Berlin plaide pour un plancher mondial de taxation des compagnies

Par latribune.fr  |   |  640  mots
L'Allemagne et la France veulent que l'Union européenne adopte des règles visant à faire payer aux groupes emblématiques du numérique, parmi lesquels figurent les "Gafa" (Google, Apple, Facebook et Amazon) (Crédits : Fabrizio Bensch)
Le ministre allemand des Finances Olaf Scholz propose d'instaurer un plancher mondial de taxation des compagnies et des mesures plus restrictives pour les transferts de fonds vers les paradis fiscaux.

Le ministre allemand des Finances Olaf Scholz propose d'instaurer un plancher mondial de taxation des compagnies et des mesures plus restrictives pour les transferts de fonds vers les paradis fiscaux, afin d'empêcher les compagnies d'échapper à l'impôt par le biais de ces transferts et d'optimisation fiscale. "Nous avons besoin d'un seuil mondial d'imposition sous lequel aucun Etat ne peut descendre", a estimé Olaf Scholz dans le "Welt am Sonntag", soulignant l'importance de prendre des mesures pour lutter contre l'évasion fiscale. Olaf Scholz explique avoir lancé une initiative pour aider les États à réagir au dumping fiscal d'autres États, en s'appuyant sur les travaux de l'OCDE sur le sujet.

"Nous avons besoin de mécanismes coordonnés qui empêchent un déplacement des revenus dans les paradis fiscaux", a-t-il plaidé, jugeant aussi que l'UE accuse un retard en la matière.

L'Allemagne et la France veulent que l'Union européenne adopte des règles visant à faire payer aux groupes emblématiques du numérique, parmi lesquels figurent les "Gafa" (Google, Apple, Facebook et Amazon), et autres plateformes numériques comme YouTube ou Airbnb, leur juste part d'impôt sur leurs activités réalisées en Europe. Ces entreprises échappent grandement aux fiscs de pays où ils exercent principalement leur activité. La Commission européenne a proposé en mars dernier d'instaurer une taxe de 3% sur le chiffre d'affaires des géants d'internet, en attendant une réforme fiscale en profondeur.

Le numérique "aggrave un problème que nous connaissons bien avec la mondialisation et que nous essayons de contrecarrer : la localisation des bénéfices vers des contrées fiscalement avantageuses", a expliqué le ministre.

L'Europe divisée

Soutenu par la France, le projet est en revanche combattu par d'autres Etats membres, comme l'Irlande, où siègent certains groupes visés, et des pays nordiques, qui redoutent les effets sur les secteurs de l'innovation ainsi que d'éventuelles représailles commerciales américaines. Au total, environ 200 groupes pourraient être concernés par une telle taxation, dont le rendement s'élèverait à près de cinq milliards d'euros à l'échelle européenne.

La proposition d'Olaf Scholz intervient en pleines tensions commerciales internationales avec les États-Unis, alors que Berlin aurait à craindre un retour de bâton américain visant notamment l'automobile allemande en cas d'attaque frontale contre des emblèmes de la Silicon Valley. L'Allemagne a déjà affiché sa réticence face au projet français visant à taxer les GAFA à hauteur de 3% des revenus tirés de certaines activités, en particulier la publicité et la revente de données personnelles.

La France isolée

Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a prévu de se rendre mardi au Parlement Européen, à Strasbourg, pour appeler tous les États européens à s'engager sans délai dans la mise en œuvre d'une taxation des géants du numérique. Berlin et Paris s'étaient engagés en juin à voir aboutir ce projet fin 2018. "Je suis favorable à la proposition qu'a faite le ministre des Finances allemand Olaf Scholz, qui est de dire: il faut qu'il y ait un système mondial qui soit plus harmonieux", a réagi Bruno Le Maire dimanche lors de l'émission "Dimanche en Politique" sur France 3.

"Mais ne rêvons pas, c'est pas demain la veille, donc en attendant, ce que je souhaite, c'est d'ici la fin de cette année (...) décider sur la taxation des géants du numérique, déjà au niveau européen", a-t-il ajouté.

La proposition actuellement en débat, présentée en mars par la Commission européenne, prévoit une taxe sur le chiffre d'affaires des géants du net, le temps qu'une solution soit négociée à l'échelle mondiale au sein de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).