Iran : l'Europe prépare sa défense face aux sanctions américaines

Par latribune.fr  |   |  545  mots
Pour Bruno Le Maire, "les Européens n'ont pas à payer de sanctions" à la suite du retrait américain de l'accord sur le nucléaire iranien. (Crédits : Stoyan Nenov)
Bruno Le Maire a plaidé, ce vendredi 11 mai sur Europe 1, pour la mise en place d'une "souveraineté économique européenne" afin de se défendre face aux sanctions que les États-Unis veulent appliquer aux entreprises étrangères travaillant avec l'Iran.

"Qu'est-ce que nous voulons être ? Des vassaux qui obéissent le doigt sur la couture du pantalon à des décisions prises des États-Unis ?". Sur l'antenne d'Europe 1, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire n'a pas caché son agacement à la suite des sanctions extraterritoriales que comptent mettre en place les États-Unis dans le sillage de son retrait de l'accord iranien et qui impacteront certaines entreprises françaises, telles que Renault ou PSA. De concert avec le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, il a estimé qu'il "était temps que l'Europe passe des paroles aux actes en matière de souveraineté économique".

Renforcer le règlement européen de 1996

Mardi 15 mai, Bruno Le Maire devrait recevoir ses homologues britannique et allemand pour apporter une réponse aux décisions américaines. "Trois propositions très concrètes" seraient déjà sur la table des Européens.

La première réponse est le règlement de 1996, "un règlement européen qui permet de condamner les sanctions extraterritoriales." Créée pour contourner l'embargo sur Cuba, cette loi dite "de blocage" permet aux entreprises et tribunaux européens de ne pas se soumettre à des réglementations sur des sanctions prises par des pays tiers et stipule qu'aucun jugement décidé par des tribunaux étrangers sur la base de ces réglementations ne saurait s'appliquer dans l'UE. Elle n'a toutefois jamais eu à être appliquée.

"Nous souhaitons renforcer ce règlement et y inclure les dernières décisions prises par les États-Unis", a souligné Bruno Le Maire.

Un bureau de contrôle des actifs étrangers

"La deuxième piste de travail, c'est celle de l'indépendance financière européenne : comment fait-on pour doter l'Europe d'instruments financiers qui lui permettent d'être indépendante face aux États-Unis?", interroge le ministre.

Enfin, il a aussi évoqué l'existence "d'un bureau de contrôle des actifs étrangers qui permet au ministre des Finances américain de suivre les activités des entreprises étrangères qui ne respecteraient pas les décisions américaines, de les condamner et les poursuivre".

"Pourquoi ne nous doterions-nous pas en Europe du même type de bureau européen capable de regarder les activités des entreprises étrangères et de vérifier qu'elles respectent les décisions européennes ?", a-t-il suggéré.

La France veut des exemptions

Bruno Le Maire a également indiqué avoir appelé mercredi son homologue américain, le secrétaire au Trésor Steve Mnuchin, pour demander "soit des exemptions", soit "des délais d'application plus longs" pour les entreprises françaises présentes en Iran, sans se faire "trop d'illusions sur la réponse américaine".

"Nous avons des entreprises comme Total, Renault et Sanofi qui sont implantées en Iran, et nous voulons défendre nos intérêts économiques", a-t-il déclaré.

Leaders historiques en Iran, les constructeurs automobiles français PSA et Renault figurent, en effet, parmi les entreprises les plus exposées à l'économie iranienne avec les secteurs du pétrole et de l'aéronautique. Pour le cas de Renault, l'Iran est devenu son 8e marché mondial. Le groupe y a vendu 162.079 véhicules en 2017 et vise plus de 250.000 ventes à la fin du plan stratégique "Drive the future", vers 2023.

(Avec AFP et Reuters)