compenser la hausse de ses dépenses de RSA.
La crise économique accroît les dépenses sociales, notamment le RSA, pris en charge par les départements. Ce qui érode leurs finances.

Des différents échelons de collectivités locales, les départements sont ceux qui connaissent ces derniers mois les plus grandes difficultés financières. Ils sont en effet en charge du financement des allocations individuelles de solidarité (AIS) qui regroupent le revenu de solidarité active (RSA), la prestation de compensation du handicap (PCH) et l'allocation personnelle d'autonomie (APA).

Avec la crise, les dépenses de RSA sont en forte hausse, comme celles de l'APA avec le vieillissement de la population, alors que les politiques d'accompagnement des personnes handicapées sont aussi régulièrement renforcées. Le coût du seul RSA a même augmenté de 35 % depuis 2008. Or, sur la même période, les concours financiers de l'Etat sont loin d'avoir compensé la hausse des aides sociales, du fait principalement de la réforme de la taxe professionnelle de 2009 et de la baisse de la dotation globale de fonctionnement. Concrètement, l'Etat ne compense plus que 9 milliards d'euros sur les 17 milliards de dépenses sociales des départements, soit un reste à charge d'environ 8 milliards d'euros, autrement dit plus de 10 % du budget des départements.

Aide d'urgence de 200 millions d'euros

En conséquence, en 2016, une quinzaine de départements se sont retrouvés dans l'incapacité de payer le RSA à la caisse des allocations familiales durant les 12 mois de l'année. Ce qui aurait pu causer de sérieux problèmes à l'institution publique. C'est pourquoi l'Etat et les départements se sont entendus sur la mise en place d'une rustine : une aide d'urgence de 200 millions d'euros en direction des 20 collectivités les plus en difficulté. Mais bien évidemment, cela ne résout pas le problème de fond.

Comme le disait en septembre Dominique Bussereau, le président de l'Assemblée des départements de France (ADF) « cette situation n'est pas tenable ». Les départements se retrouvent donc à la croisée des chemins, et sont contraints de faire des choix parfois douloureux. C'est le cas du département du Nord qui fait partie de ceux qui connaissent les plus grandes difficultés. Dans une relative aisance financière jusqu'en 2008, le Nord a en effet subi la crise économique et financière de plein fouet : il compte désormais 115.000 allocataires du RSA pour 2,6 millions d'habitants. Les dépenses liées au RSA y ont augmenté de 250 millions d'euros en 6 ans, soit 60% de ses recettes fiscales directes. Cela fait maintenant deux ans qu'il ne peut, sans aides d'urgence de l'État, régler en temps et en heure les montants du RSA à la CAF.

Cure d'austérité risquée

En attendant une politique nationale plus favorable, le département du Nord doit donc, comme d'autres, s'imposer une cure d'austérité. En général, les collectivités locales agissent en premier lieu sur leurs investissements, un levier simple à utiliser à court terme. Mais une telle politique a des limites. L'austérité a des conséquences désastreuse sur la maintenance du patrimoine et des infrastructures. Ce qui pose de nombreux problèmes sur le long terme.

Désormais, les départements tentent donc de faire des économies, parfois importantes. Or, la principale compétence des départements étant l'action sociale, cela peut se faire vite ressentir sur des publics fragiles. Baisser les aides aux structures sociales sans nuire au service public : voilà une équation éminemment complexe à résoudre. Les concessions à faire sont parfois rudes, mais au regard de la crise financière que subissent les départements, elles semblent inéluctables. Les regards se tournent maintenant vers 2017, une période pleine d'incertitudes : y aura-t-il une nouvelle répartition des compétences en matière d'aides sociales ? Les concours financiers de l'Etat continueront-ils à diminuer ? Les réponses qui seront données après les élections seront assurément déterminantes pour la pérennité financière des départements.