Présidentielle : et si le scrutin était décalé !

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  795  mots
Le Conseil constitutionnel est en droit de reporter le scrutin quand il se passe un événement majeur sept jours avant la date limite pour le dépôt des cinq cents parrainages, soit le 17 mars. Ce pourrait donc être le cas si finalement François Fillon devait renoncer en cas d'éventuelle mise en examen le 15 mars.
Dans l'hypothèse ou François Fillon décidait finalement de renoncer à sa candidature après une éventuelle mise en examen le 15 mars, le Conseil constitutionnel pourrait alors décider d'un report du scrutin présidentiel.

François Fillon ne renonce donc pas, il persiste et signe dans sa candidature à l'élection présidentielle, malgré l'annonce de sa convocation chez les juges d'instruction le 15 mars où il risque, de son propre aveu, d'être mis en examen dans une affaire d'emplois fictifs. Mais le candidat de la droite et du centre nie les faits :  "Je ne reconnais pas les faits, je n'ai pas détourné d'argent public. J'ai confié comme près d'un tiers des parlementaires des travaux à des proches. Ils m'ont effectivement assisté et je le démontrerai". La position de François Fillon a eu pour conséquence immédiate la démission de Bruno Le Maire de son équipe de campagne où il était chargé des questions européennes.

Pour François Fillon, il s'agit en réalité « d'un assassinat politique » non seulement envers lui-même mais aussi envers son camp politique car, pour lui, la date du 15 mars ne tient rien au hasard: elle intervient deux jours avant la date limite du 17 mars fixée par le Conseil constitutionnel pour le dépôt des 500 parrainages nécessaires pour concourir à l'élection présidentielle dont les deux tours se dérouleront les 23 avril et 7 mai. Pour François Fillon, il s'agit là d'un moyen « d'empêcher la droite et le centre de disposer d'un candidat ».

En cas "d'empêchement" d'un candidat le Conseil constitutionnel peut reporter le scrutin

 En réalité, ce n'est pas tout à fait exact car le Conseil constitutionnel a prévu ce cas de figure qui s'apparente à un « empêchement ».

Concrètement, si François Fillon devait démissionner le 15 mars à la suite d'une mise en examen - il a prévenu qu'il ne le ferait pas estimant que seul le peuple était souverain - il ne resterait plus que deux jours à la droite et au centre pour se choisir un nouveau champion. Ce qui serait  difficile. De fait, aucune disposition dans les règles régissant la primaire de la droite (ni celle de la gauche d'ailleurs) ne prévoyait un "plan B". A première vue, ceci pourrait signifier alors que la famille politique de François Fillon n'aurait plus de représentant à l'élection, faute de pouvoir désigner un nouveau candidat, les délais étant dépassés

En fait, un tel scénario est impossible car le Conseil constitutionnel pourrait alors intervenir, aux termes de l'article 7 de la Constitution, modifié en 1976. De fait, Le Conseil constitutionnel peut, sans y être obligé, choisir de reporter le scrutin si un évènement intervient dans les sept jours avant le dépôt des signatures (soit, cette année, à compter du 10 mars).

L'éventuelle mise en examen de François Fillon étant prévue pour le 15 mars, ce délai serait donc respecté. Un tel scénario avait d'ailleurs failli se produire en 2012 quand Eva Joly, candidate officielle d'Europe Ecologie-Les Verts avait été hospitalisée à la suite d'une chute. La décision serait donc entièrement dans les mains du Conseil constitutionnel qui devrait juger de l'importance de l'événement avant de se prononcer sur un éventuel report, afin de laisser le temps à la droite et au centre de se choisir un nouveau candidat.

En revanche, quand des faits conduisant à un empêchement se déroulent entre l'officialisation des noms des concurrents et le premier tour - soit, cette année entre le 20 mars et le 23 avril-  les Sages doivent alors décaler l'élection. Enfin, si c'est l'un des deux candidats en lice pour le second tour qui est concerné par un « empêchement, alors le Conseil constitutionnel se doit d'ordonner que le processus électoral soit entièrement recommencé depuis le début....

Texte de l'article 7 de la Constitution

« Si, dans les sept jours précédant la date limite du dépôt des présentations de candidatures, une des personnes ayant, moins de trente jours avant cette date, annoncé publiquement sa décision d'être candidate décède ou se trouve empêchée, le Conseil constitutionnel peut décider de reporter l'élection.

Si, avant le premier tour, un des candidats décède ou se trouve empêché, le Conseil constitutionnel prononce le report de l'élection.

En cas de décès ou d'empêchement de l'un des deux candidats les plus favorisés au premier tour avant les retraits éventuels, le Conseil constitutionnel déclare qu'il doit être procédé de nouveau à l'ensemble des opérations électorales ; il en est de même en cas de décès ou d'empêchement de l'un des deux candidats restés en présence en vue du second tour ».

Jusqu'ici, un tel cas de figure ne s'est jamais produit sous la Vème République....