Le FMI sonne l'alarme sur la soutenabilité de la dette de nombreux pays

Par latribune.fr  |   |  836  mots
« Près de 80 pays vont avoir des élections et l'on sait ce qu'il se passe, la pression qui existe pour dépenser durant les cycles électoraux », a rappelé Kristalina Georgieva. (Crédits : Reuters)
La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva, craint que de nombreux pays voient leur budget déraper en 2024. Elle met en garde sur le risque d'envolée du service de la dette et d'augmentation de l'inflation en cas de hausse des dépenses budgétaires.

Alerte sur le dérapage de la dette. Voilà le principal message de la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) lors dans un entretien accordé à l'AFP dimanche, sur le risque de dérapage budgétaire dans les nombreux pays concernés cette année par des élections, la moitié de la population mondiale étant appelée aux urnes.

« Près de 80 pays vont avoir des élections et l'on sait ce qu'il se passe, la pression qui existe pour dépenser durant les cycles électoraux », a rappelé Kristalina Georgieva, qui a cependant souligné que « les pays ont besoin de reconstituer leurs coussins budgétaires et gérer la dette qui s'est accumulée » pour faire face aux différents chocs depuis la pandémie de Covid-19.

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Le FMI appelle les pays à être prévoyants en 2024

L'économie mondiale s'est montrée plus solide qu'attendu en 2023, a estimé la patronne du Fonds, ce qui a permis aux Etats de faire des économies, mais l'effort doit se poursuivre alors que « l'économie devrait connaître un atterrissage en douceur », après le pic d'inflation observé ces deux dernières années.

« La politique monétaire menée est la bonne, mais le travail n'est pas terminé. Il est donc important de ne pas la relâcher trop vite ni trop tard mais également de ne pas avoir une politique budgétaire » allant dans une direction différente, a averti Kristalina Georgiega.

L'année 2024 doit être « une année où l'on applique les leçons apprises ces dernières années: être toujours prêts pour faire face à l'inattendu. Nous devons être prêts face aux incertitudes qui arriveront », ce qui nécessite de la marge en matière de finances publiques, dont beaucoup d'Etats ne disposent pas après trois années de crises à répétition, a-t-elle insisté.

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Risque de hausse de l'inflation et du service de la dette

Dans ces conditions, le FMI « travaille pour aider les pays à trouver quelles sont les meilleures mesures à conserver, ce qu'ils doivent poursuivre et où concentrer leur politique budgétaire. Car si la politique monétaire reste restrictive, si les dépenses budgétaires augmentent, cela ira à l'encontre de l'objectif de réduire l'inflation », a prévenu Kristalina Georgieva.

Une nécessité également dans la mesure où la dette de l'ensemble des pays a fortement augmenté, créant des difficultés chez les pays les plus vulnérables, mais également dans plusieurs pays émergents, confrontés à des difficultés pour rembourser dans un contexte de hausse des taux.

« On constate que le service de la dette (le coût annuel du remboursement du capital emprunté et des intérêts, NDLR) a augmenté partout, mais reste gérable dans de nombreux pays, beaucoup ont eu la sagesse de modifier la structure de leur dette », a-t-elle détaillé.

Mais « pour certains pays le problème de la dette devient dramatique, soit parce qu'ils deviennent insolvables soit parce qu'ils doivent dépenser une large part de leurs revenus pour le service de la dette », limitant leur capacité à investir et financer les services essentiels.

La dette de la France s'est stabilisée

En France, la situation reste tenable. La dette publique de la France s'est stabilisée à 111,7% du produit intérieur brut (PIB) au troisième trimestre, comme au trimestre précédent, annonce ce vendredi l'Insee. Entre juillet et septembre, cette dernière a ainsi augmenté de 41,3 milliards d'euros pour atteindre 3.088,2 milliards d'euros.

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Dans sa loi de programmation des finances publiques fixant la trajectoire budgétaire de la France jusqu'en 2027, adoptée en septembre au Parlement grâce à l'article 49.3 de la Constitution, le gouvernement prévoit de ramener la dette à 108,1% du PIB à cette échéance et le déficit public à 2,7% du PIB, contre 4,9% prévus cette année. Une trajectoire « peu ambitieuse » et basée sur des hypothèses de croissance « optimistes », avait critiqué le Haut conseil des finances publiques (HCFP) lundi 25 septembre.

Le gouvernement souhaite faire des économies, car l'Etat est confronté à un effet boule de neige sur sa dette qui devrait largement augmenter en valeur l'année prochaine. Bercy compte lever 285 milliards d'euros de dette sur les marchés financiers en 2024. Cela dépasse le précédent record de 270 milliards d'euros en 2023, selon les calculs de l'Agence France Trésor. Jamais la France n'aura autant emprunté que ce qu'elle prévoit de faire l'an prochain pour financer le train de vie de l'Etat. Car, si les besoins de financements de l'Etat seront moins importants en 2024 qu'en 2023, ce dernier va devoir rembourser des échéances plus élevées : 160,2 milliards en 2024 à comparer avec les 149,6 milliards de l'année 2023. Ainsi, la charge budgétaire de la dette devrait augmenter de 52,2 milliards d'euros en 2024 a indiqué l'AFT.

(Avec AFP)