Crise de l'immobilier, chômage record des jeunes : Fitch dégrade la perspective du crédit souverain de la Chine

Par latribune.fr  |   |  948  mots
En 2024, la Chine a annoncé viser une croissance d'environ 5% en, l'un de ses objectifs les plus modestes depuis des décennies. (Crédits : Reuters)
L'agence de notation Fitch a abaissé la perspective du crédit souverain de la Chine à négative, a annoncé l'agence mercredi, citant des risques accrus pour les finances publiques du pays qui souffre, notamment, depuis trois ans d'une grave crise de son secteur immobilier, mais aussi d'un chômage record chez les jeunes. Fitch a néanmoins confirmé la note de crédit à « A+ ».

La Chine paie le prix de ses difficultés économiques. L'agence de notation Fitch a annoncé, ce mercredi, avoir abaissé la perspective du crédit souverain du pays à négative. « La révision des perspectives reflète les risques croissants qui pèsent sur les finances publiques de la Chine alors que le pays est confronté à des perspectives économiques plus incertaines », a ainsi justifié Fitch dans un communiqué de presse.

Le pays a, en effet, annoncé viser une croissance d'environ 5% en 2024, l'un de ses objectifs les plus modestes depuis des décennies. Et il sera sans doute difficile à atteindre. Car l'économie peine à se relancer depuis les années de crise sanitaire. Le pouvoir chinois demeure néanmoins plus optimiste que le FMI dans ses prévisions. Selon le Fonds monétaire international, la croissance de la deuxième économie mondiale devrait n'atteindre que 4,6% cette année.

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« Il est regrettable de voir Fitch abaisser sa perspective sur la note de crédit souveraine de la Chine » a immédiatement réagi le ministère chinois des Finances dans un communiqué ce mercredi estimant que « les résultats montrent que le système d'indicateurs de la méthodologie de notation du crédit souverain de Fitch n'a pas réussi à refléter de manière efficace et proactive les efforts déployés par Pékin pour promouvoir la croissance économique. »

Fitch a néanmoins confirmé la note de crédit de la Chine à « A+ », une décision qui, selon l'agence, reflète « l'économie vaste et diversifiée du pays, ses perspectives de croissance du PIB toujours solides par rapport à ses pairs, son rôle intégral dans le commerce mondial des marchandises, ses finances extérieures robustes et le statut de monnaie de réserve du yuan ».

L'agence a toutefois précisé que « ces points forts sont contrebalancés par un effet de levier élevé à l'échelle de l'économie, des défis budgétaires croissants, un revenu par habitant et des scores de gouvernance inférieurs à ceux des pairs de la catégorie +A+ ».

Le secteur de l'immobilier en crise

La reprise de la croissance tant espérée bute sur un chômage record chez les jeunes, le manque de confiance des ménages qui grippe la consommation, mais surtout, sur la crise de l'immobilier qui frappe le pays depuis 2021. Après deux décennies de croissance fulgurante avec la hausse du niveau de vie de la population, le secteur a longtemps représenté, au sens large, plus du quart du PIB de la Chine.

Mais il a été victime de son emballement. En effet, durant des décennies, les nouveaux logements en Chine étaient payés avant même leur construction par les propriétaires. En parallèle, les groupes finançaient facilement leurs nouveaux chantiers à crédit. Or, le pouvoir a estimé que l'endettement massif du secteur représentait un risque majeur pour l'économie et le système financier de l'Empire du Milieu. Pékin a donc entrepris de durcir à partir de 2020 les conditions d'accès au crédit des promoteurs immobiliers, tarissant les sources de financement de groupes déjà endettés comme Evergrande qui s'est retrouvé en défaut de paiement pour la première fois en 2021. Le géant de l'immobilier, comme d'autres, cherche désormais à restructurer sa dette par tous les moyens. Le promoteur Country Garden est, lui aussi, en sérieuses difficultés. Quant à Vanke, il a annoncé, fin mars, une chute de 46% de son bénéfice net l'an dernier.

Depuis, plusieurs mesures de soutien au secteur ont été annoncées à l'instar, en janvier dernier, de nouveaux prêts destinés à parer aux défaillances d'entreprises. En 2023 déjà, les banques chinoises avaient accordé pour près de 10.000 milliards de yuans (1.290 milliards d'euros) de prêts dans l'immobilier, sans que cela n'ait de réels effets sur la crise.

L'Empire du Milieu doit faire plus pour relancer l'emploi et stabiliser son marché immobilier, ont reconnu plusieurs ministres, le 9 mars dernier. « La pression globale sur l'emploi n'a pas diminué et il reste des contradictions structurelles à résoudre », a ainsi admis Wang Xiaoping, ministre des Ressources humaines et de la Sécurité sociale, lors d'une conférence de presse en marge de la session parlementaire annuelle.

Évoquant les promoteurs immobiliers « gravement insolvables », il a estimé que « ceux qui ont besoin de faire faillite doivent le faire, et ceux qui ont besoin d'être restructurés doivent l'être ».

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Un déficit public qui se creuse

Ces mesures de soutien au secteur immobilier et, de manière générale, tous les dispositifs destinées à porter une économie en convalescence - les finances sont exsangues après trois ans de dépenses faramineuses pour lutter contre le Covid - ne sont pas sans conséquences. Cela a, en effet, creusé le déficit public à 3% du PIB. En 2024, ce ratio devra rester le même, a plaidé le Premier ministre chinois, Li Qiang.

Car, les dépenses publiques vont croître avec un budget fixé à 28.500 milliards de yuans (3.649 milliards d'euros). C'est 1.100 milliards de yuans (141 milliards d'euros) de plus que l'an dernier. La Chine va également émettre pour 1.000 milliards de yuans (128 milliards d'euros) d'obligations d'Etat pour « renforcer (ses) capacités » dans des domaines clés. Parallèlement, 3.900 milliards de yuans (près de 500 milliards d'euros) d'obligations seront émises pour soutenir les collectivités locales. Dans le même temps, la crise de l'immobilier prive le pays d'une importante source de revenus.

(Avec AFP)