Retraites : le gouvernement précise sa réforme et ne lâche pas l'âge pivot

Par Estelle Peard, Aurélie Carabin, AFP  |   |  706  mots
(Crédits : Reuters)
Confronté à cinq semaines de grève, le gouvernement a dévoilé les projets de loi portant sa réforme des retraites. Ce dernier comporte l'âge pivot tant décrié alors q'une journée de réunions avec syndicats et patronat à Matignon sur le financement du système doit se tenir ce vendredi.

L'exécutif abat ses cartes. Pressé de dévoiler ses cartes pour sortir d'un conflit social interminable, l'exécutif a transmis tard jeudi soir aux partenaires sociaux les deux projets de loi - l'un organique, l'autre ordinaire - qui seront présentés en Conseil des ministres le 24 janvier. Ces textes, adressés jeudi soir aux caisses de Sécurité sociale et dont l'AFP a obtenu copie, gravent dans le marbre de la loi une règle "obligeant" à prévoir l'équilibre financier du futur système "universel" de retraite par points, mais aussi l'"âge d'équilibre" unanimement rejeté par les syndicats, y compris la CFDT et l'Unsa.

Cet âge pivot sera instauré dès 2022, à moins d'une "délibération" différente avant septembre 2021 entre partenaires sociaux siégeant au sein de la future caisse nationale de retraite universelle, qui sera créée le 1er décembre 2020. L'Etat s'engage aussi, comme l'avait promis le gouvernement, à revaloriser les traitements des enseignants et des chercheurs, que la réforme des retraites pourrait pénaliser. Pour tenter de sortir de l'impasse, le Premier ministre Edouard Philippe reçoit à Matignon, depuis 8h30, les organisations syndicales et patronales à tour de rôle afin de discuter de l'équilibre du système.

L'exécutif répond ainsi à l'idée de "conférence de financement" suggérée par la CFDT. Le premier syndicat de France est favorable au principe d'un régime "universel" par points mais braqué sur l'âge pivot que le gouvernement veut fixer en 2027 à 64 ans et assortir d'un bonus-malus, afin d'inciter les Français à travailler plus longtemps.

Age pivot omniprésent

Ce sujet continue de bloquer les négociations entre syndicats réformistes et gouvernement, chacun campant sur ses positions. Or l'âge d'équilibre est mentionné au moins 39 fois dans le projet de loi ordinaire. "Si l'âge pivot reste dans la loi, c'est non, c'est clair", a averti jeudi le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger. "'Je retire la mesure d'âge pivot' doivent être les mots du Premier ministre", a renchéri son homologue de l'Unsa Laurent Escure.

"Le gouvernement continue de penser que l'âge pivot est une mesure juste et efficace", a répondu le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin. Les mesures contenues dans les deux textes de loi ne sont pas de nature à amadouer les syndicats qui exigent le retrait pur et simple de la réforme, CGT et FO en tête. Ils ont rassemblé jeudi 452.000 manifestants dans toute la France, selon le ministère de l'Intérieur, dont 56.000 dans la capitale. Une mobilisation supérieure à celle du 10 décembre, mais en deçà de celles du 17 et surtout du 5 décembre, au premier jour du mouvement, d'après les autorités. Yves Veyrier (FO) a jugé que cette mobilisation était "la démonstration qu'il n'y a pas d'épuisement".

Mais l'intersyndicale a peiné, jeudi soir,  à donner une suite à son mouvement. Après plus de quatre heures de réunion, elle a exprimé le souhait de faire de mardi 14 janvier une "journée de grèves et de convergence interprofessionnelles", et annoncé des initiatives déclinées "sous toutes les formes" mercredi 15 et jeudi 16, en espérant des "manifestations massives" auparavant, samedi 11. Plusieurs professions resteront mobilisées ce vendredi 10 janvier, notamment à travers des blocages annoncés de raffineries et dépôts pétroliers.

Des transports toujours très perturbés

En attendant une éventuelle sortie de crise, la galère continue pour les usagers des transports en commun. Le trafic ferroviaire était encore une fois perturbé vendredi, au 37e jour de la plus longue grève de l'histoire de la SNCF. 60% de TER et 80% de TGV circulaient comme annoncé et en région parisienne un RER A et B sur deux en moyenne étaient sur les rails. Du côté des Transilien, environ trois trains sur cinq étaient en circulation..

A la RATP, le service de métro était encore très perturbé, la plupart des lignes étant ouvertes partiellement ou seulement aux heures de pointe, même si deux d'entre elles (2 et 3) offraient un meilleur service que prévu. Seules les deux lignes automatiques (1 et 14) circulaient normalement, comme depuis le début du mouvement.