La finance est-elle vraiment l'adversaire d'Hillary Clinton ?

Par Jean-Yves Paillé  |   |  544  mots
Hillary Clinton est loin d'être en froid avec Wall Street.
La candidate à l'investiture du Parti démocrate pour l'élection présidentielle américaine de 2016 profite de son début de campagne pour dénoncer à l'envi les dérives de la finance et les inégalités. Mais Hillary Clinton entretient des relations étroites avec les pontes de Wall Street.

"Mon véritable adversaire, c'est la finance", clamait François Hollande en 2012, lors d'un meeting au Bourget. Hillary Clinton, qui espère représenter les démocrates à l'élection présidentielle américaine de 2016, semble avoir choisi le même angle d'attaque pour son début de campagne. Ainsi, celle qui souhaite se transformer en "championne" des classes moyennes, dénonce les inégalités salariales, l'optimisation fiscale, la spéculation et les traders qu'elle juge responsables de la crise de 2008.

Offensive contre les grands patrons dans l'Iowa

Lors de son premier meeting de campagne, dans l'Iowa,  elle s'en est notamment pris aux salaires des grands patrons, ainsi qu' aux avantages fiscaux des gérants de portefeuilles financiers:

"Quelque chose ne tourne pas rond quand les dirigeants de hedge fund payent moins d'impôts que les infirmières ou les routiers que j'ai vus sur la route en venant ici ces deux derniers jours."

Elle s'est en outre indignée qu'un patron puisse gagner 300 fois plus que le salaire moyen des ouvriers et a évoqué le coût des études supérieures avec ses interlocuteurs du jour.

Wall Street ne s'en émeut pas

Du côté des grands pontes de la finance, le message d'Hillary Clinton n'est pas pris au sérieux:

"Quand il faudra gouverner, elle sera pragmatique. Elle comprend que ce n'est pas parce qu'il y a un mouton noir que tout le troupeau est malade", explique à l'AFP un grand banquier sous le couvert de l'anonymat.

Interrogé par le site Politico, un financier important de Wall Street, souhaitant également rester anonyme, a expliqué que les déclarations d'Hillary Clinton étaient seulement "politiques".

Tom Nides, haut responsable de Morgan Stanley et proche d'Hillary Clinton, selon Politico, a renchéri:

"On ne peut pas dire 'Oh mon dieu, elle court vers la gauche !'. Elle est juste fidèle à elle-même. Elle a d'excellentes relations avec les gens. Mais cela ne veut pas toujours dire qu'elle leur donne ce qu'ils veulent."

Proche de responsables de JPMorgan et Morgan Stanley

Hillary Clinton est loin d'être en froid avec Wall Street. La candidate est proche de grands pontes comme Jamie Dimon (patron de JPMorgan Chase) et Greg Fleming (numéro deux de Morgan Stanley et présenté comme le futur grand patron).

Et la finance le lui rend bien. Hillary Clinton a tenu des conférences rémunérées entre 200.000 et 300.000 dollars (276.000 euros) de l'heure lors d'événements organisés par Wall Street. En juillet 2014, elle aurait ainsi engrangé 12 millions de dollars en 16 mois, selon Bloomberg pour des discours et des apparitions. Le 23 octobre dernier, elle gagnait 273.000 dollars lors d'une nouvelle conférence pour la fondation Clinton.

En outre, Goldman Sachs, Bank of America, Morgan Stanley, JPMorgan ont donné plusieurs millions de dollars à cette fondation.

Très soutenue par les banquiers de Wall Street en 2008

Par ailleurs, les banquiers de Wall Street étaient nombreux à soutenir financièrement la démocrate Hillary Clinton en 2008. Lors des primaires démocrates, les salariés du secteur financier, des assurances et de l'immobilier ont donné plus d'argent à Hillary Clinton que ceux d'aucun autre secteur, selon le Center for Responsive Politics. Par comparaison, pour Barack Obama, les avocats et lobbyistes étaient la première catégorie de donateurs.