L'Ukraine presse les Occidentaux à lui transférer les 300 milliards d'euros d'actifs russes gelés

Par latribune.fr  |   |  636  mots
Kiev, à la peine sur la ligne de front, s'inquiète de l'effritement de l'assistance militaire et financière occidentale causées par des dissensions internes aux Etats-Unis et dans l'Union européenne. (Crédits : VIACHESLAV RATYNSKYI)
Le Premier ministre ukrainien Denys Chmyhal a pressé lundi les Occidentaux de transférer à Kiev les 300 milliards d'euros d'actifs russes gelés afin d'éviter que des élections dans des pays alliés affectent le soutien accordé à l'Ukraine face à l'invasion russe.

L'Ukraine craint que les élections à venir dans les démocraties occidentales puissent contrarier le soutien financier qui lui est accordé. C'est pourquoi le Premier ministre ukrainien Denys Chmyhal leur demande de transférer les quelque 300 milliards d'euros d'actifs russes gelés.

Kiev, à la peine sur la ligne de front, s'inquiète de l'effritement de l'assistance militaire et financière occidentale causé par des dissensions internes aux Etats-Unis et dans l'Union européenne.

« L'aide de nos partenaires est un outil extrêmement important, mais nous avons besoin de prévisibilité et de stabilité indépendamment du temps, des fluctuations politiques, des cycles électoraux qui auront lieu dans le monde », a déclaré le chef du gouvernement ukrainien lors d'une conférence de presse. « La confiscation des actifs russes devrait devenir une source fiable de soutien pour notre État. »

« Avec ou sans le soutien de nos partenaires, nous ne pouvons pas laisser la Russie gagner » a martelé courant février la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, dans une référence à un possible retour de Donald Trump à la Maison Blanche, susceptible de remettre en question l'engagement américain en Europe.

La confiscation de l'ensemble des biens russes gelés « nous intéresse pour deux raisons : un parce que nous en avons besoin et deux parce que c'est une punition pour l'agresseur russe » qui « doit payer » pour son invasion de l'Ukraine, a aussi souligné Denys Chmyhal.

Saisir les intérêts

Lundi dernier, lors d'une visite à Washington, Spiros Lampridis, l'envoyé spécial de la Grèce pour l'Ukraine, soulignait que l'Europe s'accordait autour d'une approche plus « subtile » consistant à saisir les intérêts tirés des investissements et des actifs russes, qu'ils soient publics ou privés, pour créer un fonds pour l'Ukraine. L'idée, a-t-il expliqué, est de dire aux Russes : « Je ne vais pas vous permettre de faire des bénéfices sur le capital que vous avez accumulé sur mon sol, donc les bénéfices de cela peuvent être confisqués ».

Une telle initiative permettrait de générer entre 50 à 60 milliards d'euros, par rapport aux 500 milliards d'euros (540 milliards de dollars) - ou probablement plus - nécessaires à la reconstruction de l'Ukraine. « C'est une bagatelle, mais c'est au moins un geste pour leur montrer ce qu'ils ont fait », a ajouté le responsable grec. « Vous ne pouvez pas remplacer les vies que vous avez détruites », a-t-il poursuivi en parlant de la Russie, « mais vous pouvez au moins contribuer à reconstruire ce que vous avez détruit ».

Lire aussiL'Allemagne veut saisir plus de 720 millions d'euros d'avoirs russes gelés

Saisir les actifs russe est « totalement illégale »

Fin février, à l'issue d'un sommet virtuel sous présidence italienne, les dirigeants du G7 ont demandé à leurs gouvernements de continuer à travailler « sur toutes les voies possibles par lesquelles les actifs souverains russes pourraient être utilisés pour soutenir l'Ukraine, en conformité avec nos systèmes juridiques respectifs et le droit international ». L'émissaire grec a estimé que l'approche plus « brutale » consistant à saisir les actifs russes était « totalement illégale » au regard du droit international. « Bien sûr, que les Russes réagiront » à la saisie des intérêts, a-t-il encore dit. « Mais même s'ils nous traînent devant les tribunaux internationaux, je pense que nous gagnerons. »

Fin février, Bruno Le Maire, ministre français de l'Economie, lors d'une réunion du G20 à Sao Paulo au Brésil, a aussi averti qu'il n'y a aujourd'hui « pas de base légale pour saisir les avoirs russes » alors que certains responsables, dont le Premier ministre britannique Rishi Sunak et la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen, l'ont proposé ces derniers jours. Pour Bruno Le Maire, « la vraie urgence, c'est qu'aux Etats-Unis on arrive à débloquer ces 60 milliards de dollars ».

(Avec AFP)