Paradise Papers : cinq chiffres à retenir

Par Jean-Christophe Catalon  |   |  720  mots
A partir de ce lundi et pour le reste de la semaine, les médias collaborant avec le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) vont révéler les conclusions d'une année d'enquête à partir de fuites surnommées les "Paradise Papers".
Moins de deux ans après les "Panama Papers", des journalistes d'investigation du monde entier dévoilent de nouveaux éléments sur les pratiques d'optimisation fiscale menées par des cabinets d'avocats pour le compte de grandes entreprises et de particuliers fortunés.

L'opacité des paradis fiscaux s'effrite encore un peu plus avec les révélations des "Paradise Papers". A partir de ce lundi et pour le reste de la semaine, les médias collaborant avec le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) vont dévoiler les pratiques de cabinets d'avocats qui s'efforcent de contourner les législations nationales pour optimiser les impôts des grandes entreprises et riches particuliers de ce monde.

Moins de deux ans après les "Panama Papers" - révélant les pratiques du cabinet Mossack-Fonseca accusé de servir d'appui à l'évasion fiscal et au blanchiment d'argent - cette nouvelle enquête, d'une ampleur sans précédent, a nécessité un an de travail pour des journalistes du monde entier. La Tribune revient, en cinq chiffres, sur les principaux éléments de cette enquête.

(Un graphique de notre partenaire Statista)

■ 400 journalistes

A l'origine de ce long travail d'investigation, une fuite (leak en anglais) de documents envoyés par une source anonyme à des journalistes du quotidien allemand Süddeutsche Zeitung en 2016.

Ces derniers ont ensuite fait appel à l'ICIJ pour les aider à décortiquer cette masse d'informations reçues. Au total, près de 400 journalistes, issus de 96 médias, répartis dans 67 pays, ont participé à cette enquête.

■ 13,5 millions de documents

S'il y a autant de participants, c'est parce que le volume de données à analyser était conséquent. En tout, plus de 13,5 millions de documents ont été passés au crible.

Dans le détail, la moitié de ces fuites sont des documents internes du cabinet d'avocats Appleby, établi aux Bermudes et présent dans une dizaine de paradis fiscaux, selon Le Monde - qui fait partie, avec Radio France, des médias français ayant participé à l'enquête. L'autre moitié provient des registres de sociétés installées dans des paradis fiscaux très opaques. Enfin, environ 4% sont issus du cabinet Asiaciti Trust, sis à Singapour.

■ 19 paradis fiscaux très opaques

Pour la première fois, les journalistes ont pu accéder aux registres de commerce de 19 paradis fiscaux(*) les plus opaques qui soient, des Bermudes aux îles Caïman en passant par Vanuatu.

Avant les "Paradise Papers", "il était jusqu'alors difficile, voire impossible, de connaître l'identité des directeurs et actionnaires de leurs sociétés", explique Le Monde.

Ce voyage ne fait pas escale uniquement dans des îles paradisiaques. D'autres territoires sont également ciblés, notamment en Europe : de Malte aux Pays-Bas en passant par l'Irlande.

■ 350 milliards d'euros

Ces nouvelles informations permettent d'affiner le montant estimé de l'évasion fiscale. D'après les calculs de l'économiste français Gabriel Zucman, professeur à l'université de Berkley (Californie) et auteur des rares travaux sur les paradis fiscaux, 350 milliards d'euros échappent chaque année aux administrations fiscales. Dans le détail, ces pertes se chiffrent à 120 milliards d'euros pour l'Union européenne et 20 milliards pour la France.

■ 3 chefs d'Etat et de gouvernement concernés

Les premières révélations éclaboussent trois chefs d'Etat et de gouvernement, à savoir la reine d'Angleterre Elisabeth II, et des proches du président américain Donald Trump ainsi que du Premier ministre canadien Justin Trudeau.

Au Royaume-Uni, une dizaine de millions de livres sterling d'avoirs de Sa Majesté ont été placés dans des fonds aux Iles Caïmans et aux Bermudes, selon la BBC et The Guardian.

Au Canada, le milliardaire Stephen Bronfman, à la tête de l'ex-société de vins et spiritueux Seagram, a placé, avec son parrain Leo Kolber, 60 millions de dollars américains (52 millions d'euros) dans une société offshore aux Iles Caïmans, a révélé le Toronto Star. Cet ami de Justin Trudeau est responsable de la collecte de fonds lors de la campagne électorale de 2015 pour le compte du parti libéral canadien.

Enfin, 13 proches de Donald Trump sont cités dans les "Paradise papers". Parmi eux, des membres de l'administration, à savoir le secrétaire du Commerce Wilbur Ross, le secrétaire d'Etat et ancien Pdg d'ExxonMobil Rex Tillerson et le conseiller économique de la Maison Blanche Gary Cohn.

| Pour en savoir plus : "Paradise Papers" : Elisabeth II, Donald Trump et Justin Trudeau concernés

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*Liste des 19 paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago et Vanuatu.