Omicron risque de faire tousser la croissance, la Banque de France abaisse sa prévision pour 2022

Par latribune.fr  |   |  735  mots
(Crédits : Charles Platiau)
L'institution a revu très légèrement à la baisse sa prévision de croissance pour 2022, anticipant désormais une hausse du Produit intérieur brut de 3,6%. Aussi, malgré la bonne reprise en 2021, la Banque s'interroge sur la croissance de long terme que la deuxième économie européenne sera capable d'atteindre. La France doit certes retrouver son niveau de croissance d'avant-crise en 2024, grâce notamment à la consommation des ménages. Mais la croissance sera toutefois insuffisante pour amorcer le lourd désendettement du pays. Et en cas de restrictions supplémentaires dues au Covid, la croissance serait à nouveau revue à la baisse.

La bonne santé de l'économie française en 2021, faisant de l'Hexagone la locomotive européenne de la reprise, risque-t-elle de s'étioler ? D'une croissance radieuse cette année, attendue à +6,75% (contre 6,3% initialement), la cinquième vague de Covid-19 et le variant Omicron pourraient faire hoqueter la croissance en 2022. Selon les prévisions de la Banque de France publiée dimanche, le rebond économique post-pandémie va en effet s'estomper à +3,6%, au lieu des +4,1% qu'elle envisageait auparavant. Elle avait d'ailleurs déjà abaissé sa prévision (à +3,7%).

De fait, l'institution a du revoir légèrement à la baisse son optimiste à court terme avec le variant Omicron qui réimpose des restrictions en Europe. En France, le gouvernement n'a pour l'heure réinstauré que la fermeture des discothèques et certaines activités événementielles, optant pour une politique vaccinale plus dure pour les non-vaccinés, avec un nouveau "pass vaccinal" prévu en 2022.

"Nous prévoyons un léger ralentissement début 2022 lié à la nouvelle vague Covid, mais ensuite la croissance reprendrait", a déclaré aux Echos le gouverneur de la banque centrale, François Villeroy de Galhau.

A l'inverse, la contribution du commerce extérieur, toujours à la traîne dans certains secteurs, "ne se redresserait pas en 2022".

Déjà, pour le troisième trimestre, elle a revu à la baisse sa prévision de croissance en raison de difficultés accrues d'approvisionnement et de recrutement qui pénalisent l'activité des entreprises.

Les stigmates du choc seront effacés mais pas la dette

Pour autant, après un plongeon historique en 2020 d'environ 8%, l'économie française devrait avoir d'ici 2024 effacé les stigmates de la pandémie et retrouvé son rythme de croisière d'avant-crise, selon la Banque de France.

Avec une progression du PIB prévue de 1,4% en 2024, "on rejoint progressivement la tendance de croissance qui était celle d'avant-crise", ce qui n'avait pas été le cas après la crise financière de 2008, a souligné Olivier Garnier, le directeur général.

Ce retour à la trajectoire de croissance d'avant-crise sera porté par une consommation "plus soutenue", les ménages commençant à puiser dans le surplus d'épargne de 170 milliards d'euros engrangé pendant la crise, selon la Banque de France.

Et ce qui n'aura pas été gagné l'an prochain sera rattrapé l'année suivante, anticipe la banque centrale française, puisqu'elle a relevé de 0,3 point, à 2,2%, sa prévision de croissance pour 2023.

Toutefois, ces résultats restent insuffisants pour amorcer le désendettement du pays, prévient M. Garnier: en 2024, le déficit public resterait encore proche de 3,5% du PIB et la dette stable autour de 115% du PIB, malgré l'arrêt des dépenses liées à l'épidémie.

L'emploi au coeur de la reprise

Tirée à la hausse par les prix de l'énergie, l'inflation devrait de son côté atteindre 3,5% à la fin de l'année, pour revenir fin 2022 sous la barre des 2%, puis se stabiliser vers 1,7% en 2023 et 2024, soit des niveaux proches de ceux observés avant la crise financière de 2007-2008.

Du côté du chômage, l'institution table sur un taux de chômage de 7,8% pour cette année, de 7,9% en 2022 et de 7,7% pour 2023 et 2024.

Pour avoir plus de croissance sur le long terme, il faut augmenter "l'offre de travail" et "les compétences disponibles pour les entreprises" qui "devront faire une meilleure place aux seniors", selon M. Villeroy de Galhau, qui appelle aussi à "aller plus loin sur l'apprentissage".

Le soutien de la BCE en question

Alors que la banque centrale américaine a choisi d'accélérer la réduction des aides d'Etat pour ne pas faire dérailler la croissance, son homologue européenne n'en prend pas encore le chemin. La Banque centrale européenne (BCE) maintiendra l'"optionalité" de sa politique monétaire pour se laisser à tout moment des marges de manoeuvre, a aussi déclaré François Villeroy de Galhau, en qualité de membre du Conseil des gouverneurs de la BCE.

"Le mot le plus employé dans nos discussions a été celui d''optionalité'. C'est la capacité dans cette période d'incertitudes à ajuster notre politique monétaire à tout moment en fonction des données réelles observées", déclare-t-il au journal Les Echos.

Alors que les aides mises en place pour compenser l'activité partielle pendant la pandémie continuent à diminuer, la part des entreprises indiquant des difficultés de recrutement a atteint 53% en novembre, après 50% en août.

(avec agences)