Variant Delta : trop lente dans sa vaccination anti-Covid, l'Europe se dirige vers une quatrième vague

Par latribune.fr  |   |  833  mots
Cette nouvelle vague à la rentrée est un scénario qui se dessine selon le Pr Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique. (Crédits : SIPHIWE SIBEKO)
Alors que le variant Delta est en passe de dominer en Europe d'ici août, seul un tiers de la population européenne est entièrement vaccinée, et 30% des Français. C'est trop peu pour échapper à la quatrième vague. Afin d'accélérer le rythme, le gouvernement ne cesse d'inciter les Français à se faire vacciner et envisage de le rendre obligatoire pour les soignants.

Alors que la France vient de franchir le cap de la moitié de la population primo-vaccinée, la menace d'une quatrième vague portée par le variant Delta plane. Le niveau de vaccination sera-t-il encore trop faible à la fin de l'été pour y échapper ?

Cette nouvelle vague à la rentrée est un scénario qui se dessine selon le Pr Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique. "Je crois qu'on aura une quatrième vague mais qu'elle va être beaucoup plus nuancée que les trois premières, car il y a un niveau de vaccination qui n'est pas du tout le même", a-t-il indiqué mercredi sur la radio France Inter. Mais elle sera "beaucoup plus nuancée que les trois" précédentes, grâce aux vaccins. Néanmoins, le professeur qualifie de "faussement rassurants" les récents bons chiffres sur l'incidence du virus, à cause de la présence du variant Delta, extrêmement contagieux.

Et d'ajouter même sur l'efficacité des vaccins : "le fond de ma pensée, c'est qu'il faudra une troisième dose pour stimuler un système immunitaire qui est un peu défaillant quand on a un certain âge, pour les personnes au-dessus de 60 ou 70 ans", a-t-il dit. "Une troisième dose sera probablement envisagée à partir de l'automne", selon lui.

Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a confirmé ce lundi l'hypothèse d'une quatrième vague de la pandémie de Covid-19 dès la fin juillet. C'est "une possibilité" a-t-il estimé, confirmant une mise en garde du ministre de la Santé Olivier Véran, dimanche.

"Il double presque chaque semaine, on est aujourd'hui à plus de 30% des contaminations qui sont liées au variant Delta et on a des exemples autour de nous qui montrent que cette situation peut être les prémices d'un redémarrage de l'épidémie", a expliqué le porte-parole.

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L'UE encore en retard sur la vaccination

Le variant Delta, qui a fait son apparition en Inde en avril, arrive en effet à vitesse grand V en France. Il représentait "20% des nouveaux cas" de Covid-19 en France, selon Olivier Véran le 29 juin, soit le double de la semaine précédente. Toutefois, il progresse "en pourcentage et pas en valeur absolue car le nombre de cas baisse", a précisé le ministre de la Santé. Mais, le variant Delta est "plus contagieux (environ 60% de plus que le variant britannique, Alpha) et il devient progressivement dominant", a rappelé M. Véran. En Europe, le Delta représentera 90% des cas de Covid-19 fin août, selon le Centre européen de prévention et contrôle des maladies.

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Pour le freiner, le gouvernement mise plus que jamais sur la vaccination. Or le vaccin est efficace "quand on a eu deux injections" (pour les vaccins qui nécessitent deux injections) et il ne l'est pas "quand on a eu une seule injection", souligne Jean-François Delfraissy.

Et c'est là où le bât blesse, la France - tout comme l'ensemble de l'Union européenne - accuse un sévère retard sur le nombre de personnes entièrement vaccinées. Au 28 juin, moins de 30% des Français avaient reçu deux doses de vaccins contre près de la moitié des Britanniques et des Américains, selon Our World in Data.

Or, pour un variant ayant une transmissibilité similaire au variant britannique, l'Institut Pasteur estime qu'il faudrait vacciner 90% des adultes dans l'hypothèse où seule cette population est ciblée, pour atteindre l'immunité collective.

Vers une vaccination obligatoire ?

De plus, au-delà du retard, la France voit son rythme de vaccination s'essouffler. Jean Castex a ainsi déploré le 24 juin la baisse du nombre de premières doses de vaccin injectées chaque jour. "Nous vaccinons 200.000 personnes par jour" en primo-injection, "c'est trop peu", avait regretté le Premier ministre à Mont-de-Marsan, en observant que "les prises de rendez-vous" étaient "en décélération".

"Le taux de vaccination monte encore mais pas suffisamment vite", a également souligné M. Véran, confiant dans l'octroi d'ici à quelques jours d'un avis favorable par la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) pour communiquer aux médecins la liste de leurs patients non vaccinés.

Il a aussi évoqué la forte possibilité de rendre obligatoire la vaccination des soignants. Olivier Véran dit avoir écrit aux directeurs d'Ehpad où, selon le ministère, "les professionnels sont 57% à avoir reçu une première dose" et seulement 44% à être protégés complètement.

Sur cette question, le président du Conseil scientifique a également changé d'avis. "J'étais contre l'obligation mais il me semble que maintenant on a atteint le niveau où on va devoir envisager une obligation. A mes yeux, beaucoup se joue dès maintenant", a déclaré l'immunologiste.

(Avec AFP)