Pourquoi Emmanuel Macron ne quitte pas le gouvernement

Par Fabien Piliu  |   |  764  mots
Partir, rester ? Emmanuel Macron a fait son choix
Sur le plateau de BFMTV, le ministre de l'Economie a mis fin aux rumeurs qui l'annonçaient partant de Bercy. Une stratégie guidée par le bon sens.

C'est clair et net. Interrogé sur le plateau de BFMTV ce mercredi 20 septembre, Emmanuel Macron a été catégorique. Il ne démissionnera pas du gouvernement de Manuel Valls. Il espère ainsi mettre un terme aux rumeurs qui l'annonçaient démissionnaire de son poste de ministre de l'Economie.

Cette stratégie est frappée au coin du bon sens. Pour de nombreuses raisons. Selon les rumeurs, Emmanuel Macron aurait mis sa démission dans la balance car il n'aurait pas supporté que ce soit la ministre du Travail, Myriam El Khomri, qui porte le prochain projet de loi sur la réforme du droit du travail.

Un choix politique

Ce texte, qui devrait intégrer les dernières grandes réformes du quinquennat de François Hollande, pourrait vraisemblablement absorber le projet sur les nouvelles opportunités économiques (Noé) jusqu'ici porté par Emmanuel Macron. Pourquoi ces deux textes seront-ils fusionnés ? Parce que les réformes ne devraient pas plaire à la gauche du PSl, le gouvernement n'est pas alors certain d'obtenir de la majorité des votes. Déjà, pour faire adopter la loi Macron 1, très critiquée par la majorité et que l'opposition n'a pas voté par simple dogmatisme, l'exécutif a dû se résoudre recourir à l'article 49.3. Comme il ne peut utiliser cette arme qu'une seule fois par session, le gouvernement est donc prêt à fusionner ces deux textes pour éviter de subir un camouflet au Parlement.

En démissionnant pour cette unique raison, Emmanuel Macron aurait pris le risque de brouiller une image jusqu'ici très appréciée des Français. Selon une étude récente, publiée le 15 janvier par l'hebdomadaire Marianne, 19% des Français espèrent que le ministre de l'Économie portera les couleurs de la gauche en 2017. Si 15% des personnes interrogées plébiscitent Manuel Valls, 5% seulement soutiennent François Hollande et Martine Aubry.
Publiée le 17 janvier par Le Parisien, un sondage Odoxa témoigne également de la popularité d'Emmanuel Macron. Avec 53% de réponses favorables, il talonne Alain Juppé en tête des opinions, très loin devant François Hollande (25%) et Nicolas Sarkozy (23%). Autre enseignement de cette enquête, Emmanuel Macron emporterait une victoire très nette face à Marine Le Pen, dans le cas d'un deuxième tour à la présidentielle de 2017. Face à la candidate du FN, il recueillerait près de 65% des voix, contre seulement 54% pour François Hollande.

Le risque de se retrouver isolé

En quittant le gouvernement, Emmanuel Macron aurait bien plus à perdre qu'à gagner. N'étant plus encarté au Parti socialiste depuis bien longtemps, il se trouverait isolé, condamné à jouer les donneurs de leçons à l'image d'un Arnaud Montebourg, son prédécesseur à Bercy, qui, aujourd'hui, ne semble plus intéresser grand monde.
En revanche, en restant au gouvernement, il peut continuer à peaufiner son image de réformateur de l'économie, au grand désespoir de Manuel Valls qui aurait tant voulu jouer ce rôle.

Pôle emploi à la rescousse !

Certes, il devra avaler quelques couleuvres, quelques déceptions, fruits de l'imprévisibilité de la stratégie de François Hollande. Mais s'il veut avoir un avenir en politique, il devra s'en accommoder. Le jeu en vaut la chandelle. L'avenir " économique " d'Emmanuel Macron est déjà assuré depuis son passage à la banque Rothschild. Par ailleurs, une fois retourné à la " vie civile ", après son passage à Bercy, on imagine mal Emmanuel Macron ronger son frein à attendre une proposition de poste de la part de Pôle emploi .

Après avoir quitté son poste de secrétaire adjoint de la présidence de la République en juin 2014, il ne met que quelques semaines à obtenir la promesse d'un poste de professeur temporaire de macroéconomie au sein de la prestigieuse université de Princeton (New Jersey).
Comment peut-imaginer que le CV d'un ancien ministre de l'Economie de la sixième économie mondiale n'intéresse pas le secteur privé ou les grande institutions internationales ? Le parcours post-Bercy de ces prédécesseurs à Bercy illustre cette capacité à rebondir vers les hautes sphères.

Des postes prestigieux à disposition

Arnaud Montebourg est vice-président d'Habitat. Pierre Moscovici est commissaire européen aux Affaires économiques et financières, à la Fiscalité et à l'Union douanière. Quant à Christine Lagarde, elle dirige depuis maintenant cinq ans le Fonds monétaire international.

Dans ce contexte, s'il veut pimenter son quotidien et s'il veut connaître les joies de l'incertitude qu'il semble décrire avec envie lorsqu'il évoque l'entrepreneuriat, Emmanuel Macron a peu de choix possibles. Rester au gouvernement, malgré les difficiles compromis, est la seule option qui vaille.