"Monsieur Jadot passe son temps à dire du mal de mon entreprise. Ce que j'observe c'est que ça le fait baisser dans les sondages" (PDG de TotalEnergies)

Par latribune.fr  |   |  908  mots
Patrick Pouyanné (Crédits : DR)
Accusé par le candidat écologiste à la présidentiel de "complicité de crimes de guerre" pour le maintien de ses activités en Russie, TotalEnergies contre-attaque. Le groupe français a engagé une action en diffamation contre Yannick Jadot.

Bataille à couteaux tirés entre Patrick Pouyanné, le PDG de TotalEnergies et Yannick Jadot, le candidat écologiste à la présidentielle. Ce mercredi, le groupe pétrolier a indiqué à l'AFP avoir engagé "sans délai une action en diffamation" à l'encontre de Yannick Jadot, qui a accusé le groupe de "complicité de crimes de guerre" pour le maintien de ses activités en Russie. Des "propos inacceptables", "extrêmement graves et infondés", ajoutant continuer "ses opérations d'achat de gaz en Russie pour le revendre, notamment en Europe pour le bénéfice des consommateurs européens", a indiqué le groupe.

Cette annonce intervient alors que TotalEnergies a annoncé mardi soir sa décision d'arrêter tout achat de pétrole ou produits pétroliers russes "au plus tard à la fin de l'année 2022".

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Interrogé ce mercredi sur RTL sur les accusations régulièrement portées par Yannick Jadot, Patrick Pouyanné s'est dit "en colère". "Quand M. Jadot accuse les 100.000 salariés de Total (de crimes de guerre, NDLR), c'est gravissime, c'est une insulte, (...) c'est pas acceptable", a-t-il réagi.

"Monsieur Jadot passe son temps à dire du mal de mon entreprise. Ce que j'observe c'est que ça le fait baisser dans les sondages; il ferait mieux de s'occuper de sa campagne et d'arrêter de nous insulter", a-t-il ajouté. Yannick Jadot est crédité d'environ 6-7% dans les différents sondages.

Tweet de Yannick Jadot en forme de réponse quelques heures plus tard: "TotalEnergies, soutenu par E. Macron, fait quelques concessions mais maintient l'essentiel de ses activités en Russie, en pleine connaissance des crimes de guerre qu'elles contribuent à financer. Oui c'est être complice ! J'appelle P. Pouyanné, PDG de Total, à débattre avec moi", a réclamé le candidat écologiste.

"Être  « complice de crimes de guerre » c'est fournir une aide directe à un État ou à une organisation criminelle auteurs des crimes", a indiqué le groupe. "Vos propos sont particulièrement graves et infondés contre notre compagnie qui n'opère aucun champ pétrolier ou gazier en Russie".

Le groupe avait indiqué mardi arrêter tout achat de pétrole ou produits pétroliers russes avant fin 2022 devant "l'aggravation du conflit" en Ukraine. Une décision "complémentaire" de l'arrêt décidé précédemment des apports de capitaux à de nouveaux projets en Russie, qui ne signifie toutefois pas que le groupe se retire du pays.

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Impossibilité de remplacer le gaz russe

Ce mercredi matin, Patrick Pouyanné, a par ailleurs rappelé ne pas pouvoir se passer de gaz russe sans lequel une partie de l'économie européenne "s'arrêterait".

"Je sais remplacer ce pétrole et ce diesel" russes mais "le gaz, je ne sais pas le faire. Si je décide d'arrêter d'importer du gaz russe, je ne sais pas le remplacer, je n'en ai pas de disponible. J'ai des contrats de 25 ans et je ne sais pas sortir de ces contrats", a déclaré Patrick Pouyanné.

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Concernant l'annonce de retrait de Russie de certains groupes anglo-saxons, "personne n'est parti, mes concurrents continuent de prendre le gaz russe parce qu'on a des contrats long terme et qu'on ne sait pas les arrêter, sauf si les gouvernements décident de sanctions qui font qu'on peut utiliser la force majeure. Si j'arrête le gaz russe, je paie des milliards immédiatement aux Russes", a affirmé le PDG.

"Sans gaz russe, on arrête une partie de l'économie européenne" et, à ce stade, les gouvernements européens n'ont pas décidé de sanctionner le gaz russe, rappelle-t-il en ajoutant : "Si nous arrêtons le gaz russe, nous savons que l'hiver 2023, nous avons un problème, en janvier 2023 il faudra rationner l'utilisation du gaz, pas pour les particuliers mais sans doute pour les industriels en Europe".

Quant à la question de quitter totalement la Russie, Patrick Pouyané répond : "Je ne vais pas le faire, on a investi dans des usines pour presque 13 milliards de dollars, ce n'est pas un problème d'argent, ces usines vont continuer à tourner que je m'en aille ou non. Me retirer c'est donner ces 13 milliards à des Russes, pour zéro car personne ne peut les acheter. Vous voulez que j'abandonne des actifs en Russie pour enrichir des Russes qu'on a mis sous sanction ?", a-t-il lancé.

"La Russie c'était 5% de notre cashflow, 10% de notre résultat, l'entreprise n'est pas en jeu du tout. Depuis que M. Poutine a décidé d'envahir l'Ukraine, il n'y a pas de futur de croissance en Russie pour TotalEnergies, j'ai mis une croix sur tout le futur qu'on était en train de construire en Russie. Vous croyez que même après la guerre, je ne vais pas garder en tête ce qu'il s'est passé ?" a affirmé Patrick Pouyanné.

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(Avec AFP)