Tarifs des complémentaires santé : 8 à 12% de hausse, ce n'est « pas tenable » dénonce le ministre de la Santé

Par latribune.fr  |   |  747  mots
Le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, va s'entretenir avec les complémentaires santé dans quelques jours. (Crédits : e Tellec Stephane/ABACA)
Selon Aurélien Rousseau, les mutuelles « ne peuvent pas aujourd'hui faire des patients la variable d'ajustement de leur modèle économique ». De leur côté, les complémentaires santé pointent la hausse des dépenses de santé des Français, mais aussi le transfert que leur impose l'Etat de 500 millions d'euros de dépenses dentaires supplémentaires par an.

Trop c'est trop. Dimanche 3 décembre, le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, a tapé du poing sur la table face à la forte hausse attendue des tarifs des complémentaires santé : de l'ordre de 8 à 12,5% pour l'ensemble du secteur, selon les estimations il y a quelques semaines du spécialiste Addactis. Or, pour le ministre, ce n'est « pas tenable ».

« Je le dis - et je les verrai dans quelques jours - aux mutuelles. Elles ne peuvent pas aujourd'hui faire des patients la variable d'ajustement de leur modèle économique », a-t-il prévenu sur France 3.

Cette augmentation des tarifs répond à la forte hausse des remboursements aux assurés à laquelle sont confrontées les complémentaires santé qui s'étaient ainsi inquiétées en octobre dernier des augmentations de tarifs qu'elles vont devoir annoncer à leurs clients en incriminant des transferts de charge de la Sécurité sociale à leurs dépens. C'est notamment le cas du groupe paritaire AG2R La Mondiale qui augmentera ainsi ses cotisations de « 8 à 9% » en 2024, selon des propos aux Echos de sa direction fin novembre.

Transfert de 500 millions d'euros de dépenses dentaires supplémentaires

Concrètement, les complémentaires voient, d'une part, les dépenses de santé des Français connaître une croissance importante. En octobre dernier, les trois grandes familles du secteur (assureurs, mutuelles et institutions de prévoyance) estimaient que les prestations de santé versées avaient grimpé de plus de 4% au premier semestre. « Et les remboursements vont s'accélérer en 2024 », avaient-elles prévenu. Malakoff Humanis, par exemple, indiquait avoir subi une hausse de 7% de ses remboursements pour l'année 2023, soit un niveau deux à trois fois plus élevé que d'ordinaire.

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D'autre part, l'État vient de transférer aux complémentaires santé 500 millions d'euros de dépenses dentaires supplémentaires par an, en baissant à 60% le remboursement de ces dépenses par l'Assurance maladie, contre 70% auparavant. Une décision qui découle de la réforme du 100% Santé. Elle a ainsi renforcé la part des complémentaires dans la prise en charge des dépenses d'optique, dentaire et audiologie. À charge donc pour les mutuelles, assureurs et institutions de prévoyance de compenser ce déremboursement. Au total, les dépenses des complémentaires santé devraient donc augmenter de 1,5 milliard d'euros en 2024, sur une enveloppe globale d'une trentaine de milliards d'euros.

Une augmentation de 4 à 5% serait plus « logique »

« Il n'y a pas d'argent magique. Si les dépenses de santé augmentent et l'Etat transfère la charge aux complémentaires, les cotisations (de complémentaire santé, ndlr) des Français augmenteront mécaniquement », avait ainsi dénoncé le directeur général d'AG2R La Mondiale, Bruno Angles, en novembre, demandant à l'Etat une plus grande collaboration entre Assurance maladie et complémentaires santé pour parvenir à contenir la progression des dépenses de santé.

« Avec l'inflation, avec une partie des charges qu'on leur a demandé de prendre à charge, une augmentation de 4 à 5% serait logique, 8% ça n'a pas de sens, 10% a fortiori », estime, de son côté, Aurélien Rousseau, plaidant pour que l'adaptation des tarifs ne fasse pas « perdre du pouvoir d'achat ». Quant à d'éventuelles sanctions à l'encontre des mutuelles : « Je ne sais pas, on va d'abord avoir la discussion » avec elles, a-t-il souligné.

Vers une adoption définitive du budget de la sécu

C'est l'ultime étape pour le budget de la sécurité sociale qui devrait être définitivement adopté, ce lundi. Et ce, via le rejet d'une dernière motion de censure à l'Assemblée nationale après que la Première ministre, Elisabeth Borne, a déclenché un énième 49.3 - le vingtième depuis qu'elle dirige le gouvernement - pour faire passer ce texte sans vote, vendredi dernier.

« C'est un budget de 640 milliards d'euros pour notre modèle social, ce sont des moyens en hausse pour notre santé, pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap », a-t-elle justifié dans un discours éclair de moins de deux minutes.

Pour rappel, le déficit de la Sécu, désormais estimé à 8,7 milliards pour 2023, atteindrait 10,5 milliards toutes branches confondues en 2024, selon les dernières estimations du gouvernement, qui conteste toute « austérité ». Les comptes sont notamment plombés par les dépenses de l'assurance maladie. Le gouvernement prévoit de contenir leur hausse à +3,2%, grâce à des mesures d'économies sur les dépenses en médicaments, des laboratoires d'analyse ou encore les arrêts maladie.

(Avec AFP)