Turquie : malgré la remontée des taux, l’inflation s’emballe à plus de 60% sur un an

Par latribune.fr  |   |  473  mots
Recep Tayyip Erdogan a finalement accepté de laisser la Banque centrale turque remonter ses taux depuis juin. (Crédits : UMIT BEKTAS)
Après être tombés à 38,2% sur un an en juin, les prix à la consommation repartent à la hausse. L'inflation s'établit à 61,5% sur un an, en septembre. Un chiffre en partie attribué au déficit commercial record et au durcissement de la politique monétaire, dont les effets tardent à se manifester.

Les prix à la consommation ne cessent d'augmenter en Turquie, au grand dam de la population. L'inflation a atteint 61,5% sur un an en septembre, et 4,75% sur un mois, selon les données officielles. Une dynamique inquiétante. Et pour cause, il s'agit d'un plus haut depuis décembre 2022. Si l'inflation dans le pays est encore loin de ses plus hauts à 85,5% d'octobre 2022, elle est sérieusement repassée à la hausse, depuis son récent plus bas de 38,2% en juin. En juillet, elle avait grimpé à 47,8%, puis à 58,9% en août.

Lire aussiEn Turquie, la baisse en demi-teinte de l'inflation pourrait être sanctionnée par Fitch

Les chiffres officiels sont contestés par les économistes indépendants du Groupe de recherche sur l'inflation (Enag). Ce dernier évalue la hausse des prix à la consommation à 130,1% en glissement annuel.

Une politique monétaire resserrée

L'inflation turque, qui s'affiche à deux chiffres depuis 2019, s'expliquait jusqu'au printemps dernier par la volonté du chef de l'Etat turc, Recep Tayyip Erdogan, de baisser coûte que coûte les taux d'intérêts de sa banque centrale. Ces derniers sont ainsi passés de 19% en septembre 2021 à 14% en décembre. Restés stables entre janvier et juillet 2022, ils ont, à nouveau, été abaissés tous les mois à partir du mois d'août, portant le principal taux turc à 9% en novembre, contre 10,5% précédemment. Cette politique monétaire a pesé lourdement sur la livre turque. En octobre, elle a chuté de 36,7% sur un an par rapport à l'euro, sachant que la devise avait déjà dévissé de 44% en 2021.

Lire aussiElections en Turquie : les ingrédients d'une crise économique annoncée

Mais depuis le printemps, la banque centrale turque a effectué un virage à 180 degrés, en relevant son principal taux directeur de 8,5% en juin à 30% fin septembre et en promettant même de nouvelles hausses des taux « jusqu'à amélioration significative des perspectives d'inflation ».

Pour autant, des économistes estiment que l'inflation poursuivra sur une trajectoire ascendante jusqu'au second trimestre 2024 au moins.

Baisse des exportations

De fait, le pays accuse de sérieux difficultés économiques pour ralentir la dynamique des prix. Ces derniers sont notamment influencés par l'étranger. La Turquie fait face à une forte inflation importée, car elle souffre d'un déficit commercial record. Ce dernier a atteint 109,5 milliards de dollars en 2022, en raison de la baisse des échanges avec l'Union européenne, son premier partenaire commercial. De fortes importations couplées à une monnaie en berne font mécaniquement augmenter le prix des biens et des services.

Par ailleurs, la Turquie demeure totalement dépendante en matière d'énergie. Le pays souffre donc de la reprise du baril de pétrole Brent. Résultat, l'agence de notation Fitch a abaissé la note de la Turquie en juillet 2022 à B, plaçant son économie dans la catégorie spéculative, l'assortissant d'une nouvelle perspective négative.

(Avec AFP)