Pourquoi les 134 tribunaux de commerce font grève à partir de lundi 11 mai

Par Sarah Belhadi  |   |  563  mots
En opposition au projet de loi Macron, la plupart des tribunaux de commerce seront fermés à partir de lundi.
Les juges consulaires s'opposent à une décision de la loi Macron qui souhaite la mise en place de juridictions spécialisées pour les grandes entreprises en difficulté.

La grogne se cristallise chez les juges consulaires opposés à la loi Macron, qui prévoit la spécialisation des tribunaux de commerce. Estimant avoir été "traités avec dédain et arrogance" par Bercy,les 3.100 juges répliquent.

Nice, Angers, Nevers, ou encore Agen. Les portes des 134 tribunaux de commerce resteront closes à partir de ce 11 mai, pour une durée indéterminée. Par conséquent, aucun dossier de conciliation ou de liquidation ne sera abordé, et les audiences des affaires en cours seront renvoyées.

8 tribunaux spécialisés pour la France entière

Avec la création de tribunaux spécialisés, toute l'organisation du traitement des dossiers pourrait être chamboulée. Jusqu'à présent, les affaires étaient prises en charge par le tribunal de commerce le plus proche. Mais si la loi est adoptée, les dossiers seraient  examinés par une des 8 instances spécialisées. Sauf que certaines zones géographiques risquent de se retrouver pénaliser... A l'instar de la Côte d'Azur où des affaires examinées par le tribunal de commerce de Nice se verraient délocalisées ...à Marseille. Patrons et salariés seraient dès lors contraints de faire plus de 400 km aller retour pour les audiences. La Conférence générale des juges consulaires de France souhaite donc que le nombre soit revu à la hausse avec 15 tribunaux contre les 8 prévus par la loi.

Un rôle de prévention mis à mal par la loi Macron

Cette réforme engendre un autre effet pervers. Cet éloignement géographique inquiète les juges craignant que leur mission de prévention et de dépistage des difficultés économiques des entreprises ne puisse plus être assurée. Il sera difficile pour les chefs d'entreprises de faire des centaines de kilomètres pour rencontrer un juge consulaire, comme le note Yves Lelièvre, président de la Confédération générale des juges consulaires de France.

Flou sur la taille des entreprises concernées

Mais ce qui inquiète le plus les juges c'est la taille critique des affaires qui pourront être délocalisées. La loi Macron évoque le seuil de 150 salariés par entreprise, mais ne précise pas le chiffre d'affaires de la société, qui devrait être fixé ultérieurement par décret. Les juges réclament que le seuil des entreprises concernées par la réforme soit ramené à 250 salariés. Ils craignent en effet  que les tribunaux de commerce se voient tout simplement dépouiller de leur activité, et se retrouvent sans dossier à traiter.

 Le Sénat à l'écoute des juges consulaires ?

Mercredi, les Sénateurs ont validé la création de tribunaux de commerce spécialisés en proposant que leurs compétences ne soit automatique uniquement pour les entreprises de 250 salariés. La commission spéciale du Sénat a proposé de créer 15 à 20 tribunaux de commerce spécialisés.

Recul du gouvernement sur l'échevinage

En décembre dernier, une grève de 4 jours avait permis de faire reculer le ministère de l'Economie sur un autre volet controversé, l'échevinage des tribunaux de commerce qui prévoyait de faire siéger des magistrats professionnels aux côtés de juges consulaires, des bénévoles issus du monde de l'entreprise.

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