Crise alimentaire : Poutine avait préparé la Russie avant l'invasion de l'Ukraine

Par latribune.fr  |   |  729  mots
Vladimir Poutine (Crédits : SPUTNIK)
Le Kremlin a affirmé que la Russie s'était préparée dès la fin de l'année 2021 à la crise alimentaire qui touche actuellement le monde. Si cette crise ne date pas du déclenchement de la guerre en Ukraine, le conflit l'a exacerbé puisque les exportations russes et ukrainiennes, notamment de céréales, sont interrompues. Une annonce qui intervient alors que la communauté internationale cherche à réduire les impacts de cette crise, qui frappe de plein fouet les pays émergents.

Alors que la Russie démentait il y a quelques mois préparer l'invasion de l'Ukraine, de nouveaux éléments viennent appuyer le contraire. Le conseiller au Kremlin, Maxim Orechkine, a indiqué, selon les agences russes, que le président Vladimir Poutine avait préparé le pays aux conséquences d'une crise alimentaire mondiale dès la fin 2021. Soit plusieurs semaines avant l'offensive contre l'Ukraine lancée le 24 février 2022 et alors que la crainte d'un conflit poussaient déjà les prix alimentaires mondiaux à la hausse.

« Vladimir Vladimirovitch (Poutine) avait compris que ces questions (alimentaires) pouvaient toucher la Russie. Ainsi, on a commencé dès la fin de l'année dernière à préparer activement la Russie à la faim dans le monde », a déclaré Maxim Orechkine lors d'un forum de la jeunesse à Moscou ce jeudi 19 mai.

À l'époque, la Russie était déjà confrontée à une inflation de prix alimentaires et avait introduit des restrictions ou des taxes sur les exportations de céréales, d'huiles et d'engrais. « Ça nous permet d'être sûr de nous » aujourd'hui, d'après Maxim Orechkine.

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La Russie rejette la faute sur les Occidentaux

Selon Moscou, ce n'est en aucun cas l'entrée de son armée en Ukraine qui provoque une crise alimentaire, mais bien les sanctions occidentales décidées en représailles. Pour le conseiller du Kremlin, « la principale cause de la faim dans le monde qui aura lieu cette année, ce sont les mesures économiques irréfléchies des États-Unis, de l'UE », références aux sanctions qui frappent la Russie, minant ses capacités d'exportations.

Les livraisons de blé et autres denrées alimentaires provenant de Russie et d'Ukraine, deux exportateurs majeurs de blé, maïs, colza et huile de tournesol, ont été interrompues depuis le début de la guerre. En conséquence, les prix des denrées alimentaires ainsi que les prix des carburants se sont envolés, en particulier dans les pays émergents.

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Fin avril, le Fonds monétaire international (FMI) a estimé que la guerre en Ukraine assombrissait les perspectives des économies les plus pauvres du Moyen-Orient et alerté sur les « risques de troubles sociaux » en Afrique en raison de la flambée des prix alimentaires.

La progression des prix du blé est « particulièrement préoccupante », selon le FMI, car l'Afrique sub-saharienne importe 85% de sa consommation de cette céréale, avec des montants particulièrement élevés en Tanzanie, en Côte d'Ivoire, au Sénégal, et au Mozambique.

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Libérer les exportations ukrainiennes et russes

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a d'ailleurs déclaré ce mercredi qu'il cherchait à faire revenir sur les marchés mondiaux les productions agricoles russe et ukrainienne pour aider à mettre fin à la crise subie par les pays émergents. « Je suis déterminé à tout considérer pour faciliter le dialogue qui puisse permettre d'atteindre ces objectifs », a-t-il précisé.

« La Russie doit permettre l'exportation sûre et sécurisée des céréales stockées dans les ports ukrainiens », a-t-il exhorté lors d'une réunion ministérielle organisée à New York par les États-Unis. « Des voies de transport alternatives » à la sortie maritime de ces céréales, remplissant notamment des silos à Odessa, « peuvent être explorées - même si nous savons que cela ne suffira pas à résoudre le problème », a-t-il ajouté.

Parallèlement au déblocage des exportations ukrainiennes, le chef de l'ONU plaide pour « un accès sans restriction » de la nourriture et des engrais russes aux marchés mondiaux. Ces engrais n'ont pas été frappés par les sanctions occidentales contre Moscou après l'invasion le 24 février de l'Ukraine, mais la Russie a décidé d'arrêter leur exportation. Leur achat par des pays étrangers peut par ailleurs être bloqué par les mesures prises contre le système financier russe, selon des diplomates.

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