BCE : Christine Lagarde sort du bois, les taux pourraient ne pas baisser avant l’été

Par latribune.fr  |   |  706  mots
« Je dois rester réservée car nous disons aussi que nous dépendons des données et qu'il y a encore un niveau d'incertitude et certains indicateurs qui ne sont pas ancrés au niveau où nous voudrions les voir », a rappelé Christine Lagarde. (Crédits : JOHANNA GERON)
La Banque centrale européenne (BCE) pourrait commencer à réduire ses taux d'intérêt cet été, a déclaré ce mercredi sa présidente Christine Lagarde. Cette dernière a néanmoins prévenu que cette décision dépendrait des dernières données économiques.

Voilà une sortie médiatique qui va plaire aux emprunteurs qui ont vu leur coût d'endettement flamber à cause du resserrement de la politique monétaire. Dans un entretien à Bloomberg Television à Davos, Christine Lagarde a été interrogée sur l'hypothèse qu'une majorité de membres du Conseil des gouverneurs de la BCE se prononcent sur une baisse des taux cet été, voire d'ici l'été. « Je dirais aussi que c'est également probable », a déclaré Christine Lagarde. Une réponse lourde de signification puisque jusqu'alors, la présidente de la gardienne de l'euro se refusait à parler d'une éventuelle baisse à venir.

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Pour rappel, pour combattre l'inflation, accentuée par la hausse des prix de l'énergie au lendemain de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, la BCE s'est lancée dans un cycle inédit de relèvement des taux d'intérêt, procédant à dix hausses d'affilée en les amenant de 0% début 2022 à 4 et 4,75%, avant d'effectuer une pause en octobre.

Mais les investisseurs parient maintenant sur une détente sur les taux, dès le printemps. Les marchés monétaires anticipent actuellement une baisse de 150 points de base sur l'ensemble de l'année.

La baisse de l'inflation « sur la bonne voie »

Et pour cause, l'inflation qui était au-dessus de 10% à l'été 2022, s'est établie à 2,9% en décembre en zone euro. Si le mois de décembre a connu un léger rebond après les 2,4% de novembre, Christine Lagarde a néanmoins affirmé que l'inflation était « sur la bonne voie », mais qu'il était trop tôt pour crier victoire. En zone euro, la BCE table en effet sur une hausse des prix à 2,7% en 2024, 2,1% en 2025, puis 1,9% en 2026.

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« Sur la tendance de fond, la pression s'est clairement retournée sur le prix des biens notamment, affirmait, en effet, dans une interview à La Tribune ce mercredi, Christophe Barraud, économiste en chef de Market Securities. L'inflation pourrait converger vers la cible de la BCE à 2% à l'horizon du troisième trimestre. La Chine est en phase de déflation. Malgré les coûts du fret en hausse, cette déflation en provenance de Chine permet de contrebalancer les récentes hausses de l'inflation ».

Néanmoins, un élément pourrait continuer de peser sur les prix, les tirant à la hausse, les salaires : « Les employés ont perdu du pouvoir d'achat au cours des années 2021 et 2022 et il y a désormais un effet de rattrapage dans les négociations qui ont lieu », a expliqué Christine Lagarde. Pour compenser l'inflation, des augmentations de salaires sont, en effet, négociées dans les entreprises et les administrations de la zone euro, sous l'œil attentif de la BCE qui attend « d'en savoir plus (...) en avril ou en mai » pour décider d'un éventuel assouplissement de sa politique monétaire, a expliqué la présidente de l'institution.

Le risque d'aller trop vite

« Mais je dois rester réservée, car nous disons aussi que nous dépendons des données et qu'il y a encore un niveau d'incertitude et certains indicateurs qui ne sont pas ancrés au niveau où nous voudrions les voir », a-t-elle nuancé. Les taux d'intérêt ont certes atteint un « pic », mais « nous devons maintenir une politique restrictive aussi longtemps que nécessaire pour s'assurer que nous arrivons à un état où l'inflation ne dépasse pas 2% à moyen terme ».

« Le risque pourrait être que nous allions trop vite et que nous devions revenir à un resserrement plus important, car nous aurions ruiné les efforts que tout le monde a déployés au cours des quinze derniers mois », a-t-elle mis en garde.

Un discours qui corrobore celui de Philip Lane, le chef économiste de la BCE. « Une fois que nous aurons acquis une confiance suffisante dans notre capacité à atteindre notre objectif d'une inflation à 2%, la question des baisses de taux reviendra au premier plan. Mais pour l'instant, nous ne disposons que de conjectures, et nous devrons attendre la publication de nouvelles données avant d'aller plus loin », a-t-il déclaré le 14 janvier, lors d'une conférence à Dublin, en Irlande.

(Avec AFP)