Acte 24 des "Gilets jaunes" : la mobilisation marque le pas avant le 1er mai

Par latribune.fr  |   |  1069  mots
Les "gilets jaunes" sont de nouveau mobilisés samedi en France, et notamment à Paris et à Strasbourg, pour protester contre le "bla-bla" présidentiel. (Crédits : CHARLES PLATIAU)
Plusieurs milliers de manifestants, gilets rouges de la CGT, "gilets jaunes" et représentants de partis de gauche mêlés, manifestaient samedi à Paris et à Strasbourg, pour opposer une "riposte générale" au gouvernement et au Medef, ont constaté des journalistes de l'AFP.

[Article publié samedi 27 avril à 15h36, mis à jour à 17h18 puis à 20h20]

Maintenir la pression, 48 heures après les annonces d'Emmanuel Macron en réponse à la crise sociale et quatre jours avant le défilé du 1er mai : les "gilets jaunes" se sont de nouveau mobilisés samedi en France, et notamment à Paris, Bordeaux et Strasbourg, pour protester contre le "bla-bla" présidentiel.

Verdict : la mobilisation a été parmi les plus faibles. Le ministère de l'Intérieur a recensé 23.600 manifestants, contre 27.900 la semaine précédente, soit l'une des plus faibles mobilisations depuis la mi-novembre (la plus faible était le 6 avril avec 22.300 manifestants). Selon le décompte des "gilets jaunes", ils étaient au moins 60.000. Selon la préfecture de police de Paris, 8.920 contrôles préventifs ont été effectués et 11 personnes ont été interpellées dans la capitale. Depuis l'acte 1 de ce mouvement social le 17 novembre, 2.400 "gilets jaunes" et 1.700 membres des forces de l'ordre ont été blessés, selon Beauvau.

Ce nouveau samedi illustrant la persistance d'un mouvement inédit, qui empoisonne l'exécutif depuis plus de cinq mois, a été marqué par quelques tensions à Strasbourg, Lille ou Toulouse.

A Paris, CGT, "Gilets jaunes" et partis de gauche mêlés

A Paris, deux cortèges distincts ont réuni dans le calme 2.600 "gilets jaunes" selon les autorités contre 9.000 la semaine dernière. La préfecture de police de Paris a indiqué avoir procédé à 13.500 contrôles préventifs et à 14 interpellations.

Le carré de tête de la manifestation, à l'initiative de fédérations et unions départementales CGT - mais en l'absence du secrétaire général de la confédération, Philippe Martinez - marchait derrière une banderole proclamant : "Face à une attaque globale, riposte générale".

Mais c'étaient des "gilets jaunes" qui ouvraient la marche, dans un cortège très étiré et avançant au pas de course entre Montparnasse et place d'Italie. Cette action a aussi reçu le soutien du PCF, de personnalités comme la journaliste Aude Lancelin ou la "gilet jaune" Priscillia Ludosky. Des militants NPA étaient notamment présents, tout comme, côté LFI, Jean-Luc Mélenchon et Adrien Quatennens.

Dans le carré de tête, Amar Lagha (CGT-Commerce), l'un des organisateurs interrogé par l'AFP, s'est montré déçu par l'intervention du président de la République jeudi. "Il n'y a rien eu sur le pouvoir d'achat", a-t-il souligné. "Tant mieux pour les retraités, il est revenu sur la bêtise qu'il a faite. Sinon, silence total sur les cadeaux qu'il a faits aux grands groupes. Ce gouvernement n'a rien apporté. Le cap reste le même : la casse sociale".

La sénatrice EELV Esther Benbassa, qui a été de toutes les manifestations des "gilets jaunes", a estimé que "du débat national n'est sortie qu'une souris. C'est bien qu'aujourd'hui nous soyons avec la CGT, parce qu'il faut que le peuple de gauche soit uni. Il y aura aussi le 1er mai pour dire non".

"Une fédération du peuple"

Des gilets CGT d'Aéroports de Paris, de la CGT chômeurs, des services publics territoriaux parsemaient la manifestation. Certains étaient venus de Roubaix, du Tarn-et-Garonne ou des Bouches-du-Rhône, encadrés par un important service d'ordre CGT.

Des "gilets jaunes" étaient également bien visibles au sein du cortège. Brigitte Couderc, secrétaire générale de la CGT-Commerce de la Gironde, estime qu'avec les "gilets jaunes", "on ne peut pas parler d'alliance, mais on parle de plateforme commune de revendications", car "on en a ras-le-bol de la politique économique et sociale du gouvernement".

Patricia, Parisienne de 65 ans, "institutrice à la retraite", "gilet jaune depuis le début" et Insoumise, manifeste avec la CGT ce samedi, car elle est "pour la convergence des luttes". "Je réclame de mes vœux que tous les syndicats, partis, mouvements contestataires soient dans la rue pour une fédération du peuple, pour la justice sociale et fiscale", a-t-elle expliqué à l'AFP.

La manifestation se déroulait dans une ambiance bon enfant, avec des slogans comme "De cette société, on n'en veut pas" ou "Les jeunes dans la galère, les vieux dans la misère". Les clients regardaient passer le cortège installés à la terrasse de la célèbre brasserie La Rotonde, protégée par les CRS.

Cette manifestation fait figure de tour de chauffe, avant la grande manifestation unitaire organisée par la CGT, FO, FSU, Solidaires, l'Unef (étudiants) et l'UNL (lycéens) le 1er mai. Les 5,5 millions de fonctionnaires sont pour leur part appelés à une autre journée d'actions et de grève le 9 mai, contre la réforme de la Fonction publique.

2000 personnes dans les rues à Strasbourg

A un mois des élections européennes, les organisateurs entendent donner un caractère "international" à la journée d'action avec une manifestation à Strasbourg. Ce défilé de 2.000 "gilets jaunes", selon la préfecture, a été marqué par un bref épisode de tension quand le cortège a voulu rejoindre le Parlement européen, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Dans la foule, Pascal Harter, 58 ans, a estimé qu'il n'y avait "rien eu de concret" dans les annonces faites par le président jeudi depuis l'Elysée. "Ca m'a remotivé", a-t-il expliqué à l'AFP. Pour ce pré-retraité, le chef de l'Etat s'en est tenu à du "bla-bla".

Un sentiment largement partagé sur les réseaux sociaux dans les groupes de "gilets jaunes", pour qui les mesures d'Emmanuel Macron - déployer "plus de fonctionnaires sur le terrain", de baisser l'impôt sur le revenu, de supprimer l'ENA ou bien encore de réindexer sur l'inflation les pensions de retraites de moins de 2.000 euros - ne suffisent pas.

A un mois des élections européennes, les organisateurs de l'événement strasbourgeois espèrent donner un caractère "international" à leur lutte. Les manifestants ont entonné une Marseillaise avant le départ du cortège, puis scandé : "On est là, même si Macron le veut pas, on est là". Du haut d'une camionnette, un "street medic" allemand a lancé en allemand : "La France est un exemple pour l'Europe, l'Allemagne doit se réveiller comme la France". "Je suis là parce que Français et Allemands partagent les mêmes problèmes et que je soutiens les Français", a résumé Erwin Bierwald, retraité de 67 ans venu de Fribourg-en-Brisgau (sud-ouest de l'Allemagne).

(Avec AFP)