Retraites : Borne propose « une période de convalescence » pour ne pas humilier les syndicats

Par latribune.fr  |   |  759  mots
« Avant d'aller chercher des alliés pour voter les textes, c'est important que l'on dise où l'on veut aller », ajoute-t-elle. (Crédits : Reuters)
Au lendemain de la onzième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, la Première ministre a appelé à ne « pas brusquer les choses ». Objectif affiché, éviter que les syndicats « sortent humiliés » de cette crise sociale. Pour rappel, le Conseil constitutionnel doit rendre sa décision dans une semaine.

[Article publié le vendredi 07 mars 2023 à 11h30 et mis à jour à 14h12] Elisabeth Borne prend le contre-pied d'Emmanuel Macron. Selon des propos rapportés par le journal Le Monde, la Première ministre a appelé ce vendredi à ne pas « brusquer les choses » et à respecter « une période de convalescence », afin d'éviter que les syndicats « ne sortent humiliés » de cette longue séquence sur la réforme des retraites.

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« Avant d'aller chercher des alliés pour voter les textes, c'est important que l'on dise où l'on veut aller », ajoute-t-elle, toujours selon le quotidien du soir. « Il faut redonner du sens et du souffle à l'action. Je ne suis pas simplement là pour administrer le pays. »

« On échange régulièrement avec le président de la République et je pense que l'on partage la même analyse : il y a besoin d'apaisement dans le pays », a affirmé en fin de matinée la cheffe du gouvernement lors d'un déplacement à Rodez (Aveyron). « On est parfaitement alignés sur ce sujet », a-t-elle encore tenu à désamorcer, en précisant partager « les mêmes objectifs » avec le chef de l'Etat.

« C'est autre chose que de mettre de l'huile sur le feu »

Cette recherche affichée d'apaisement a reçu l'aval de Laurent Berger, patron de la CFDT, qui, interrogé sur BFMTV, a toutefois souligné que les propos d'Elisabeth Borne n'enlevaient rien aux désaccords de fond sur la réforme elle-même.

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Ce ton très conciliant tranche avec les propos tenus par le président Emmanuel Macron mercredi en marge d'un déplacement en Chine. « Les propos de la Première ministre sont plus respectueux que ceux qui nous étaient venus de Chine », a ainsi reconnu Laurent Bercy. « C'est autre chose que de mettre de l'huile sur le feu. »

« On voit qu'il y a des tensions à l'intérieur de l'exécutif », a estimé de son côté Simon Duteil, co-délégué de Solidaires, au micro BFMTV. Elisabeth Borne « parle de convalescence mais nous on est pas malades (...). On a pas besoin de se laisser reposer, on n'est pas de la pâte à crêpes », a-t-il insisté.

Décision du Conseil constitutionnel très attendue

Pour rappel, Emmanuel Macron avait nié « toute crise démocratique en France », réagissant à des propos tenus par Laurent Berger. Le chef de l'Etat avait aussi assuré avoir un mandat clair pour réformer les retraites, et s'est inquiété des « violences » qui émaillent les contestations.

Ces propos d'Elisabeth Borne interviennent au lendemain de la onzième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, et alors qu'Elisabeth Borne a reçu les syndicats mercredi dernier. Un rendez-vous qui s'est soldé par un échec, tant le dialogue semblait rompu des deux côtés. Le Conseil constitutionnel, lui, doit rendre sa décision dans une semaine, vendredi 14 avril.

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Si les syndicats souhaitent le retrait pur et simple de la réforme, la gauche, elle, nourrit l'espoir de voir un référendum organisé sur la question des retraites. « On a un levier qui peut faire trembler le gouvernement et le président de la République », considère un instigateur de la procédure de référendum d'initiative partagée (RIP), le patron des députés communistes André Chassaigne.

La gauche mise sur un référendum

Saisis par les parlementaires de la gauche et du RN, les Sages doivent dans une semaine rendre deux décisions. La première porte sur la conformité à la Constitution du projet de réforme repoussant l'âge de départ à la retraite à 64 ans, et de ses conditions compliquées d'adoption au Parlement. Ils doivent également dire stop ou encore à la poursuite du projet de RIP initié par 252 parlementaires de gauche et des indépendantistes de Liot.

En cas de feu vert à ce dernier, s'engagerait le recueil durant neuf mois des 4,8 millions de soutiens citoyens nécessaires, avant une possible consultation nationale sur un maintien de l'âge de départ à 62 ans. Malgré plusieurs tentatives, aucun RIP n'est allé à son terme, depuis son introduction dans la Constitution en 2008 sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy.

(Avec AFP)