Logement : la continuité contre la préférence nationale

Par Mathias Thépot  |   |  980  mots
Le Pen ne veut plus d’étranger dans les nouveaux logements sociaux en France.
En matière de logement, quand Marine Le Pen parle de priorité nationale, Emmanuel Macron prône la continuité avec ce qui a été fait par François Hollande ces derniers mois.

Les points de divergences sont nombreux dans les programmes des deux finalistes de l'élection présidentielle Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Le domaine du logement n'échappe pas à cette règle. Quand le candidat En Marche ! propose une forme de continuité par rapport à la fin du quinquennat Hollande, Marine Le Pen veut, pour sa part, introduire la notion de priorité nationale dans les attributions de logements sociaux. Une vraie rupture avec l'aspect universaliste du modèle social français. Cette priorité de Marine Le Pen est détaillée dans l'engagement 142 de son programme, qui stipule qu'il faudrait « réserver prioritairement aux Français l'attribution du logement social, sans effet rétroactif, et le mobiliser vers les publics qui en ont le plus besoin ».

Métropolisation vs rééquilibrage territorial

Pour le reste, l'autre grande idée qui gouverne la vision de la politique du logement de Marine Le Pen est le « le rééquilibrage territorial », qu'elle oppose au phénomène « rampant » de la « métropolisation » avec lequel le parti d'extrême droite « n'est pas en phase ». C'est pourquoi Le Pen espère « regrouper en un seul ministère l'aménagement du territoire, les transports et le logement » afin de « rééquilibrer la politique de la ville vers les zones désertifiées et rurales ».

A l'inverse, dans la continuité du quinquennat Hollande, Emmanuel Macron mise sur le développement des métropoles avec un choc de l'offre dans les zones les plus tendues que sont notamment l'Île-de-France et la Provence-Alpes-Côte d'Azur, « quitte à ce que l'Etat prenne la main avec des opérations d'intérêt national », a indiqué le candidat En Marche ! durant sa campagne.

Les dispositifs fiscaux prolongés

De même, concernant les dispositifs d'aides fiscales loués pour leur efficacité en cette fin de quinquennat, le clan Macron prône le statu quo. Ainsi, le prêt à taux zéro (PTZ) élargi et le dispositif d'aide fiscale à l'investissement locatif Pinel ne seront pas modifiés sitôt Macron arrivé au pouvoir. De son côté, Marine Le Pen laisse planer le doute sur le dispositif Pinel, mais compte « renforcer les dispositifs de prêts aidés », comme le PTZ, notamment dans la rénovation énergétique, et « améliorer les conditions de rachat par les locataires de leur logement social pour parvenir à 1 % du parc HLM vendu chaque année ».

Autre dispositif phare du quinquennat Hollande, l'encadrement des loyers sera également maintenu par Macron, alors qu'au FN, on reste très évasif sur le prolongement de cette mesure. Pour se justifier sur l'encadrement des loyers, Emmanuel Macron a notamment déclaré à la fondation Abbé Pierre être « pragmatique : il faut le garder et l'évaluer, mais attention aux effets pervers, comme les 13 % d'appartements locatifs retirés du marché, et la baisse des efforts de rénovation des bailleurs ».

Un point de convergence entre les deux candidats est en revanche à noter sur la baisse de la taxe d'habitation. Un « impôt injuste » pour le clan Macron qui souhaite supprimer cette taxe, ce qui coûterait 10 milliards d'euros par an. De son côté Marine Le Pen instaurera, si elle est élue, une « baisse de la taxe d'habitation pour les plus modestes, et le gel de son augmentation », d'un coût, pour l'État, d'1 milliard d'euros par an. En parallèle, pour favoriser les transactions immobilières, Marine Le Pen promet de « réduire les droits de mutation de 10% », alors que Macron souhaite, de son côté, limiter de calcul de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au seul patrimoine immobilier.

Deux plans pour l'accès au logement des jeunes

Concernant l'accès au logement des jeunes, les deux candidats proposent divers dispositifs. Le Pen promet une « Protection-Logement-Jeunes » avec le lancement d'un grand plan de construction de logements étudiants et la revalorisation de 25% des APL pour les jeunes jusqu'à 27 ans, dès la première année du quinquennat (ce qui coûtera 1,2 milliard d'euros par an) tout en supprimant « la prise en compte du patrimoine dans leur calcul ». A l'inverse, Emmanuel Macron estime que les aides au logement ont un effet inflationniste, mais il concède que, tant que la hausse de l'offre de logements pour les jeunes - qu'il propose également - « ne sera pas à la hauteur », il n'entreprendra pas de baisser le pouvoir d'achat des locataires par ce biais.

Reste que la grande nouveauté du programme de Macron est la création du « Bail mobilité professionnel » pour les actifs en situation de précarité (formation, période d'essai, stage). « Il s'agira d'un bail d'une durée de 3 mois à un an, destiné aux actifs en mobilité professionnelle et soumis aux mêmes protections réglementaires que le bail étudiant », indique-t-il dans son programme. Il ajoute que « ce bail sans dépôt de garantie sera déployé dans certaines zones tendues où les logements sont aujourd'hui trop souvent détournés du marché locatif à des fins touristiques. » Une solution de court terme qui pourrait toutefois débloquer certaines situations.

La rénovation énergétique

Enfin, en matière de rénovation énergétique, force est de constater que Macron est un peu plus précis : il vise la rénovation de la moitié des logements qui sont des passoires énergétiques dès 2022. Et, via un fonds public, l'Etat prendra « intégralement en charge les travaux des propriétaires les plus précaires, avec un remboursement au moment de la vente du bien », a déclaré Macron.

Sur ce sujet, le Front national indique dans son programme qu'il fera « de l'isolation de l'habitat une priorité budgétaire du quinquennat parce que l'énergie la moins chère est celle que l'on ne consomme pas. » Les programmes des deux candidats présentent donc quelques similitudes, mais celles-ci n'effacent pas les divergences profondes qui guideront leur politique du logement, s'ils sont élus.