Allemagne : une première avancée vers les 28 heures de travail par semaine

Par Grégoire Normand  |   |  669  mots
L'accord négocié entre les représentants d'IG Metall et de la fédération patronale régionale Südwestmetall prévoit notamment une augmentation de 4,3% des salaires. (Crédits : Reuters/Ralph Orlowski)
Après des semaines de conflit, le syndicat IG Metall et les employeurs du secteur de l'industrie ont conclu un accord sur les salaires et le temps de travail dans la région de Bade-Wurtemberg, dans le sud-ouest de l'Allemagne. Outre la possibilité d'effectuer 28 heures de travail par semaine sous conditions, les salariés ont obtenu une hausse de salaire en échange d'une plus grandes flexibilité.

Les tensions redescendent. Après un bras de fer de plusieurs semaines, le puissant syndicat IG Metall et le patronat allemand ont conclu dans la nuit de lundi à mardi un accord sur les salaires et le temps de travail couvrant le secteur industriel du sud-ouest de l'Allemagne. Ce texte devrait servir de base pour les autres régions de la première puissance économique européenne.

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Que prévoit l'accord ?

L'accord négocié entre les représentants d'IG Metall et de la fédération patronale régionale Südwestmetall prévoit notamment une augmentation de 4,3% des salaires en avril et une hausse d'autres éléments de rémunération étalée sur 27 mois, a précisé devant la presse Roman Zitzelsberger, dirigeant d'IG Metall dans le Bade-Wurtemberg.

En plus de l'augmentation d'avril, les salariés toucheront des primes mensuelles de 100 euros de janvier à mars. A partir de 2019, l'accord prévoit aussi une prime annuelle fixe de 400 euros et un versement équivalent à 27,5% de leur congés payés mensuels. Outre les augmentations et les primes, les salariés pourront réduire leur temps de travail hebdomadaire de 35 à 28 heures pour s'occuper de leurs enfants ou prendre en charge des parents malades ou âgés sur une période maximale de deux ans. En revanche, l'organisation représentative des salariés n'a pas obtenu de compensations financières de la part de leur employeur pour le manque à gagner.

Pour le patron d'IG Metall Jörg Hofmann cité par l'AFP, "l'accord marque un revirement sur la question du temps de travail". Il a ajouté que "pendant trop longtemps la flexibilité du temps de travail a été un privilège des employeurs" et "dorénavant les salariés auront le droit d'opter pour un temps de travail réduit, pour eux-mêmes, leur santé ou leur famille".

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Jörg Hofmann lors d'une conférence de presse organisée en 2016 à Francfort. Crédits : Reuters/ Kai Pfaffenbach.

Quelles contreparties pour le patronat ?

Les représentants du patronat ont obtenu en contrepartie plus de flexibilité pour les travailleurs. Les dirigeants pourront augmenter le temps de travail à 40 heures sur la base du volontariat avec tous les risques que cela comporte pour les salariés. En moyenne, la durée hebdomadaire de travail s'élève à 35 heures dans ce secteur. Selon des accords signés en 1995, un plafond de 18% des salariés d'une même entreprise pouvait travailler 40 heures par semaine. Mais avec l'accord, cette limite doit être assouplie. Cette flexibilité accrue pourrait accroître les risques de précarité de ces travailleurs.

L'accord global a été conclu dans un premier temps à Stuttgart dans la région de Bade-Wurtemberg. Cette région au tissu industriel dense, où se situent de nombreux constructeurs automobiles, a toutefois valeur de zone pilote pour l'ensemble du secteur de quatre millions de salariés, qui devrait reprendre à son compte le compromis dans les jours à venir.

Un accord non transposable selon Gattaz

Cet accord n'a pas manqué de faire réagir le patronat française. Lors d'une conférence de presse ce mercredi 6 décembre, le président du Medef a estimé que "l'accord trouvé en Allemagne n'est pas transposable en France".

"Qu'il y ait des négociations de ce type-là, je n'ai rien à dire de particulier. Mais ce n'est pas transposable à la France à ce jour", a-t-il déclaré , soulignant que l'Allemagne avait mené depuis 2003 des "réformes fondamentalement importantes (...) qui ont débouché sur ce que certains appellent le miracle allemand."

Il a par ailleurs estimé que ce type d'avancée devait se faire dans le cadre européen.

"Ce qui est important, c'est de le faire collectivement, et je pense que c'est là que le projet européen devient extrêmement important", a-t-il jugé, appelant à "une convergence sur le plan fiscal et sur le plan social". "Si dans 10 ou 15 ans la plupart des pays européens sont à 28 heures par semaine, et bien pourquoi pas ?", a-t-il lancé.

(Avec agences)