Immigration : Bruxelles renonce à imposer la logique des quotas obligatoires

Par latribune.fr  |   |  714  mots
L'idée d'instaurer des clés de répartition obligatoire pour faire face à l'afflux des demandeurs d'asile, soutenue par la Commission, a déclenché une forte opposition, notamment de la part de la Slovaquie, la Hongrie, la République tchèque ou encore la Pologne.
Réunis jeudi en sommet à Bruxelles, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE ont fini par décider de se repartir les migrants sur base volontaire. De vifs échanges ont opposé ceux qui soutiennent et ceux qui refusent une solidarité européenne renforcée.

Un pas en arrière. Les Etats membres de l'Union européenne ont finalement décidé vendredi 26 juin d'organiser la répartition de l'accueil des réfugiés arrivés en Grèce et en Italie sur la base du volontariat, la Commission n'ayant pas réussi à imposer une logique de quotas obligatoires.

Réunis en sommet à Bruxelles, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE se sont querellés pendant sept heures, jusqu'au milieu de la nuit, sur la question de l'accueil par les Vingt-Huit de 40.000 demandeurs d'asile actuellement dans ces deux pays et de 20.000 autres personnes réfugiées hors des frontières de l'UE. Ils se sont en définitive mis d'accord sur un système de répartition volontaire, s'en tenant au chiffre de 60.000 mais accordant une exemption à la Hongrie, qui avait qualifié le plan d'absurde, et à la Bulgarie, l'un des Etats membres les plus pauvres.

Exprimant sa frustration, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a regretté un plan à "l'ambition modeste".

Le "plus grand défi" connu par Angela Merkel

La question d'instaurer des clés de répartition obligatoire pour faire face à l'afflux des demandeurs d'asile, fuyant la guerre en Syrie ou la dictature en Erythrée, a déclenché une forte opposition, notamment de la part de la Slovaquie, la Hongrie, la République tchèque ou encore la Pologne. L'humeur à Bruxelles était ainsi jeudi bien différente de l'unité affichée en avril dernier lors du sommet extraordinaire convoqué dans l'émotion du naufrage d'un chalutier au large de la Libye et de la mort de 900 migrants.

Les débats, qui se sont terminés un peu avant trois heures du matin, ont donné lieu à de vifs échanges entre opposants et partisans d'une solidarité européenne renforcée, comme le président du Conseil italien Matteo Renzi.  Le chef du gouvernement italien a tancé ses collègues sur leur peu d'entrain à soutenir un plan censé répondre à l'urgence de la tragédie des migrants en Méditerranée.

"Si vous pensez que l'Europe n'est qu'une affaire de budgets, ce n'est par l'Europe que nous avions imaginée en 1957 à Rome", a-t-il déclaré.

"C'était un débat très intense", a admis Angela Merkel à la presse, qualifiant la crise des migrants de "plus grand défi que j'ai connu dans les affaires européennes en tant que chancelière", elle qui a traversé en dix ans à la tête de l'Allemagne la crise de la dette de la zone euro ou la confrontation avec la Russie.

Une répartition en fonction de l'économie et de la population des Etats membres

Le président du Conseil européen Donald Tusk a précisé que les ministres de l'Intérieur finaliseraient le dispositif avant la fin du mois de juillet, mais les négociations s'annoncent d'ores et déjà ardues. Les ministres seront chargés de fixer les critères de répartition entre pays membres en fonction de l'économie ou de la population de chaque Etat.

Afin d'aider Rome et Athènes à faire face à la crise, les dirigeants de l'UE ont par ailleurs décidé de leur accorder des moyens financiers pour mettre en oeuvre des centres pour distinguer les réfugiés politiques des réfugiés économiques et rapatrier ces derniers vers leur pays d'origine.

Lundi, les ministres européens des Affaires étrangères avaient aussi entériné le lancement d'une mission navale destinée à combattre les réseaux de passeurs en mer Méditerranée, jugés responsables de la morts de milliers de migrants.

Les accords de Schengen remis en cause

La crise des réfugiés a déjà mis à rude épreuve les accords de Schengen qui garantissent la libre circulation à l'intérieur des frontières du Bloc. L'Autriche a menacé cette semaine d'imposer des contrôles aux frontières de la Hongrie, qui avait cessé d'accueillir des demandeurs d'asile en provenance d'autres Etats membres, ce qui constitue une infraction aux règles communautaires, avant de faire machine arrière.

En France, la présence de milliers de migrants cherchant à traverser la Manche à Calais préoccupe la Grande-Bretagne et le retour à la frontière italienne de migrants à été source d'échanges musclés avec Rome.

(Avec Reuters)