
Les compteurs de la crise passent au vert les uns après les autres. Après l'Insee, la Banque de France a révisé à la hausse ses prévisions de croissance du produit intérieur brut (PIB) pour 2021 à 6,3%, c'est 0,5 point de plus que lors de la précédente estimation. S'agissant de 2022, les économistes de la banque centrale ont en revanche révisé à la baisse leurs projections de -0,4 point à 3,7% contre 4,1% auparavant. Dans le prochain projet de loi de finances (PLF 2022) actuellement en préparation, le gouvernement table sur une croissance de 4% l'année prochaine.
Après avoir plongé en 2020 à un creux historique d'environ 8%, l'économie française rebondit fortement. Au-delà de l'effet de base statistique, « l'économie française retrouve plus tôt que prévu son niveau pré-crise. Nous pensons que ce niveau sera atteint à la fin du dernier trimestre 2021 contre le premier trimestre 2022 auparavant » a déclaré l'économiste Olivier Garnier lors d'un point presse ce lundi 13 septembre. A fin décembre, l'activité serait environ à 99,5% de son niveau d'avant-crise. « L'économie tricolore va entrer dans une nouvelle phase de croissance. Elle sera plus dépendante des moteurs structurels »a-t-il ajouté. Il a néanmoins pointé deux sujets de vigilance : les difficultés d'approvisionnement et les tensions sur le recrutement.
La croissance dopée par la demande intérieure, le commerce extérieur toujours en difficulté
En 2021, la croissance est clairement tirée par la demande intérieure. La contribution de la demande domestique à la richesse produite est d'environ 6,5 points. La consommation et l'investissement privés sont les deux principaux moteurs de l'activité cette année. La mise en œuvre des mesures d'urgence depuis le début de la crise sanitaire a permis de limiter les dégâts provoqués par une crise sanitaire majeure. « Les ménages et les entreprises abordent la fin de l'année dans une situation globalement favorable » a indiqué l'économiste.
Du côté des ménages, « le pouvoir d'achat a été préservé par les politiques publiques en dépit de la chute sans précédent du PIB en 2020 » a-t-il précisé. S'agissant des entreprises, les tableaux de la Banque de France ne montrent pas vraiment de signaux d'alerte.
« C'est une surprise. On s'attendait à un mur de la dette des entreprises. En fait, la dette nette des entreprises est revenue à son niveau d'avant-crise. Le taux de marge est même supérieur à celui de 2019. Leur taux d'épargne est à un niveau record depuis les années 90. Les entreprises ne sont pas obligées de s'endetter significativement pour financer leurs investissements dans le contexte des taux bas » a-t-il complété.
En revanche, la contribution du commerce extérieur au produit intérieur brut est toujours négative de -0,3 point. La pandémie a aggravé a situation de l'appareil exportateur tricolore déjà miné par une désindustrialisation accélérée. « Les exportations doivent rester un point d'attention » a relevé Olivier Garnier. A Bercy, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a tiré la sonnette d'alarme sur la situation du déficit commercial français il y a quelques jours lors d 'une réunion avec des journalistes.
Le taux de chômage à 8,1% en 2021 et 8,2% en 2022
Sur le front de l'emploi, la catastrophe tant redoutée n'a pas eu lieu. D'après les modèles de la Banque de France, le taux de chômage au sens du bureau international du Travail (BIT) devrait s'établir à 8,1% en 2021 et 8,2% en 2022. "Il y a une forte révision à la hausse de l'emploi" a indiqué Olivier Garnier. Les conjoncturistes s'attentent à la création de 289.000 emplois en 2021 et 142.000 emplois en 2022 après 269.000 destructions en 2020. La mise en œuvre de l'activité partielle a permis d'éviter une flambée du chômage.
Il reste que les chiffres du taux de chômage demeurent parfois difficiles à interpréter dans le contexte de la crise sanitaire. En effet, cet indicateur qui prend en compte certains critères n'a pas permis de comptabiliser tous les chômeurs. Le nombre de demandeurs d'emploi même s'il est en légère baisse demeure élevé selon les derniers chiffres diffusés par la direction statistique du ministère du Travail et Pôle emploi. En outre, beaucoup de personnes indépendantes qui ont lancé leur activité récemment n'ont pas pu prétendre aux aides mises en œuvre par le gouvernement faute de chiffre d'affaires en 2019 sans compter toutes les personnes qui occupaient un emploi précaire et ont perdu leur travail du jour au lendemain en 2020 sans perspectives claires.
Des tensions sur les recrutements
La reprise économique a entraîné des difficultés sur le marché du travail. Les représentants du patronat ont pointé ces obstacles lors de l'université du Medef à la fin du mois d'août. « Les entreprises ont fait part de ces difficultés dans nos enquêtes. Dans les services, l'intérim est le secteur le plus touché. Le bâtiment est également concerné » a informé Olivier Garnier. "Dans certains secteurs, il y a des problèmes d'adéquation entre l'offre et la demande pour les emplois les plus qualifiés et un manque d'attractivité pour les emplois les moins qualifiés » a précisé l'économiste. Avec le tassement de l'activité à venir, ces difficultés pourraient se résorber en partie. En effet, une fraction de la population active mise en retrait pendant les périodes de confinement ont déjà commencé à revenir sur le marché du travail. En revanche, pour certains secteurs où les métiers sont plus précaires, ces tensions pourraient perdurer si les négociations entre les partenaires sociaux au sujet des salaires restent au point mort.
Une inflation à 1,8% en 2021 et 1,4% en 2022
La forte reprise de l'économie mondiale tirée d'abord par la Chine puis les États-Unis a entraîné des "frictions" entre l'offre et la demande à l'échelle du globe. Le prix des matières premières et du fret maritime ont grimpé en flèche ces derniers mois. Il semble que le pic de la reprise dans les deux puissances mondiales soit déjà passé. En Europe, même si des poussées inflationnistes ont pu avoir lieu, le spectre d'une hausse durable de l'indice des prix à la consommation semble s'éloigner de plus en plus. D'après les projections de la Banque de France, l'inflation devrait atteindre 1,8% en 2021 et 1,4% en 2022, soit un niveau inférieur à l'objectif de la Banque centrale européenne (BCE) situé dorénavant autour de 2%.
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