L'Allemagne veut un Grexit "pour susciter la peur chez les Français" selon Varoufakis

Par latribune.fr  |   |  421  mots
"Le Grexit serait l'équivalent de l'annonce d'une forte dévaluation plus de 18 mois à l'avance: une recette pour liquider tout le stock de capital grec et le transférer à l'étranger par tous les moyens possibles", s'inquiète Varoufakis .
Wolfgang Schäuble serait convaincu qu'une sortie de la Grèce de la zone euro lui permettrait d'y imposer son modèle disciplinaire, estime l'ancien ministre des Finances grec.

Depuis lundi, il n'est plus le ministre des Finances de la Grèce. Mais il reste fidèle à son image de trublion. Dans une tribune publiée par le journal britannique The Guardian vendredi 10 juillet, Yanis Varoufakis, encore une fois, propose une lecture de la crise grecque défiant le "politiquement correct". Selon lui, en effet, le refus opposé jusqu'à présent par les créanciers de la Grèce à toute demande de restructuration de la dette trouve surtout une explication politique.

"Ma conviction, fondée sur des mois de négociations, est que le ministre allemand des Finances veut que la Grèce soit évincée de la monnaie unique pour susciter la crainte chez les Français et leur faire accepter son modèle d'une zone euro disciplinaire", écrit l'ancien ministre.

La dette grecque utile pour Schäuble

Yanis Varoufakis explicite:

"Après la crise de 2008/2009, l'Europe ne savait pas comment réagir. Devait-elle préparer le terrain pour au moins une expulsion (le Grexit) afin de renforcer la discipline (de la zone euro, NDLR)? Devait-elle évoluer vers une fédération?"

Si "pour l'instant elle n'a fait ni une chose ni l'autre""soudainement, l'insoutenable dette publique grecque, sans laquelle le risque de Grexit se serait estompé, a acquis une nouvelle utilité pour Schäuble", estime l'économiste. Selon lui, "Schäuble est convaincu qu'en l'état actuel des choses, il lui faut un 'Grexit' pour faire de la clarté, d'une façon ou d'une autre".

C'est pourquoi, depuis que Syriza est arrivé au pouvoir, "une large majorité au sein de l'Eurogroupe - sous l'influence de Schäuble - a adopté le Grexit comme solution privilégiée ou comme arme de choix contre notre gouvernement", conclut l'ex-ministre des Finances.

Plus d'un an pour créer une nouvelle monnaie

A cette explication s'ajoutent néanmoins deux autres éléments, précise Yanis Varoufakis: d'une part, l'inertie institutionnelle; de l'autre, le pouvoir sur les débiteurs attribué aux créanciers par cette dette insoutenable.

"Le pouvoir, on le sait, corrompt même les meilleurs", estime-t-il.

Une chose est toutefois certaine aux yeux de Yanis Varoufakis: si la Grèce finissait par quitter la zone euro, créer une nouvelle monnaie prendrait plus d'un an. Le scénario serait alors très inquiétant.

"Le Grexit serait l'équivalent de l'annonce d'une forte dévaluation plus de 18 mois à l'avance: une recette pour liquider tout le stock de capital grec et le transférer à l'étranger par tous les moyens possibles", écrit-il.