"CumEx Files" : le chancelier allemand Olaf Scholz auditionné dans une vaste affaire de fraude fiscale

Par latribune.fr  |   |  682  mots
(Crédits : SPASIYANA SERGIEVA)
Après des années d'enquête, le scandale dit des "CumEx Files" éclabousse désormais l'image du dirigeant allemand qui doit s'expliquer ce vendredi sur cette affaire de fraude fiscale sur les dividendes. Selon la presse allemande, un email "accable" le successeur d'Angela Merkel au sujet de ces manipulations qui ont permis de soustraire près de 55 milliards d'euros aux fiscs de plusieurs pays européens, dont la France.

Quel est le degré d'implication du chancelier allemand Olaf Scholz dans la retentissante affaire des "CumEx Files" ? C'est la question à laquelle tentera d'apporter une réponse une commission d'enquête parlementaire outre-Rhin pour tenter de comprendre les multiples ramifications de ce scandale financier révélé en 2017. L'affaire des "fichiers" CumEx porte sur un dispositif ingénieux d'optimisation fiscale mis en place par des banques et permettant à des investisseurs étrangers d'alléger leurs impôts sur les dividendes.

Concrètement, il s'agit d'acheter et revendre des actions autour du jour de versement du dividende, si vite que l'administration fiscale n'identifie plus le véritable propriétaire. La manipulation, qui nécessite l'entente de plusieurs investisseurs, permet de revendiquer plusieurs fois le même crédit d'impôt sur les bénéfices attaché au dividende, lésant ainsi le fisc.

Ces entourloupes fiscales ont lésé une dizaine de pays européens de près de 55 milliards d'euros d'impôts depuis 2001, ont affirmé dès 2018 une vingtaine de médias internationaux. A l'époque, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin s'était engagé à poursuivre les banques françaises impliquées.

En Allemagne, qui aurait été lésé de 7,2 milliards d'euros de recettes fiscales, la justice s'active sur le sujet depuis 2019 et le premier procès de deux ex-banquiers britanniques. Le nombre des personnes inculpées dans le pays a atteint la centaine, entre négociants en Bourse, banquiers, avocats et autres conseillers fiscaux, selon le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung à l'époque.

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Des emails probants d'une proche d'Olaf Scholz

C'est donc au tour de l'actuel chancelier de la première économie européenne de passer sur le gril. Concrètement, il est reproché au dirigeant social-démocrate - alors maire de Hambourg en 2016 - de ne pas avoir poursuivi la branche locale de la banque Warburg qui aurait du s'acquitter de dizaines de millions d'euros de remboursement sous la pression du gouvernement d'Angela Merkel.

La commission d'enquête parlementaire va tenter de déterminer si le maire a fait pression sur le fisc municipal afin qu'il renonce à recouvrer ces impôts. M. Scholz nie toutefois avoir fait pression sur les responsables du fisc de la ville de Hambourg, qu'il a dirigée entre 2011 et 2018.

Mais de nouveaux éléments révélés ces derniers jours mettent à mal les dénégations du successeur d'Angela Merkel.

Plusieurs médias ont ainsi révélé ces derniers jours que des mails d'une proche de M. Scholz avaient été saisis par les enquêteurs et apporteraient des éléments "potentiellement probants" au sujet de "réflexions sur la suppression de données".

Ce mail "accable" M. Scholz, résume le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung.

200.000 euros en liquide

Chez un autre élu du parti social-démocrate, susceptible d'avoir joué un rôle dans le remboursement par la banque, les enquêteurs ont découvert plus de 200.000 euros en liquide dans un coffre fort, alimentant les soupçons sur d'éventuels arrangements financiers occultes.

"Les dernières révélations laissent supposer qu'Olaf Scholz et son entourage direct se sont efforcés de ne donner que des informations limitées sur certaines rencontres ou conversations téléphoniques (...) ou de les dissimuler volontairement afin de protéger l'actuel chancelier", dénonce ainsi Matthias Hauer, membre conservateur de la commission des Finances du Bundestag. Ces révélations sont selon lui "politiquement explosives".

Ces soupçons tombent mal pour le chancelier dont la popularité est entamée par la crise énergétique liée à la guerre de la Russie en Ukraine.

En France, "jusqu'à trois milliards d'euros par an" auraient été perdus pour les finances publiques à cause de ces manœuvres, selon Le Monde, qui assurait que les trois principales banques françaises (BNP Paribas, Crédit agricole et Société générale) y ont eu recours.

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(Avec AFP)